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Les enjeux théologiques de l’obéissance dans la vie consacrée

Henri Donneaud, o.p.

N°2016-4 Octobre 2016

| P. 33-42 |

Orientation

Dominicain, professeur de théologie à Toulouse, l’auteur est assistant
apostolique de la Communauté des Béatitudes après en avoir été commissaire pontifical ; son article reprend le contenu d’une intervention donnée le 11 juin 2016 lors d’un séminaire « Liberté et obéissance dans la vie religieuse » qui a vu dialoguer, notamment sur les « lanceurs d’alerte », juristes, magistrats, chefs d’entreprises, responsables religieux et épiscopaux.

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L’obéissance est un élément constitutif et essentiel de la vie consacrée. C’est par elle que le consacré, renonçant à sa volonté propre, cherche à s’unir au plus près à l’obéissance du Christ. Elle possède une affinité spéciale et directe avec la charité, dont elle est la voie royale. À cet égard, il ne saurait jamais y avoir d’excès d’obéissance, car le consacré n’en finit jamais de tendre, sans jamais l’atteindre, vers une imitation plus parfaite de l’obéissance du Christ. La vie consacrée, par essence, est chemin permanent vers une obéissance plus entière et radicale. Pourtant, l’histoire longue de la vie consacrée autant que l’expérience ecclésiale récente nous apprennent que, au nom de l’obéissance, des dérives ont été commises, aux conséquences graves et douloureuses. Existent bel et bien, trop nombreux, des abus de l’obéissance.

Comment comprendre ce paradoxe ? C’est que l’obéissance, en son essence, est une vertu, et à ce titre, se situe en un point d’équilibre entre deux pentes qui la dénaturent, soit par défaut (désobéissance), soit par contrefaçon (caricatures de l’obéissance).

Il importe donc de bien comprendre la vérité de l’obéissance, afin de viser son juste exercice et son point d’équilibre, surtout dans sa tension religieuse vers la radicalité.

Les aspects de l’obéissance

En son essence, l’obéissance est d’abord et avant tout une vertu sociale. Son fondement se trouve dans la nature sociale de l’homme et sa finalité dans le bien commun [1]. Elle n’est pas d’abord et par soi une vertu de discipline personnelle, de renoncement et d’ascèse, mais une vertu de justice, visant la juste insertion de la personne individuelle dans un ordre social qui la dépasse. Son but n’est pas de contrarier et redresser la volonté personnelle, mais d’intégrer chacun à l’œuvre commune, de sorte que le bien commun soit atteint. Elle est donc d’abord une vertu du bien commun, non de construction personnelle. De ce premier point, retenons que l’obéissance sera toujours finalisée, et donc conditionnée, encadrée, mesurée par la manière dont elle sert le bien commun.

C’est en régime chrétien que l’obéissance prend une coloration nouvelle, avec une finalité seconde qui s’adjoint à la première. Elle est en effet inséparable du mystère de Jésus Christ et de son incarnation rédemptrice. C’est par son obéissance amoureuse que Jésus a sauvé le monde, et c’est en imitant le Christ obéissant que le chrétien s’unit à Lui et apprend à conformer sa volonté à celle du Père, devenant ainsi toujours plus fils (ou fille) de Dieu dans le Fils de Dieu [2]. L’obéissance acquiert donc une finalité nouvelle, directement liée à sa valeur de renoncement et d’ascèse : par sa vertu purificatrice, elle devient école de charité, voie royale de l’amour de Dieu et du prochain : « Ce ne sera plus seulement l’obéissance service du bien commun, c’est l’obéissance sacrifice offert au Père en union avec Jésus Christ [3] ».

Et à l’intérieur de la vie baptismale, c’est le propre de la vie consacrée que de placer cette obéissance au cœur d’un propos de radicalité : que cette obéissance concrète ne s’exerce plus seulement lorsque l’amour de Dieu ou du prochain le réclame, mais en permanence, comme élément constitutif d’un état de vie stable, par l’offrande radicale à Dieu de toute sa volonté, offrande signifiée par la remise de l’intégralité de sa vie usque ad mortem entre les mains des supérieurs. Tel est le sens du vœu d’obéissance, instrument d’une école concrète et radicale de perfection de la charité.

Certes, la finalité du bien commun n’est pas alors perdue de vue, puisqu’il s’agit bien ultimement de collaborer à la construction du corps de Christ. Mais l’obéissance devient elle-même le bien commun spécifique des instituts de vie consacrée. Ces derniers se présentent d’abord comme des écoles de perfection, dans lesquels chacun vient chercher les moyens d’un cheminement radical vers la perfection de la charité. Ainsi, alors que l’obéissance politique ne peut être finalisée que par la promotion du bien commun de la cité, l’obéissance religieuse, elle, vise d’abord le bien de la personne consacrée, son progrès sur le chemin de l’union à Dieu, puisque l’obéissance est par elle-même chemin de perfection.

On devine évidemment que c’est à travers cette radicalisation religieuse de l’obéissance dans la vie consacrée que les abus y surviennent le plus fréquemment. C’est pourquoi il importe de bien comprendre que si l’obéissance religieuse emporte intensification et radicalisation de la vertu d’obéissance, elle ne la dénature pas, car elle n’est pas une autre vertu. L’obéissance religieuse reste une obéissance et doit se déployer dans le cadre de cette unique vertu de l’obéissance.

La nature de l’obéissance

Pour saisir la nature exacte de l’obéissance, nous allons nous aider de formules-chocs qui, héritées de traditions spirituelles parmi les plus solides et autorisées, ont pu contribuer, par de mauvaises interprétations, aux abus dont nous parlions en introduction : la comparaison avec le cadavre (perinde ac si cadaver), déjà présente chez saint François et reprise par saint Ignace de Loyola [4], ou la notion d’« obéissance aveugle », issue des Pères du Désert et elle aussi reprise par saint Ignace [5]. Comment bien entendre ces expressions ?

Tout d’abord concernant le sujet de l’obéissance, la comparaison avec le cadavre trouve sa première limite dans le fait que l’obéissance, par définition, s’adresse à une personne libre, non à un être inerte et passif. Le type d’influence que met en jeu l’obéissance n’est pas une soumission physique ou passionnelle ; elle doit passer par la liberté de la personne qui obéit, au crible de sa prudence : « L’obéissance est une vertu d’homme libre. Toute obéissance infrahumaine en est une contrefaçon [...] Pour obéir vraiment, il faut être capable de désobéir [6] ». Le précepte, en effet, est proposé à l’intelligence et à la volonté pour que la personne appelée à obéir se détermine par elle-même, toujours après avoir compris le précepte et jugé par elle-même du devoir de l’appliquer. S’il y a nécessité d’obéir au supérieur, ce n’est jamais par une « nécessité de nature », aveugle et mécanique, mais par une « nécessité de justice [7] », pour que la personne se conforme par elle-même, « selon son propre conseil [8] », et donc librement, à ce qui est juste.

Quant à l’objet de l’obéissance, le précepte, puisqu’il est toujours en vue du bien commun et donc d’une action bonne à poser, ne peut porter que sur le plan extérieur et pratique, jamais sur le plan intérieur et spéculatif. Il me commande de faire ceci, jamais de vouloir, aimer ou penser cela [9]. L’acte intérieur, en particulier le jugement de l’intellect, ne peut jamais être commandé par une autorité humaine, mais seulement par Dieu, comme c’est le cas dans la foi théologale. Un supérieur ne peut pas me commander de vouloir ce qu’il veut et de juger que son précepte est bon. Cela serait radicalement contraire à la morale de l’intelligence qui n’atteint le vrai que par son exercice personnel : « Il y a une éthique de la pensée : les supérieurs ne font pas la vérité [10] ». Le supérieur me commande de poser tel acte, mais il ne peut pas me commander de juger son précepte bon. Je garde toujours la liberté intérieure de penser que cet acte commandé n’est pas bon. Le cadavre est intelligent et doit le rester. Et l’aveuglement volontaire susceptible de rendre vertueuse l’obéissance ne saurait aucunement porter sur l’intelligence.

Certes, il relève de l’obéissance, ou plutôt de la docilité qui lui est liée, de chercher à saisir du mieux possible, par l’intelligence, la bonté qui peut (et normalement doit) être incluse dans le précepte, afin en particulier de le mettre en œuvre de la façon la plus efficace possible, mais le jugement final sur cette bonté ne relève que du sujet, pas du supérieur. Je puis, autant que je dois, obéir à un précepte même si ses motifs et son contenu ne me paraissent pas les meilleurs [11].

Quant à la personne qui commande, elle ne peut le faire que pour autant qu’elle a autorité. L’autorité n’est pas un pouvoir arbitraire et indéfini qui tiendrait au fait que telle personne serait par elle-même et en toute chose supérieure à telle autre. Elle est directement relative au service du bien commun et conditionnée par ce service. Certes, l’autorité vient toujours ultimement de Dieu, et donc il est toujours conforme à la volonté de Dieu que l’on obéisse au détenteur de l’autorité. Mais si l’autorité vient de Dieu, le précepte, lui, ne vient pas de Dieu. Il vient du supérieur, en vertu d’une autorité qui est certes divine en son origine première, mais, en sa nature de précepte et en son contenu, il reste œuvre d’homme. Il n’est pas exact, et il est même dangereux, de dire que le précepte du supérieur est « parole de Dieu ». Le précepte est parole d’homme, fruit d’un discernement et d’une délibération humaines, quelles que soient par ailleurs les assistances divines dont a pu bénéficier le supérieur. Le précepte pourra d’ailleurs souvent porter les marques de son origine toute humaine, par ses déficiences souvent bien visibles (intérêt personnel, passions). Si celui qui obéit accomplit la volonté de Dieu, ce n’est donc pas parce que le précepte exprime en lui-même nécessairement la volonté de Dieu, mais parce que c’est la volonté de Dieu que j’obéisse à celui qui tient son autorité de Dieu [12].

Enfin, quel est le seul motif légitime de l’obéissance, dont le subordonné doit avoir claire conscience, puisque seul ce motif peut le pousser à obéir librement ? Je dois obéir non pas parce que je subis l’influence morale de mon supérieur (ascendant, prestige, crainte, admiration), non pas parce que je constate que le précepte est bon et conforme à la volonté de Dieu, non parce que je suis convaincu que mon supérieur a raison, mais parce que le précepte vient de celui qui a autorité pour décider en vue du bien commun, et en particulier, si je suis consacré, en vue de mon progrès dans l’obéissance, la conformité au Christ et la charité. Nous saisissons alors où doit se trouver l’aveuglement nécessaire à une véritable obéissance religieuse. Très exactement sur tous les éléments humains qui accompagnent, motivent et constituent le précepte du supérieur (ses qualités ou défauts, ses motivations, son appréciation de la situation), non pas en eux-mêmes, certes – car il est toujours légitime et même nécessaire de percevoir et juger le réel –, mais en tant qu’ils pourraient devenir motif d’obéissance ou de non-obéissance. Il n’est pas question de s’interdire de voir les limites du supérieur et de son précepte (on ne commande pas l’intelligence), mais il s’agit de ne pas en tenir compte lorsqu’il faut décider volontairement d’obéir ou non. Obéir comme un cadavre, ce n’est pas cesser de réfléchir et de vouloir, mais bien plus profondément, ne pas opposer de résistance au précepte et s’y soumettre entièrement par la volonté et l’intelligence, en dépit de la perception lucide de ses éventuels défauts.

Les contrefaçons de l’obéissance

Nous pouvons les aborder de deux points de vue : celui des supérieurs et celui des subordonnés.

Du point de vue des supérieurs, le désordre de l’obéissance vient ce que le supérieur, en prenant son décret, usurpe une autorité qu’il n’a pas. C’est l’abus de pouvoir. Soit qu’il empiète sur les dispositions édictées par une autorité supérieure (étant réservé le pouvoir d’adaptation propre à un supérieur intermédiaire, chargé d’appliquer à des cas particuliers une loi générale) ; soit qu’il n’ait pas respecté les règles qui encadrent le processus de décision ; soit qu’il intervienne sur un domaine qui ne relève pas de son autorité, en particulier sur ce qui ne concerne pas la recherche du bien commun et, pour des religieux, l’application de la règle. Nous trouverons dans ce dernier cas les préceptes par lesquels le supérieur prétend commander au subordonné des actes purement intérieurs, comme d’aimer ceci ou de penser cela, alors que son autorité s’étend exclusivement sur des actes pratiques extérieurs.

Si dans de tels cas le subordonné n’est pas tenu d’obéir, c’est tout simplement que ce qui passe pour un précepte n’en est pas un. Faute de précepte, il n’y a pas d’obéissance possible. Ce qui suppose toujours, de la part du subordonné – sans évidemment tomber dans la suspicion et la méfiance a priori – la capacité de juger autant qu’il est en son pouvoir de l’existence d’un vrai précepte.

Du point de vue du subordonné, il peut y avoir soit désobéissance, soit contrefaçons de l’obéissance. Commençons par ce second point.

Saint Thomas nomme cet abus « obéissance indiscrète [13] », c’est-à-dire, au sens propre, une obéissance non discernée, non réfléchie, une obéissance aveugle au mauvais sens du terme. Cet abus peut provenir de deux côtés : soit de la matière du précepte, soit du motif de l’obéissance.

Concernant la matière, n’est jamais légitime et ne relève jamais de l’obéissance le fait d’exécuter un ordre qui commanderait l’accomplissement d’un péché. S’il est vrai que l’obéissance à proprement parler, ne permet pas de juger le précepte reçu, il est impératif pour le subordonné de toujours juger la moralité de l’exécution personnelle du précepte : je ne dois jamais exécuter un précepte qui me ferait commettre un acte peccamineux ; ma responsabilité ne sera pas exonérée du fait que j’ai obéi. En revanche, surtout dans le cadre de la vie consacrée, il y a des situations où il peut être bon et même nécessaire d’exécuter un précepte illégitime, si ses effets sont limités à ma propre personne et que la dénonciation de l’abus de pouvoir serait susceptible de provoquer un scandale chez d’autres personnes moins éclairées.

Concernant le motif de l’obéissance, devient indiscrète une obéissance concrètement fondée sur d’autres motifs que la seule autorité du supérieur. C’est le cas, le plus souvent, des conditionnements psychologiques et moraux qui font que l’on se soumet à un abus de pouvoir soit par intérêt ou ambition (flagornerie), soit par admiration aveuglée, par peur, par incapacité de réfléchir et discerner, ces derniers cas découlant facilement d’une emprise mentale exercée plus ou moins consciemment par le supérieur.

Ces dernières situations, nous l’avons appris, sont particulièrement délicates et douloureuses, car il existe des psychologies fragiles et vulnérables qui s’exposent facilement à ce défaut de discernement du seul motif légitime de l’obéissance. C’est normalement au supérieur d’être attentif à tout faire pour éduquer ses subordonnés à l’exercice le plus plein possible de leur liberté à l’intérieur de l’obéissance, au lieu de les enfermer dans une pseudo-obéissance qui devient plutôt dressage et manipulation.

De l’excès inverse, la désobéissance, je ne dirai finalement qu’une chose, qui rejoint précisément l’obéissance indiscrète. Il est fréquent que les raidissements contre l’obéissance traduisent moins un excès de personnalité et de sens de la liberté individuelle qu’un réflexe de défense lié à une vulnérabilité mal contrôlée et craintive. On se raidit contre l’influence du supérieur parce qu’on ne se sent pas assez capable de l’assumer librement. L’esprit d’indépendance contre le supérieur légitime peut ainsi aller de pair avec la dépendance, voire la fascination, envers d’autres meneurs sans légitimité mais qui passent pour plus séduisants. Une fois encore, l’obéissance est privée de son seul vrai motif : l’accueil du précepte qui provient de l’autorité légitime.

 

En conclusion, et pour alimenter notre réflexion de ce jour sur les abus de l’obéissance au sein de la vie consacrée, je noterai ce fait constaté en de nombreux cas, en particulier au cours des dernières décennies : les communautés au sein desquels se produisent les plus nombreux abus de pouvoir par manipulation, aveuglement provoqué et infantilisation entretenue peuvent être les mêmes dont les responsables tentent d’échapper le plus possible à la régulation ecclésiale, et en particulier, lorsque l’étau se resserre, à une véritable obéissance ecclésiale. C’est pourquoi, si je ne saurais assez plaider pour que les autorités ecclésiales se montrent vraiment vigilantes dans l’accompagnement des communautés de vie consacrée – et ce d’autant plus du fait de la radicalité essentielle de l’obéissance qui en est l’essence même –, je donnerais surtout la priorité à une formation vraiment rigoureuse, solide et approfondie quant à la vérité de l’obéissance telle qu’une expérience bimillénaire en a doté l’Église. On ne reprochera pas à un dominicain d’en appeler toujours d’abord à l’intelligence, vecteur indispensable d’une volonté droite, d’une obéissance juste et d’une charité vraie.

[1M.-M. Labourdette, Cours de théologie morale. t. 2. Morale spéciale, « Bibliothèque de la Revue thomiste », Paris, Parole et Silence, 2012, p. 734 : « Le seul véritable fondement [de l’obéissance] est le caractère social de la vie humaine ».

[2Cf. Rm 5,9 : « Comme par la désobéissance d’un seul la multitude a été constituée pécheresse, ainsi par l’obéissance d’un seul la multitude a été constituée juste » ; Ph 2,8 : « S’étant comporté comme un homme, il s’humilia plus encore, obéissant jusqu’à la mort, et à la mort sur une croix » ; He 5,8 : « Tout fils qu’il était, il apprit, de ce qu’il souffrit, l’obéissance ; après avoir été rendu parfait, il est devenu, pour tous ceux qui lui obéissent, principe de salut éternel ».

[3M.-M. Labourdette, Cours de théologie morale, op. cit., p. 741.

[4Saint Bonaventure, Vie de saint François d’Assise (Legenda major) VI, 4 : « Corporis mortui similitudinem pro exemplo [obedientiae] proposuit » ; Constitutions de la Compagnie de Jésus, n° 547.

[5Saint Ignace de Loyola, Lettre sur l’obéissance de 1553, n. 15 (éd. Dumeige, DDB, 1958, p. 302).

[6M.-M. Labourdette, Cours de théologie morale, op. cit., p. 739-740.

[7Saint Thomas d’Aquin, Somme théologique, IIa‑IIae, q. 104, a. 5, resp.

[8Ibid., a. 1, resp. : « Libera electione ex proprio consilio procedente ».

[9Ibid., a. 5, resp. : « En ce qui concerne la motion intérieure de la volonté, l’homme n’est jamais tenu d’obéir à un homme, mais seulement à Dieu ».

[10M.-M. Labourdette, Cours de théologie morale, op. cit., p. 737.

[11H. A. Parenteau, « La notion d’obéissance aveugle dans la Lettre de saint Ignace aux Pères et Frères du Portugal (1553) », dans Revue d’ascétique et de mystique 38 (1962), p. 31-51 (50) : « Les cinq nuits de l’obéissance n’empêchent nullement l’obéissant de s’aviser de la réalité humaine du supérieur et de la valeur psychologique et morale de ses motifs d’action, de la valeur intrinsèque des raisons techniques de l’ordre, de l’opportunité ou de l’inconvenance de la chose commandée, de ses propres réactions devant le commandement reçu. Tout cela est objet de jugement spéculatif, dont la loi propre est d’être docile à toute réalité objective. En vertu de ce même jugement spéculatif, le sujet peut même se dire : “Si j’étais à la place de mon supérieur, je ne commanderai pas cela” ».

[12Cf. saint Augustin, Enarrationes in psalmos, Ps 70, I, 2 (PL 36, 875) : « Ce n’est pas le Seigneur, mais leur père qui avait fait ces prescriptions ; ils les acceptèrent néanmoins comme si elles émanaient de leur Dieu. Car s’il est vrai que le Seigneur n’avait pas commandé de ne pas boire de vin et d’habiter sous des tentes, il avait toutefois ordonné aux enfants d’obéir à leur père. Le fils ne doit donc refuser obéissance à son père que quand le père lui commande à l’encontre de Dieu, car alors le père n’a plus le droit de s’irriter de la préférence que l’on donne à Dieu sur lui. Mais quand le père commande ce que Dieu ne défend pas, on doit lui obéir comme à Dieu, puisque Dieu a ordonné d’obéir à un père ».

[13Saint Thomas d’Aquin, Somme théologique, IIa-IIae, q. 104, a. 5, ad 3um : « Obedentia indiscreta ».

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