Un périodique unique en langue française qui éclaire et accompagne des engagements toujours plus évangéliques dans toutes les formes de la vie consacrée.

A propos d’un ouvrage récent

Où va la vie consacrée ? Essai sur son avenir en Occident

Benoît Malvaux, s.j.

N°2004-4 Octobre 2004

| P. 280-281 |

N. HAUSMAN, Où va la vie consacrée ? Essai sur son avenir en Occident, Bruxelles, Lessius, 2004, 20,5 x 14,5 cm, 240 p., 22,00 €

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S’il est un ouvrage dont la recension dans Vies consacrées se justifie, c’est bien celui-ci. Que ce soit par le thème abordé – qui de nous n’est pas préoccupé du futur de la vie consacrée ? – ou par la personnalité de son auteur – directrice de la revue, ancienne supérieure générale, auteur de nombreux ouvrages et articles sur la vie consacrée – il ne devrait pas manquer de susciter l’intérêt des lecteurs de la revue.

Dès les premières pages, le ton est donné : s’il s’agit de repartir du Christ, à l’invitation du récent document romain, dans quel sens convient-il d’orienter sa marche ? En d’autres termes : repartir du Christ, oui, mais pour aller où ? Pour l’auteur, il ne s’agit certainement pas de vouloir en revenir aux origines. Aller vers l’avenir, c’est bien plutôt vivre intensément le présent, un présent appelé à prendre la forme d’un redimensionnement de la vie consacrée vers la plus petite échelle, un présent où les consacrés sont particulièrement aux avant-postes, là où l’Église ne se porte pas spontanément.

Sur ce chemin difficile mais passionnant, la vie consacrée peut s’appuyer sur certaines interventions magistérielles récentes, particulièrement l’exhortation Vita consecrata et le synode de 1994 dont cette dernière est le fruit. L’auteur parcourt ces documents pour y mettre en évidence certaines avancées doctrinales, notamment à propos de l’origine évangélique de la vie consacrée, tout en reconnaissant que de nombreuses questions restent ouvertes, ainsi dans le domaine de l’ecclésiologie de communion.

Si la parole magistérielle peut aider, il n’empêche que c’est d’abord à la vie consacrée elle-même de s’interroger sur ses propres fondements. L’auteur aborde cette question à partir d’une des critiques les plus radicales qui ait jamais été portée à l’égard des vœux religieux, à savoir le jugement de Luther. Pour cet ancien ermite de saint Augustin, les vœux ne sont pas fondés sur la Parole de Dieu, mais ils la combattent. L’Évangile s’oppose en effet décidément à l’idée d’une participation à Christ contrôlée et mesurée par l’Église, comme c’est le cas lorsque celle-ci définit un état de vie qui serait participation privilégiée à la suite du Christ.

Face à cette condamnation sans appel, il s’agit de s’interroger sur le cadre évangélique et spirituel de la vie consacrée. Aujourd’hui, on est davantage conscient que la vie consacrée n’a pas le monopole du radicalisme évangélique, mais que tous les baptisés sont invités, chacun à leur manière, à répondre à l’appel adressé au jeune homme riche en Mt 19. Si la vie consacrée est ainsi un des choix paradigmatiques de la vie chrétienne telle qu’elle apparaît dans l’Évangile, elle n’en a pas moins la particularité de témoigner que la gratuité du don de Dieu est surabondante. La tradition spirituelle, quant à elle, met en évidence le véritable foisonnement des formes de vie consacrée dans l’histoire, signe manifeste du travail de l’Esprit dans son Église. C’est à l’écoute de ce même Esprit que la vie consacrée pourra affronter les questions difficiles qui sont les siennes aujourd’hui, comme le vieillissement accéléré des ses membres et la question connexe du rapport entre anciens et plus jeunes dans les communautés ou les instituts.

Dans la dernière partie de l’ouvrage, l’auteur s’interroge sur quelques éléments essentiels de la vie consacrée particulièrement discutés aujourd’hui : la consécration à Dieu dans son Église, qui n’est pas un simple prolongement de la consécration baptismale, mais est « particulière » à de multiples égards ; la contribution de la vie consacrée à la communion ecclésiale, dont un test particulièrement actuel est son attitude à l’égard des communautés nouvelles ; son engagement dans les nouveaux aréopages de la mission. Sur tous ces fronts, il s’agit d’une manière ou d’une autre d’être témoins de la Cité de Dieu toujours en croissance.

C’est donc à un beau parcours des questions actuelles de la vie consacrée auquel nous convie l’auteur. Sans la suivre nécessairement dans tous ses développements, on appréciera la franchise avec laquelle elle aborde ces questions difficiles. On relèvera également qu’il se dégage de l’ensemble de l’ouvrage comme une espérance lucide. Une espérance qui ne nie pas les difficultés présentes, mais qui ne se laisse pas non plus submerger par elles, parce que, par-delà les incertitudes du temps présent, elle en revient sans cesse à la raison d’être essentielle de la vie consacrée, qui n’est jamais que de répondre à l’appel gratuit de Dieu.

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