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Le « célibat ouvert », une identité-source

Olivier Bonnewijn

N°2020-2 Avril 2020

| P. 21-32 |

Kairos

S’interrogeant sur l’état de célibat si fréquent aujourd’hui, un prêtre de l’Emmanuel, théologien moraliste soucieux de pastorale, n’hésite pas à entendre cette situation comme source de vie et même accomplissement des générations ; une position bientôt défendue dans un ouvrage dont nous sommes heureux de publier ces « bonnes feuilles » en primeur.

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Célibataire chrétien, qui es-tu ? Que dis-tu de toi-même ? Quel est ton mystère ? » Le célibat non-choisi, qu’on pourrait dénommer le « célibat ouvert » – plutôt que d’évoquer d’une alliance ou une vie consacrée – possède sa réalité propre, positive et consistante. Selon nous, c’est un état de vie à part entière [1] qui répond à un appel personnalisé et s’enracine dans la condition baptismale.

Un appel personnalisé

Tout appel de Dieu « est un geste d’amour en vue de la sainteté, qui est toujours une forme d’amour. L’appel est par conséquent formé et guidé par les lois de l’amour et ne peut absolument pas être compris sans la mentalité particulière de l’amour [2] ». Dieu appellerait-il par amour certains hommes et certaines femmes à demeurer single contre leur désir profond ? Imposerait-il le célibat à un certain nombre de personnes en forçant leur liberté ? Il y a quelque chose d’insupportable, voire de blasphématoire, dans cette manière de poser la question. Dieu n’est nullement une sorte de « super Pharaon » autocratique qui gouvernerait ses esclaves au gré de la toute-puissance de ses supposés caprices et convoitises. Il n’est pas non plus une énergie impersonnelle à laquelle les Anciens comme les Modernes donnent le nom de Destin.

Selon nous, la question est mal posée et, puisqu’il s’agit d’un faux problème, ne peut qu’aboutir à une impasse. Il convient de changer de perspective en partant non pas d’une sorte de volonté divine abstraite, mais de la réalité concrète des célibataires : « Dans la situation où je me trouve actuellement, à quoi Dieu m’appelle-t-il ? Dans les tourments lumineux de mon histoire personnelle et transgénérationnelle, quelle route m’invite-t-il à parcourir en sa compagnie ? ». Dieu en effet n’appelle pas des êtres idéaux, comme aime à le rappeler le pape François, mais des personnes de chair et de sang, marquées par les méandres de leur chemin de vie, indissociablement spirituels, psychiques et corporels.

On entend parfois l’expression : « célibat non choisi », écrit Mgr Michel Aupetit. Elle exprime souvent une détresse que je respecte profondément. Pourtant j’aimerais vous dire qu’il faut choisir la vie réelle comme elle se donne et qu’à un tournant majeur de notre liberté intérieure, le Seigneur nous donne de consentir à ce qui est, de choisir ce que nous n’avions pas prévu ou rêvé de vivre [3].

La question de la vocation ne se pose donc pas in abstracto et en général, mais dans le concret des histoires singulières. Pour recevoir des éléments de réponse, elle exige de se détourner d’un monde idéalisé qui n’existe pas et de se convertir à l’humble réalité telle qu’elle se donne hic et nunc dans le concret des situations en mouvement. « Avec ce qui m’est donné de vivre aujourd’hui, à quoi me convies-tu, Seigneur ? »

Comme tout baptisé, chaque célibataire est appelé dans son histoire personnelle à marcher sur un chemin d’alliance, d’épanouissement et de fécondité, non d’indifférence, d’enfermement sur soi-même et de stérilité. Sa vocation est d’aimer et d’être aimé(e), dans l’esprit des béatitudes. Dieu ne l’a pas oublié(e), pour reprendre le tire d’un beau livre de Dominique de Monléon [4] : « Vraiment, Dieu ne t’a pas oublié parce qu’il a infiniment de temps pour toi [...]. Dès ici-bas, il te convie à partager sa Vie, sa Communion trinitaire, sa béatitude, ses projets, ses préoccupations, sa sainteté ».

« Tous ceux qui croient au Christ, quel que soit leur état ou leur rang [5] » sont conviés à la sainteté. Les célibataires sont explicitement mentionnés dans Lumen gentium, à la suite des époux et parents : « Un exemple semblable est donné par les veuves et les non-mariés (innuptis, unique emploi de ce terme dans Vatican II) dont le concours peut être pour la sainteté et l’activité dans l’Église de grande valeur [6] ».

Cette vocation universelle à la sainteté prend sa source – toujours jaillissante – dans le baptême et la confirmation. Au fil des années, elle est alimentée par l’Eucharistie et la Réconciliation. Ces sacrements sont d’authentiques événements qui touchent l’histoire des célibataires qui en bénéficient. Il se passe vraiment quelque chose lorsqu’un enfant ou un adulte est baptisé et confirmé. Dieu choisit réellement quelqu’un de singulier, qui porte tel nom, appartient à telle famille et à tel pays, parle telle langue, est animé de tels désirs, possède tel caractère et tels rêves, tel passé et tel présent.

Être l’élu de quelqu’un

Dans le baptême en effet, le Christ élit une personne unique, gratuitement, par pur amour, pour elle-même. Il s’engage à demeurer à ses côtés pour toujours. Il lui promet de parcourir avec lui les routes de l’existence, les plus joyeuses comme les plus ennuyeuses et les plus sombres. Il noue avec l’élu de son cœur une alliance pour la vie, dans tous les sens du terme « alliance » et pas uniquement dans son sens nuptial. Il l’assure qu’il sera toujours là pour lui, qu’il pourra vraiment compter sur lui, qu’il ne l’abandonnera jamais, qu’il l’accompagnera fidèlement et jusqu’au bout. « Passerais-je un ravin de la mort, je ne crains aucun mal. Car tu es avec moi (Ps 22,4) ». Dans le Nouveau Testament, les premiers chrétiens sont appelés « élus » (eklektoi) à plusieurs reprises [7].

Ce point me semble important à souligner. Car une des souffrances lancinantes des célibataires réside souvent dans le sentiment de n’avoir été choisi par personne, d’avoir été laissé sur le bord de la route. Ou alors d’avoir été choisi pour un temps seulement, mais pas définitivement et totalement. Ou d’avoir été « manipulé » par les désirs d’un partenaire qui s’est révélé peu à peu très tourné vers ses propres intérêts. Ou encore d’avoir raté le bon moment.

J’ai longtemps écouté les voix que le vent porte ;
L’époux venait à moi sans hâte, sans chansons
Et ses pas lents comptaient les gerbes des moissons...
Quand il est arrivé, j’avais fermé ma porte.

Et quand je l’ai rouverte, il était tard... En chœur
Les corneilles criaient dans le ciel monotone.
Alors, j’ai regardé longtemps venir l’autonome...
Qui m’aidera maintenant à porter mon cœur ?

Où rejoindre en courant les autres amoureuses
Qui toutes m’ont laissée au milieu du chemin
Si long, si long encore, où je me lasse en vain ?
Au loin fument, au loin, les demeures heureuses.

Au loin bruit la joie aux mille voix, le chœur
Des seuils clos, des murs pleins d’intérieure fête.
Des rives, des appels m’ont heurtée à la tête
Et des cris d’enfants sont tombés sur mon cœur [8].

Mélancolie d’un exil. Longueur, longueur, longueur d’un chemin sans conjoint et sans enfants. Mise à l’écart de la vie heureuse et de la vie tout court. Ces sentiments – au sens le plus fort et le plus noble du terme –, sont à entendre et à respecter infiniment. Tous, d’une façon ou d’une autre, nous en éprouvons la secrète et puissante résonnance au fond de notre âme. Cependant, ils n’ont ni le premier, ni le dernier mot. Car ils animent un cœur de baptisé, c’est-à-dire le cœur d’une personne élue, quels que soit par ailleurs sa pauvreté et même ses péchés. Ils agitent une personne totalement enveloppée par un amour miséricordieux et indéfectible.

Une famille en un lieu

Grâce à cette élection déconcertante de la tendresse divine, le célibataire appartient à la « famille de Dieu ». Le baptême n’est-il pas une nouvelle naissance (cf. Jn 3,3-8) ? « Vous n’êtes plus des étrangers ni des gens de passage », écrit saint Paul, « vous êtes concitoyens des saints, vous êtes membres de la famille de Dieu (Ep 2,21) ». « Personne n’est sans famille en ce monde : l’Église est la maison et la famille de tous, en particulier de ceux qui “peinent et ploient sous le fardeau” (Mt 11,28) » [9].

Bien sûr, il convient de ne pas idéaliser cette grande « famille » dont l’Évangile ne masque ni les conflits, ni les difficultés. Car l’Église est composée d’hommes de chair et de sang, de pécheurs pardonnés en voie de sanctification. Elle n’est pas un cercle d’esprits angéliques ou de spirituels sublimes. Elle est une communauté de salut, de sanctification et de divinisation, qui vit de son Seigneur. Elle ne consiste pas en une sorte de concept idéal, mais en une réalité incarnée dans une terre et une histoire : telles et telles personnes, par exemple, qui se réunissent tel jour, dans tel lieu, pour telle célébration ou tel engagement.

Sans doute notre mentalité ultralibérale est-elle peu sensible à cette dynamique communautaire. Et le célibataire chrétien n’y découvre pas toujours la richesse relationnelle dont il a besoin et pour laquelle il a été baptisé. Certains lieux sont très limités en effectifs – jeunes en particulier – et par conséquent, en activités porteuses. D’autres en revanche foisonnent de monde et d’initiatives. Mais même alors, force est de constater que les singles peinent souvent à y trouver leur place.

Une fécondité multiforme

Cette élection et cette intégration au corps ecclésial sont largement ordonnées à la transmission de la Vie divine. Le sacrement de confirmation en est le sceau et le moteur. La conscience d’une telle responsabilité pour le prochain permet d’échapper, du moins en partie, aux pensées et aux sensations d’inutilité, de vanité ou de stérilité qui peuvent s’emparer d’un célibataire à certaines heures de son existence.

En effet, le désir de transmettre la vie reçue et de se consacrer à quelqu’un est profondément inscrit dans le cœur de tout homme ou de toute femme, y compris chez ceux et celles qui, pour de multiples raisons, n’ont plus accès à ce désir. À plus ou moins brève échéance, la souffrance est au rendez-vous lorsque qu’une existence tourne en boucle sur elle-même.

Or, la vocation baptismale opère un patient travail de libération de cette épreuve « ontologique » et des sentiments parfois redoutables qui l’accompagnent. Elle révèle la raison profonde de l’existence chrétienne : contribuer à engendrer des personnes à la vie humaine et surnaturelle (cf. Mt 28,19-20). À chaque célibataire, il revient de discerner dans le concret de son quotidien la fécondité multiforme qui est la sienne : celle qu’il désire poursuivre dans le monde [10] – ou parfois dans l’Église [11] –, celle à laquelle il se sent appelé.

Cap sur la Vie éternelle

Cette fécondité baptismale est aimantée par ce « ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’était pas venu à l’esprit de l’homme, ce que Dieu a préparé pour ceux dont il est aimé (1 Co 2,9) ». Les critères d’une vie réussie sont ceux qui permettent d’entrer dans le Royaume de la charité, dans « la Ville Sainte, la Jérusalem nouvelle » qui « descend du ciel d’auprès de Dieu, prête pour les noces, comme une épouse parée pour son époux (Ap 21,2) ». Il ne s’agit pas là d’une sorte de spiritualisme ou « d’opium » faussement consolant, mais de la Réalité la plus réelle à partir de laquelle tout prend sens, consistance et mouvement. En recevoir une conscience de plus en plus vive aide à dimensionner adéquatement la vie de tous les jours, à percevoir sa dignité et sa vocation.

Une telle conscience fait éclater les cadres trop étroits auxquels l’existence d’un célibataire risque parfois de se résigner. Elle donne du « poids » à ses jours, à ses semaines et à ses années. Car son histoire ne suit pas la même trajectoire que celle des gens mariés. Elle n’est pas marquée par « les naissances successives des enfants, l’entrée en sixième puis la majorité de chacun d’eux, suivie de leur mariage ou de leur installation en couple, les naissances des petits-enfants [12]... ». Elle ne s’inscrit pas tout-à-fait dans la même temporalité que celle des familles, ne possède pas exactement les mêmes repères. Dès lors, un célibataire peut ressentir une certaine difficulté à construire des projets sur le long terme, à se projeter dans l’avenir. Il peut éprouver un sentiment de doute et de vanité qui se renforce à certaines étapes, comme par exemple à l’heure de la retraite professionnelle.

La perception du sens profond de son histoire – celle de la charité et de ses promesses d’éternité – aide le célibataire à prendre la vraie mesure de son existence et de celle des personnes qui l’entoure. Elle l’emporte dans une espérance débordante et le fait toucher les rives de l’Éternité. Car « si nous avons mis notre espoir dans le Christ pour cette vie seulement, nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes » (1 Co 15,19).

Une lignée qui s’accomplit

Les célibataires se nourrissent donc de l’espérance en la Vie éternelle. Ils s’en nourrissent même à un tire spécial. Pourtant, ils meurent sans descendance. Sans conjoint et sans enfants, leur destinée semble s’épuiser dans leur propre finitude, privée d’accomplissement. Mais l’apparence, aussi évidente soit-elle, est trompeuse. Car le Christ est mort et ressuscité. Qu’est-ce à dire ?

Le Christ célibataire meurt lui aussi sans enfant. Ce faisant, il ne permet pas aux lignées davidique et lévitique dont il l’héritier de se poursuivre à travers lui. Son histoire semble s’arrêter définitivement dans l’espace désespérément clos d’un sépulcre obscur. Or, voilà qu’il ressuscite. Le tombeau laisse échapper sa proie. Ce fait historique et transhistorique change tout.

En effet, « premier né d’entre les morts » (1 Co 15,20), le Christ transmet désormais la Vie éternelle aux lignées de ses ancêtres et, à travers celles-ci, à celles de tout humain. En ce sens, il est le nouvel Adam, premier principe de vie. « De même que tous les hommes meurent en Adam, de même c’est dans le Christ que tous recevront la vie » (1 Co 15,22). Renversement complet de perspective ! Le Christ célibataire, privé de descendance, devient source jaillissante de vie pour l’éternité. Inversement, Adam, comblé d’enfants, de petits-enfants, d’arrière-petits-enfants..., ne parvient pas à sauver les siens des griffes de la mort. Adam, accompli en sa vie charnelle, demeure finalement dans un inaccomplissement sans issue ; le Christ, inaccompli en sa vie charnelle, conduit à leur accomplissement des hommes, des femmes et des enfants plus nombreux que les étoiles du ciel. En ce sens, le Christ n’est pas seulement le terme de son histoire transgénérationnelle et de l’histoire en général, leur point « Omega », mais leur principe, leur point « Alpha ».

De façon privilégiée, chaque célibataire chrétien est objectivement associé à ce mystère. Avec son Seigneur, il fait entrer sa lignée « dès aujourd’hui et comme par avance, dans le ciel qui est son terme [13] ». Loin de renier son arbre généalogique, il contribue à son aboutissement, à son épanouissement, à sa floraison dans l’Éternité. Hic et nunc ! En sa chair baptisée dans la mort et la résurrection du Christ !

Cette réalité est perceptible chez ceux qui choisissent volontairement le célibat en vue du Royaume et s’engagent dans une forme de vie consacrée. Elle l’est sans doute moins immédiatement chez ceux qui « subissent » leur célibat, avec plus ou moins de rudesse et de déception. Mais qu’ils le veuillent ou non – oserions-nous dire – les célibataires sans alliance matrimoniale et sans progéniture sont unis au Christ Omega et Alpha de l’histoire, dans une proximité déconcertante. Très paradoxalement, au creux de leur redoutable inaccomplissement, ils apparaissent comme « les plus accomplis des enfants des hommes » (Sg 9,6). En eux, l’Alpha de leur lignée rejoint l’Omega. En eux, le second Adam salue le premier, lui offre pleine hospitalité et lui communique une vie qui ne passera pas.

La privation, la solitude et la déréliction vécues par ces hommes et ces femmes se révèlent ainsi comme le lieu secret d’une magnifique fécondité. La « passivité crucifiante de leur chair [14] » qui ne transmet pas la vie biologique devient principe puissamment actif de résurrection, de récapitulation et de communion.

La gracieuse consistance de l’être-célibataire

Le célibataire chrétien n’est donc pas un être « inaccompli », ni enfermé dans un espace-temps asphyxiant, ni stérile et désœuvré, ni isolé, ni abandonné ou oublié. En toute rigueur d’analyse, il n’est pas vraiment célibataire. Il est un homme ou une femme d’alliance et de vie. Son identité humaine s’élabore à l’intérieur de sa condition baptismale. Elle n’est pas « surdéterminée » par des vœux dans telle congrégation ou par un engagement – temporaire ou définitif – au sein de tel ou tel mouvement d’Église. Elle n’est pas non plus marquée par un sacrement, comme dans le cas des gens mariés, des prêtres ou des diacres. Elle est purement et simplement baptismale.

Voilà pourquoi, on peut se demander dans quelle mesure ce ne serait pas aux consacrés, aux prêtres et aux mariés de se situer par rapport aux célibataires, et non l’inverse. Ces états de vie traditionnels, avec leur « image directrice et omniprésente [15] » ne devraient-ils pas se comprendre davantage comme des réalités relatives ? « Désormais, que ceux qui ont une femme soient comme s’ils n’en avaient pas, ceux qui pleurent comme s’ils ne pleuraient pas, ceux qui se réjouissent comme s’ils ne se réjouissaient pas, ceux qui achètent comme s’ils ne possédaient pas, ceux qui tirent profit de ce monde comme s’ils n’en profitaient pas vraiment. Car la figure de ce monde passe » (1 Co 7,19.29-31).

« Sans doute doit-on se rendre aujourd’hui plus attentif », écrit Christoph Théobald, « à la « relativisation » ou à la « désabsolutisation » de nos « états » de vie, qui ne trouvent leur véritable statut et place dans l’Église que grâce à la référence à notre commun baptême. Et si c’était cela que les « célibataires » – en leurs situations toujours particulières – nous rappelaient [16] ! »

En conclusion, le célibat « ouvert » ne se définit nullement comme une absence d’alliance matrimoniale, de vie consacrée ou de sacerdoce. Non, il possède sa signification spécifique, sans nier par ailleurs sa part de souffrance parfois très aigüe et même de « non-sens ». Loin d’être une identité vide ou par défaut, le célibat « ouvert » se révèle comme « l’identité-source », consistante et positive, par rapport à laquelle les états de vie classiquement reconnus comme tels sont appelés à se situer. Il permet à de nombreuses personnes « d’exister pleinement en tant que célibataire [17] » et plus précisément, en tant que célibataire chrétien, au cœur d’une Église fraternelle [18].

[1Cf. Olivier Bonnewijn, « J’existe ! ». Un autre regard sur le célibat, Paris, éd. de l’Emmanuel, 2020.

[2Hans Urs von Balthasar, L’état de vie chrétien, trad. par Julien de Vulpillières, Fribourg, éd. Johannes Verlag, 2016, p. 401.

[3Message au groupe « Célibataires en Église », Colloque des Bernardins, Paris, le 2 février 2019.

[4Dominique de Monléon Cabaret, Dieu ne m’a pas oublié. Perspective pour les célibataires, Paris, éd. Saint-Paul, 2013.

[5Constitution dogmatique Lumen gentium, 1964, n° 40, 2.

[6Ibid., n° 41, 5.

[7Col 3,12 ; 2 Tm 2,10 ; Tt 1,1 ; 1 P 1,1 ; 2,9 ; Rm 8,33.

[8Marie-Noël, Les Compagnons, extrait du recueil Les chansons et les heures, 1920.

[9Catéchisme de l’Église catholique, 1992, § 1658 à propos des célibataires ; cf. Jean-Paul II, Ecclesia in Africa, 1995, n° 63 ; François, Discours devant la communauté catholique en Bulgarie, 6 mai 2019.

[10Concile Vatican II, Décret sur l’apostolat des laïcs Apostolicam actuositatem, 1965, n° 2.

[11Ibid., n° 22.

[12Claire Lesegretain, Célibats, célibataires. Quelles perspectives en Église ?, Documents Épiscopat n° 8, édité par le Secrétariat général de la Conférence des évêques de France, Paris, 2017, p. 20.

[13Roger Tardy, « Le célibat consacré, le célibat non choisi : Épousailles ou naissance d’en-haut ? », dans Vies consacrées 78 (2006-3), p. 184.

[14Ibid.

[15Christoph Theobald, « Quel chemin de vie pour qui n’est appelé ni au mariage ni à la vie religieuse ? », dans La vocation et la mission de la famille dans l’Église et dans le monde contemporain : vingt-six théologiens répondent, Paris, Bayard, 2016.

[16Ibid.

[17Claire Lesegretain, Être ou ne pas être célibataire, Paris, éd. Saint-Paul, 1998, p. 14.

[18Cf. Olivier Bonnewijn, « “Vous êtes tous frères” (Mt 23,8). Le chemin de la fraternité universelle », dans Vs Cs 90 (2018-4), p. 33-50.

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