Visibilité sociale et identité des Ordres religieux vieillissants
Paul-André Turcotte
N°2001-5 • Septembre 2001
| P. 306-323 |
Ici aussi nous avons une démarche peu pratiquée dans notre revue. Elle se déclare et est effectivement de nature sociologique. Comme telle, elle ne peut donc dire le tout de la « situation » décrite. Au niveau qui est le sien, elle ne rencontre pas directement - qui le peut ? - le secret des cœurs et de ces communautés « vieillissantes ». Pourtant, nous pensons que ce regard, qui nous donne accès à celui, parfois critique et même cruel, que l’on porte sur nous « de l’extérieur » n’est pas négligeable, car il met en examen d’une part la manière dont nous faisons « signe » et, d’autre part, il nous invite a accueillir, là même où « nous sommes faibles », la nouveauté vivante, eschatologique, de Celui en qui « nous sommes forts ».
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La décroissance numérique des ordres religieux est un fait qui s’impose à l’observateur du catholicisme de l’Atlantique Nord. Le constat est massif, encore que certains ordres y connaissent une relance du recrutement depuis quelques années. D’autres ne cessent de s’étendre essentiellement dans les pays de mission. Même dans ces pays, des fondations de congrégations remontant au siècle dernier, tel en Colombie, affichent un recul décisif du recrutement et, son corollaire, le vieillissement des effectifs. Il se trouve aussi des ordres religieux dont l’ensemble des implantations sont affrontées au déclin. Dans ce cas, la disparition pure et simple apparaît inéluctable à court ou moyen terme.
L’intention ne saurait être de rendre compte des cas de figure possibles. Le propos s’en tiendra aux ordres religieux globalement vieillissants, ceux où des retraités selon les critères civils côtoient des confrères plus jeunes. Ces derniers constituent une portion mineure de l’ensemble, dont la moyenne d’âge se situe habituellement dans les 70 ans et plus. Il sera question de la vie ou survie de ces ordres sous l’angle de la visibilité sociale, du rapport à l’espace public et de l’identité [1].
Le point de vue adopté fait sienne la perspective sociologique. Celle-ci, nous le savons, ne renvoie pas d’abord à un donné révélé ou à une tradition religieuse, mais bien plutôt à une démarche de connaissance qui a son point de départ dans l’observation de faits et la formulation de questions conduisant à leur intelligence en tant que faits sociaux. Petit à petit des hypothèses sont avancées, qui servent à scruter les coins et recoins d’un phénomène comme lieu d’interactions sociales particularisées. Ce faisant, des corrélations se tissent entre les éléments d’observation, et une cohérence d’ordre rationnel prend forme. L’interprétation ainsi obtenue est en mesure de rendre compte de sa fabrication : il s’agit d’une connaissance conquise et néanmoins limitée, par exemple selon qu’elle ne retient que l’observable quantifiable ou qu’elle privilégie le qualitatif observable mais non mesurable. Des aspects techniques entrent en jeu, aussi bien que la conception de la société sous-jacente aux hypothèses et à l’analyse [2].
La description qui suit recouvre des situations observées directement en France et au Québec, ou rapportées dans des études américaines, italiennes ou autres. La relation s’exprime à mi-chemin du singulier et du général. À ce titre, elle avance une compréhension globale et contextualisée, qui peut être prise comme un vis-à-vis stimulant la compréhension de cas particuliers.
Diminution des effectifs et métaphore de la décroissance
La diminution des effectifs est un fait qui s’impose pour la grande majorité des ordres religieux dans l’espace européen, américain ou canadien. Il n’est pas rare d’y rencontrer un ordre religieux [3] dont les effectifs actuels se situent au tiers de ce qu’ils étaient il y a un quart de siècle. L’observation est corroborée par les données empiriques, prises globalement. Le nombre des religieuses américaines atteignait 103 269 en 1990, soit 76 685 de moins qu’en 1965. De 1950 à 1966, l’augmentation avait été de 23 %, soit de 147 000 à 181 421 ; le mouvement de décroissance, enregistré dès 1966, se soldait par une perte de 30 % dans les vingt années suivantes, soit de 181 000 à 126 100. En 1990, la moitié des religieuses américaines étaient âgées de 66 ans et plus. Depuis cette date, le vieillissement s’est accentué, vu le faible recrutement et l’espérance de vie de plus en plus élevée [4].
La situation est similaire au Québec, en France ou en Belgique. En 1968, le nombre des religieuses dans ces pays était respectivement 43 151,109 890 et 29 139 ; en 1984,25 303, 70 329 et 26 352 ; en 1994, 18 589, 66 913 et 16 580. La Belgique se démarque par un déplacement moindre dans un premier temps. La diminution des effectifs tourne autour de 50 % sur vingt-six ans, avec une pointe (57 %) pour le Québec. Quant à la classe d’âge, en 1994, elle offre une grande similitude entre le Québec et la France : près de 50 % des religieuses ont plus de 75 ans ; autour de 30 %, 65-74 ans ; un peu plus de 20 %, 50-64 ans ; les moins de 50 ans représente quelque 5 % de l’ensemble. La même année, la proportion des religieuses dans la population, soit sur 10 000 habitants, diverge passablement : 17,84 en Belgique, 12,08 en France et 26,95 au Québec [5]. D’autres données, notamment en ce qui regarde les congrégations masculines [6] indiquent un processus qui ne cesse de se conforter au sein des catholicités de l’Atlantique-Nord.
La plupart des congrégations féminines et masculines qui sont aux prises avec une décroissance continue des effectifs et leur vieillissement connaissent une telle condition depuis un temps relativement court dans leur histoire. Même que les heures de gloire ont souvent été la part de la majorité des membres. Leur action et celle de leurs devanciers ont rayonné des décennies durant et ont marqué des milieux d’Église ou de la société. Le passé volontiers enjolivé console des jours amers, sans garantir pour autant quelque promesse d’avenir.
La condition de décroissance, métaphoriquement parlant, s’apparente à celle d’un arbre aux racines étendues et profondes, dont le large tronc a peine à porter un quelconque branchage, qui, lui, fait contraste avec l’épaisseur sinueuse de l’écorce noirâtre. Cet arbre fut d’abord une pousse fragile et verdoyante, dont la vitalité se nourrissait à même l’humus, l’énergétique des commencements. La pousse grandit, aux côtés d’autres qui disparurent avec le temps. Avec les disparitions et les rejetons, le paysage des alentours se modifia considérablement. En raison de facteurs extérieurs, éventuellement hostiles, l’environnement changea aussi rapidement que l’arbre lui-même. L’enracinement de l’arbre, sa mémoire biologique, l’aguerrissait contre les intempéries et les hostilités du milieu.
L’indemnité était acquise, quitte à entraîner une stabilité, du moins apparente. L’avenir paraissait assuré à tout jamais. Or, les canaux de vitalisation se rétrécirent, presque imperceptiblement, et l’environnement se révéla de plus en plus favorable à d’autres types de pousses. Le tronc n’en grossissait pas moins, mais les branches mortes ne se renouvelaient plus comme auparavant. Dans l’entourage, certaines espèces se reproduisaient plutôt par les rejetons qui puisaient leur force de vie dans l’arbre géniteur, qui du même coup pourrissait. Pour d’autres il ne restait plus que quelques rameaux, mais ces rameaux resplendissaient de santé. Il y avait bien une programmation inscrite dans la nature des choses, mais cette programmation ne se révélait pas à sens unique. Même que pointaient à l’occasion des bourgeons féconds là où tout portait à n’entrevoir que l’effacement de la mort. Le climat hostile s’était bonifié, ou un coup de main (des humains) avait contribué à la vitalisation des forces restantes. Dans le paysage se posait la question à l’observateur : qu’en est-il des forces de vie et des forces de mort ? La vie, elle, continuait de tourner.
La métaphore dit le caractère tout à la fois cyclique et rectiligne d’un mouvement qui a un commencement et une fin. Une inversion s’est opérée, sur un temps variable selon les spécimens. Elle suit la pente continue du versant descendant de la courbe d’évolution, à moins que celle-ci se présente plutôt en dents de scie, avec ses successions de montées et de chutes, d’avancées et de reculs.
Dispersion des effectifs et différenciation de l’investissement social
Tout aussi significatifs que la diminution des effectifs apparaissent leur dispersion et le retrait de l’espace public des engagements individuels ou communautaires. Il s’agit de l’aboutissement d’un processus qui continue de modifier la figure congréganiste. Le propos à ce sujet cible les ordres masculins dans le contexte nord-américain.
Les congrégations catholiques masculines, notamment celles qui se vouaient prioritairement à l’enseignement, entretiennent des rapports avec l’espace public d’un type proche de celui des congrégations enseignantes féminines. De part et d’autre, le repli et l’individualisation de l’investissement social tâchent de composer avec les contrecoups du vieillissement des effectifs. Cependant, il semble bien, du moins dans le cas québécois, que l’individualisation des insertions soit bien davantage marquée du côté masculin. Depuis la fin des années soixante se sont développé les ententes contractuelles personnalisées entre la direction congréganiste, locale ou centrale, et les sujets dont l’engagement dans la société requièrent des conditions adaptées, entre autres d’ordre logistique ou financier.
Le degré de dispersion des effectifs, conséquence de l’individualisation et de l’abandon d’œuvres communautaires varie notablement selon les ordres religieux. Il s’en trouve aux États-Unis qui ne comptent plus de communautés locales constituées à ce titre. Des lieux d’accueil des membres et de fréquentes rencontres entre les secteurs d’activité, à l’occasion de fêtes ou de réunions consultatives et décisionnelles, contribuent à cultiver un certain « esprit communautaire ». Tout autant, les factions idéologiques, tel à propos de l’ordination presbytérale des femmes ou de l’exercice du pouvoir épiscopal, ne manquent pas, ce qui rebondit sur les discussions à l’intérieur de la congrégation. Du même coup, le travail de soutien et de coordination des instances administratives s’est complexifié au point que la gestion du personnel recourt au cas par cas, même en ce qui regarde les critères de discernement communautaire.
La variation des modalités d’insertion est observable également selon que les congrégations comprennent ou non des clercs parmi leurs membres. Il semble bien que les congrégations de religieux non-clercs connaissent une situation similaire à celle des congrégations féminines davantage que les congrégations de religieux-clercs. Ces dernières jouissent habituellement d’une plus grande autonomie par rapport aux instances diocésaines que les premières, nonobstant le statut canonique au sein de chaque catégorie. Or, nombre d’ordres religieux de droit pontifical consentent à une intégration à l’Église institutionnelle, spécialement dans les offices diocésains ou les paroisses, à l’égal des sociétés de vie commune, de clercs ou des congrégations de droit diocésain. Dans le cas de l’intégration ferme dans les créneaux ecclésiastiques officiels, des distinctions relevant tout à la fois de la spiritualité et de la « mission » ont tendance à s’amenuiser. Nous ne sommes pas pour autant devant l’anonymat de l’acteur social qu’est le religieux ou le nivellement des stratégies d’action.
Des congrégations ont conservé la direction et la propriété de quelques œuvres : conséquemment, la vocation héritée de la tradition est confrontée aux nouvelles conditions, extérieures à la communauté. Toutefois le consensus ne va pas de soi entre le maintien de formules bien établies et la revitalisation dans des termes autres. La coexistence des positions est habituellement préservée, par-delà les divergences. L’entente, à quelque degré que ce soit, commande des accommodements et la référence explicite à la réserve de significations que véhiculent la tradition et la socialisation commune (si jamais cette dernière persiste).
La coopération dans l’activité va de pair avec la socialisation permanente : des temps d’échange et d’intériorisation rythment le quotidien. Ainsi une vision partagée est nourrie, qui conforte l’affirmation extérieure de la distinction. Cette dernière doit être assumée par les non-membres, au titre de coopérant ou de personnel auxiliaire. La participation à un projet commun est encouragée par les communications dans l’ordinaire du travail, des sessions de formation continue et une littérature de circonstance. C’est qu’il importe de réduire les dissonances entre les expériences diverses, entre les congréganistes et les laïcs ou clercs non religieux, et, peut-être surtout, entre les générations.
Ce modèle dessiné à grands traits se présente comme minoritaire dans l’espace congréganiste canadien. Socialement reconnu, il ne réussit pas pour autant à attirer l’attention des organismes centraux que sont, par exemple, la Conférence religieuse canadienne (CRC) et ses sections régionales, dont celle du Québec (CRC-Q). Le politiquement correct de ces organismes va plutôt dans le sens de la promotion de la religieuse dans l’Église selon la perspective féministe radicale, du discours en faveur des laissés-pour-compte et d’une spiritualité soucieuse d’épanouissement psychosomatique expressément personnalisé.
Ces points d’animation et de coordination à la grandeur du pays sont repris par des supérieurs de congrégations déstabilisées. À l’observation, ils paraissent y recueillir relativement peu d’assentiment auprès de subordonnés. Pour ceux-ci, les problèmes se rapportent essentiellement au vieillissement et au faible recrutement, à l’éparpillement des forces vives et à la baisse du niveau culturel chez les religieux, à la reformulation d’une mission particularisée qui soit pertinente tant dans la société que dans l’Église. Les périodiques américains sur la vie religieuse en sont venus à aborder de front ces questions, ce qui tarde du côté canadien où leur expression publique se fait rare et prend volontiers la forme de la revendication d’un réalignement total des orientations en cours. Devant ce qui apparaît comme un « pourrissement » de la situation, des congréganistes soutiennent ouvertement ne plus attendre quelque remède des instances administratives : elles ne disposent pas de moyens adéquats, intellectuels entre autres, pour cerner les problèmes de fond et tirer de l’analyse un discernement menant à des solutions à court ou à long terme.
Le positionnement s’est durci les quinze dernières années, dans le prolongement des déceptions de l’après-concile. Les renversements de situations, si rares soient-ils, signalent la capacité d’auto-redéfinition et de reprise dans des conditions apparemment défavorables. Par ailleurs, dans plus d’un ordre religieux, la floraison de la création individuelle et dans moult domaines paraît aller de pair avec le décadrage de l’action et de la vie en communauté. L’écart entre le consigné, le dire et le faire s’exprime dans la multiplication des interprétations du « charisme » et du sens des engagements. Ainsi, le fossé ne cesse de se creuser entre la définition identitaire que se donne l’ordre religieux, la conscience de ses membres d’y appartenir et ainsi de s’identifier psychosocialement, l’expression publique de la raison d’être collective et sa reconnaissance tant du dedans que du dehors. Entre autres choses, la concertation requiert la composition avec les distorsions et les différenciations : les directions prennent acte des déplacements dont elles tentent de contenir les effets à l’intérieur du consigné ou du souhaitable.
L’aménagement du quotidien dans les communautés en retrait
Aux côtés des congrégations tiraillées entre le retrait et la diversité des insertions, des communautés se sont alignées sur le repli décisif de la scène publique. L’alignement se trouve aussi bien dans les grandes maisons abritant peu de résidants non retraités au sein de congrégations encore socialement actives. De part et d’autre, le climat a toutes les chances de porter à la morosité, sinon à la démoralisation. L’intérêt de certains pour la musique, les arts, la lecture ou la discussion réfléchie ne réussit pas vraiment à infléchir la tendance. Nous avons affaire à une monasticisation du style de vie. En effet, un monde à part s’est construit tel un monastère, mais sans en adopter la règle et l’horaire quotidien. Si les échanges sont de courte durée, au réfectoire ou dans les salles de communauté, la prière ne réunit que rarement l’ensemble de la communauté.
Dans ces maisons, les problèmes d’intendance se placent au premier rang, et les observations ne manquent pas sur la qualité des services. Elles s’étendent de la nourriture aux soins de santé, de l’organisation matérielle générale aux besoins individuels. Les remarques s’avèrent le plus souvent sans lendemain. C’est que la distribution tentaculaire des tâches d’intendance et leur gestion bureaucratique déresponsabilisent, objectivement parlant, les préposés à telle ou telle fonction. Par ailleurs, ces préposés ont tendance à revendiquer la compétence exclusive du savoir réservé. Les ratés n’entachent pas la prétention. Si des critiques à-propos parviennent aux oreilles du conseil de direction, ce dernier se doit de tenir compte des susceptibilités et des chasses gardées. Encore plus, il arrive que des décideurs disposent de moyens pour quérir des services adéquats hors de la maison.
Que les dysfonctionnements perdurent, il ne reste le plus souvent que la résignation à l’inexorable. À l’occasion, l’exaspération s’exprime en cercle restreint ou publiquement, non sans la colère refoulée dans les mots et le ton. Dans la vie quotidienne, le refuge voisine avec l’évasion et ce selon les moyens disponibles, financiers notamment. Tous ne s’en sortent pas avec le même bonheur, d’autant que les affres de la maladie tenaillent un bon nombre. La capacité de rêver semble évanouie avec la condition de dépendance subie. Corrélativement, l’expression de la réflexion étayée sur l’observation et proposant des changements à caractère global se solde le plus souvent par une fin de non-recevoir. La moindre modification de l’horaire ou des usages journaliers provoque de vives réactions parce qu’affectant un style de vie hautement rationalisé et fortement individualisé.
La routine s’est installée à l’intérieur d’une forteresse coupée de son environnement. Pour des fins avant tout financières, ces maisons-forteresses, surtout dans les grandes villes, offrent le gîte à des organismes ou à des individus à la recherche d’un logement à la hauteur de leurs ressources financières. Les rapports avec ces personnes venant de l’extérieur et, plus d’une fois, actives au cœur de la cité, se limitent essentiellement à des services à la pièce et prodigués par un personnel étranger à la congrégation pour une part tout au moins. La capacité d’accueil personnalisé, et donc relativement gratuit dans son intention, et la qualité ou l’étendue des services varient selon les traditions congréganistes et non seulement les moyens disponibles ou le pays.
Si les échanges sont possibles entre les résidants-propriétaires et les résidants locataires, d’aucuns auront le loisir d’entendre des paroles de sagesse, la passion de la culture ou la conviction profonde du spirituel. Quant à la pénétration du système de vie et de sociabilité des résidants-propriétaires, elle exige de pouvoir s’approprier et décortiquer un code symbolique mêlant tradition particulière et coutumes singulières. L’exigence vaut pour le visiteur membre du même ordre religieux qui a toutes les chances d’éprouver le sentiment d’être étranger à ce monde et tout à la fois familier sous certains rapports. D’ailleurs, la communication avec les autres communautés, héritières de la même tradition, s’en tient le plus souvent à des relations fonctionnelles ou à des célébrations festives.
Les festivités donnent lieu à des sursauts de vie momentanés, mais rarement à l’exubérance des sentiments. Il en va de même pour les initiatives sortant de l’ordinaire et intéressant les corésidants. Les rassemblements hors de l’ordinaire de la vie relèvent du temps liturgique, du calendrier de la congrégation ou de coutumes culturelles locales ; ils représentent autant d’occasions de renouer symboliquement et rituellement avec le cycle cosmique de la vie. Les ruptures d’avec la routine linéaire se font relatives, même que plus d’un s’y refuse par l’absence. L’invocation du dérangement cache souvent l’incapacité physique ou psychologique d’affronter un public nombreux, soit-il celui de son propre groupement d’appartenance.
Avec le temps, les congréganistes retraités de la vie publique et réunis sous un même toit en sont venus à aménager les pièces de la maison et le déroulement du quotidien d’après des règles dictées par les nécessités de la vie collective, les réponses raisonnées à des besoins ponctuels, matériels ou relationnels, et les emprunts techniques de l’extérieur. Petit à petit s’est articulé un code de la vie quotidienne consigné à grands traits, capable donc de recouvrir la multiplicité des situations individuelles, mais tout en même temps d’une grande minutie dans les usages reçus. La connaissance pratiquée de ces usages dans un cadre officiel simplifié s’impose aux fins de l’intégration groupale. Quelque écart que ce soit est interprété dans la ligne de la marginalisation relationnelle.
L’option dans ce sens peut tout autant entraîner une grande liberté de mouvements, à la condition de négocier une sélection minimale des exercices communautaires qui soit recevable par la majorité. Sinon, les tensions risquent fort d’être vives, soient-elles fomentées sous cape, à l’insu de l’intéressé. La position sociale, intellectuelle ou ecclésiastique du religieux, qu’elle soit d’hier ou d’aujourd’hui, contribue à rendre acceptables les arrangements personnalisés. Le prestige attaché aux titres personnels ne s’avère pas facteur de classification sociale à l’égal des privilèges liés aux moyens financiers ou à l’affinité avec les orientations promues par les directions centrales et véhiculées par le supérieur local (s’il y a lieu). La conjugaison de l’affinité des autorités avec l’une des générations dans la congrégation entraîne des clivages qui marquent la vie dans son entier. Le sentiment de désappropriation de l’exclu provoque le désintéressement des problèmes communautaires et le repli empreint de révolte intime.
La fragilisation de l’identité et la régulation de son antidote
La fragilité physique de la communauté est rappelée périodiquement par les décès et les départs en clinique ou à l’infirmerie de la congrégation. Le groupe constitué ici et maintenant se perçoit menacé d’effacement à tout jamais, surtout si les arrivées ne viennent pas compenser les disparitions. De toute façon il s’impose de se liguer contre la fermeture de la maison, quitte à s’opposer avec force aux décisions des directions centrales. Sur ce point, le jeu d’influence se montre éventuellement plus efficace que les arguments d’ordre financier. Dans le cas du remembrement des provinces religieuses, l’absence de membres d’une ancienne division territoriale dans les organes de gestion centraux entraîne l’exclusion de l’esprit de cette division, la propension à en liquider les œuvres typiques et l’utilisation des forces vives aux fins des directions centrales. L’avenir apparaît bloqué pour les communautés locales soumises territorialement à des conditions d’effacement fixées par des instances perçues comme étrangères.
Qui plus est, la concentration des pouvoirs de décision, auparavant régionaux, met en place les éléments favorables à un rapport dans les termes du centre et de la périphérie. Si vous ajoutez la tendance technocratique du gouvernement à décider en fonction des critères autocentrés, la gestion se tourne décisivement vers le contrôle exercé indépendamment des compétences disponibles et préoccupé de vérification des effets immédiats des décisions imposées d’office. La façon de faire, même camouflée par la générosité du discours officiel, pèse sur le « moral des troupes ». En revanche, si les particularités régionales sont prises en compte par les directions centrales, les variations peuvent bien s’accentuer, à la distinction près qu’elles nourrissent un élan inscrit dans une tradition reconnue dans son environnement, par les directions subordonnées et les communautés. Parfois même, la tradition locale soutient l’option pour l’autonomie territoriale et le refus de la centralisation des pouvoirs. La vitalité de ces détachements dépend des garanties de l’identité revendiquée dans ses particularités.
Autrement, l’aménagement existentiel des communautés ou la politique des directions centrales poursuivent de ralentir la déperdition et de maîtriser ses effets négatifs, à défaut de pouvoir enrayer le mouvement. Si la visée se révèle mal assurée, le discours officiel a tendance à taire l’existence des difficultés concrètes. Dans les cas extrêmes, comme celui où une minorité entend exercer un contrôle décisif de l’ensemble, les prises de position se présentent avec fermeté, sans ouverture à la discussion. La systématisation d’arguments rationnellement coordonnés accorde peu ou prou de place à l’analyse circonstanciée. Cette dernière est le plus souvent absente, de même que l’exposition des critères ayant servi à la fabrication de la politique à adopter. La méfiance à l’égard de la sociologie non directement accordée aux vues administratives va de pair avec l’assomption des impératifs canoniques, considérés sans nuances juridiques, ou des acquis d’une psychologie normative à prétention scientifique. Le complément échoit à une théologie systématique, dogmatique et disciplinaire. Le rapport aux textes canoniques, congréganistes ou magistériels n’échappe point à la conformité de type fondamentaliste d’application directe et faisant fi des médiations historiques des personnes et des groupes.
Que ce soit au niveau de la communauté locale, de la direction régionale ou des organes de gouvernement centraux, l’adoption de la référence institutionnelle normative rejette quelque relativisation ou compromis. Cette référence fait partie, le cas échéant, de la formation au ministère presbytéral ou à la vie religieuse. Elle se fait volontiers diffuse, à la manière de l’air du temps, comme disait Gabriel Marcel de la pensée sartrienne. L’intention de rectification des comportements et de la pensée s’appuie symboliquement sur un texte d’une portée non strictement humaine de par la qualité de son auteur. La survalorisation sert à conférer un caractère indéfectible à ce qui se révèle construit et circonstancié à l’analyste extérieur. La réception recherchée s’apparente à celle du « c’est ce qui doit être », variante du « c’est comme ça ». Si distorsion il y a, les causes sont ramenées strictement du côté du récepteur. Des cours de sociologie dans des facultés de théologie ou les instituts de pastorale se focalisent sur cet objet : il s’agit d’exposer empiriquement les facteurs de la non-réception de la révélation chrétienne et des errements qui s’ensuivent, avant de fournir des éléments de rectification d’ordre psycho-social.
Dans l’ordre religieux, la rectification de l’identité recourt volontiers à des moyens hors de ses frontières. Ainsi, la conformité textuelle se conjugue avec la systématisation serrée des expositions et des techniques faisant appel à l’affectivité ou à la culpabilisation des consciences. La sacralisation des modèles traditionnels de vie religieuse peut servir de justification existentielle à la routine quotidienne dans les maisons des retraités. La prépondérance quantitative de ces dernières ne va pas sans quelque effet sur les communautés dont les membres sont actifs à l’extérieur. Ces communautés ont en commun avec les grandes maisons l’horaire simplifié des moments de rencontre et l’individualisation des activités. Quand aux usages non consignés, ils suivent le mouvement de composition des groupes, selon que cette composition est stable ou qu’elle se modifie fréquemment. D’une manière ou d’une autre, nombre de communautés entretiennent peu la conscience explicite de partager un même genre de vie, qui soit accordé aux intentions héritées de la tradition. Le plus souvent les objectifs centrés sur la vie locale l’emportent sur la réalisation d’une mission commune qui soit inscrite dans une tradition particulière.
La menace de disparition par déficit des membres peut provoquer des réactions dans le sens de garantir l’avenir par des moyens autres que le recrutement de sujets, la création d’œuvres ou l’intensité de l’engagement spirituel. Ainsi, des laïcs s’associent à des œuvres ou à des communautés, en vue d’en assurer la relève ou d’en étendre l’esprit, si ce n’est essentiellement à des fins de convivialité ou d’épanouissement personnel. Quant à l’activité, outre le bénévolat, elle s’oriente vers ce qui a fait ses preuves et présente, à première vue du moins, peu d’aléas ou d’inconnues. Les résultats véritables et à court terme intéressent au premier chef : l’investissement doit rapporter. Dans le même sens, les constructions ou réfections immobilières représentent des ressources beaucoup plus sûres que la formation intellectuelle et culturelle des recrues ou des membres moins jeunes. La formation fondamentale ou continue est réduite au minimum censément nécessaire, quitte à ce que l’individu s’acquitte des compléments par lui-même. Quant aux études supérieures, elles se font rares, même quand elles paraissent s’imposer. L’intérêt pour les pierres l’emporte largement. On utilise des matériaux non périssables et des aménagements immobiliers à la fine pointe des innovations cultivent aussi l’assurance de se continuer dans le matériel indestructible. Les bâtiments de cette espèce constitueront autant de traces de la congrégation par-delà la mort de ses membres. En plus de l’aspect fonctionnel, la pierre comporte des incidences symboliques sur l’identité collective et individuelle. L’investissement dans le matériel et ce qui a fait ses preuves aura rassuré quant aux garanties de continuité historique [7].
L’écart et la conformité dans la gestion de la décroissance
La gestion de la décroissance donne lieu à des positions extrêmes ; ces positions s’avèrent latentes ou localisées dans la plupart des ordres religieux. L’intransigeance de la rectification entière y côtoie la relativisation typique de l’évanescence. Une autre voie de réponse à la question de la survie tente d’assurer l’affirmation d’une identité particularisée tout en sachant composer avec les contraintes du quotidien. La gestion de l’intention et sa réception se posent au confluent de la continuité et de la discontinuité, de l’écart et de la conformité au défini institutionnel. Ce dernier aspect, à peine évoqué ci-dessus, mérite de s’y arrêter d’un point de vue comparatif et théorique.
Dans un ordre religieux, considéré à la fois dans ses diverses composantes et dans ses membres pris individuellement, les écrits officiels ou les échanges du quotidien s’en tiennent souvent à des évocations ou à des sous-entendus pour ce qui est de sa raison d’être. Dans une communauté à forte cohésion, la socialisation commune dispense de l’explicitation élaborée. Les divergences d’interprétation et de positionnement n’ont pas moins cours. Les inévitables divergences en viennent à s’atténuer, parfois au prix de la négation de la singularité individuelle. Le conflit ouvert mène à l’exclusion de la dissidence. La cohésion ferme du groupement est en cause, et la référence à une cohérence intériorisée sert à articuler la définition et la réalisation d’un projet qui soit en mesure de nourrir l’adhésion des individualités. La contrainte de la liberté est acceptée largement et à un haut degré, au nom d’un bien supérieur pour le groupe et la personne dans ce monde et, à défaut, dans l’au-delà.
Un ensemble de conditions d’existence, de visions de choses, de discours, d’activités et de rapports sociaux entretiennent la vitalité et la force historique de l’identité congréganiste dans l’Église et la société. C’est la « base », « l’assiette » sociale [8] de la raison d’être d’un groupement et des individus qui le composent. Que cette base se lézarde ou simplement s’effiloche, le discours tend à se développer dans les méandres des possibles, à la manière d’une compensation de l’incapacité de prise sur la réalité. Le risque de déconnexion est de plus en plus élevé avec la prise de conscience de ne plus constituer une force historique. L’éclatement des positions s’est affirmé au point que l’adhésion commune se limite à des bribes de la tradition rappelées périodiquement. Qu’il en soit ainsi, le terrain est propice pour que la direction devienne une administration d’abord et avant tout fonctionnelle ou pour que des intérêts particularistes prennent les rênes du pouvoir.
Il arrive qu’une portion des membres tente d’imposer sa vision d’avenir à l’ensemble. L’imposition se traduit par la formulation d’une définition sans partage et la gestion de son aménagement concret. L’intention s’accompagne du façonnement d’une « assiette sociale » qui soit accordée à la volonté de faire triompher une vision des choses même envers et contre tout. Qu’il en soit ainsi, les échanges d’ordre administratif ou significatif se limitent grandement à des questions de forme et non de fond. Les documents soumis aux organes de consultation programment la pensée dans une direction prédéfinie. La programmation bénéficie du soutien d’intervenants sélectionnés. Elle se substitue à l’analyse des conditions globales et concrètes de l’existence et de l’action, individuelle ou collective. Les résistants de fait ou potentiels sont repoussés dans les franges de l’organisation et évacués des organes de décision. En agissant de la sorte, la direction administrative s’assure d’éviter les incidences négatives sur la stratégie d’imposition d’une définition de la réalité à l’ensemble du groupement.
Entre autres positionnements devant les stratégies d’un pouvoir tendanciellement inconditionnel, l’auto-exclusion ne manque pas par prise de conscience du coût élevé de la divergence affirmée et du déficit d’appui explicite auprès des confrères. Ce déficit serait la conséquence de la dispersion des membres et de l’individuation des quêtes de sens. Le double fait n’a-t-il pas contribué à la prise de pouvoir d’une position minoritaire ? L’avancement de cette dernière prend le canal de la gestion organisationnelle du groupement, qui, elle, équivaut à la formation d’objectifs sous la forme de priorités mesurables et pour un court laps de temps. Ce faisant, l’administration fixe les frontières du gérable, sans devoir rendre compte des critères de fixation. L’autolégitimation de la prise de décision en tait la justification à l’intention des concernés et les récalcitrants sont objectivement exclus. La prétention mène à la manipulation des règlements administratifs. L’organisation aux frontières autocentrées s’est grandement substituée à l’association dont la dynamique repose sur ses membres.
L’option organisationnelle dont il s’agit découle de la perte du caractère institutionnel du groupement. En effet, une institution ne se réduit pas à l’organisation : elle met en avant un sens qui recouvre la pluralité des engagements de ses membres et, ainsi, offre une prétention d’universalité fondamentale dans la confrontation, en tant qu’instance subordonnée, et à l’Église et à la société, toutes deux saisies dans leur mouvement historique et leurs spécificités. L’opération de type institutionnel va de pair avec la relecture des origines et de la tradition en rapport avec la scrutation des continuités et des discontinuités du projet particulier, celui-ci pris dans ses dimensions symboliques, ecclésiales et sociétales.
L’entreprise ne va pas de soi : elle requiert la discussion ouverte et sous une direction reconnue par les subordonnés comme légitime parce qu’élue donc en accord avec les règlements et qu’orientée vers la pratique réfléchie du projet commun hérité de la tradition et puisant son inspiration dans les origines. Ce dernier aspect détourne du strictement organisationnel et appelle ce qui est le propre de l’institution : l’assomption de la diversité et d’une pertinence socialement reçue. L’attention, sinon la focalisation sur la légalité du choix conforte l’autodéfinition des frontières de l’administrativement acceptable, et du coup risque de cultiver la fixité. Celle-ci peut bien se camoufler sous le couvert d’embellies récurrentes : l’impasse risque fort d’être au rendez-vous, par suite de l’incapacité de regarder hors des frontières fixées et de faire une lecture de la réalité qui soit axée sur une nouvelle vision du choix et une inspiration profonde.
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Le propos d’ordre théorique sur l’écart et la conformité, l’intransigeance ou le compromis avance que la décroissance de l’ordre religieux s’inscrit dans un processus ouvert à l’inédit par-delà les fermetures de type organisationnel ou totalisant. La perspective sociologique démasque ces fermetures et en analyse les détournements à des fins exclusivistes. L’insistance sur le dévoilement des possibles perversions reliées au vieillissement peut surprendre. Elle peut aussi bien éveiller à la prise de conscience de la liberté de l’être humain et de la confiance en la grâce divine. L’une et l’autre constituent de vieilles questions intéressant la philosophie et la théologie bien avant la sociologie moderne. Cette dernière est en mesure de mettre au clair les conditions et les contraintes à travers lesquelles la liberté et la grâce tracent leur chemin dans l’histoire des hommes. L’objectif est modeste mais intellectuellement exigeant, notamment quand est abordée la vie et survie des ordres religieux dans le monde catholique.
Né en 1943, reçoit son B.A. (1965) au séminaire de Joliette (Canada) puis sa L.Th à l’Université de Montréal (1970). Après avoir enseigné la théologie en Haïti, c’est à Paris, à l’Institut Catholique, qu’il obtient son Doctorat en Théologie (1987). Concurremment, il obtient son Doctorat en Sciences Sociales des Religions à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales de Paris. Sautant de Paris à Montréal et participant à de nombreuses sociétés savantes, le Père Turcotte a aiguisé son regard de sociologue et a publié de nombreux articles spécialisés ainsi que plusieurs livres sur divers thèmes : les ordres religieux catholiques et les sectes, l’éducation et la religion, Bible et sociologie ainsi que sur la méthode et la théorie sociologiques.
[1] Une première version constitue l’essentiel de mon article « Rêves et impasses dans les ordres religieux en déclin » dans Claretianum 40 (2000) 75-104. Le collectif a pour titre Sociologia e Storia della Vita Consecrata ; les articles sont en français, en anglais, en espagnol et en italien.
[2] Pour un développement de la méthode sociologique en regard du phénomène religieux et spécialement des ordres religieux, voir mon ouvrage Intransigeance ou compromis. Sociologie et histoire du catholicisme actuel, Montréal/Paris, Fides/Cerf, 1994, les ch. XV-XVII. La troisième partie de l’ouvrage est consacrée à des études socio-historiques et théoriques des ordres religieux. Aussi, de Jean Séguy, Conflit et utopie, ou réformer l’Église, Paris, Cerf, 1999, surtout les ch. II-VII.
[3] Les mots « ordre » et « congrégation » sont employés indifféremment ; ils recouvrent différentes acceptions canoniques de la vie religieuse consacrée.
[4] Helen Rose Fuchs Ebaugh, Women in the Vanishing Cloister. Organizational Decline in Catholic Religious Orders in the United States, New Brunswick (New Jersey), Rutgers University Press, 1993, p. 1-3.
[5] Kristoff Talin, « Les vocations religieuses dans l’espace francophone. Éléments pour une comparaison entre la Belgique, le Québec et la France », communication au congrès de l’Acfas, à Ottawa, en mai 1999 ; Rose Helen Ebaugh, Jon Lorence et Janet Saltzman Cgafetz, « The Growth and Decline of the Population of Catholic Nuns Cross-Nationally, 1960-1990 : A case of Secularization as Social Structural Change », Journal for the Scientific Study of Religion 35-2 (1996) 171-183.
[6] Les Bénédictins sont passés de 11 438 en 1970 à 9 522 en 1980 et à 5 377 en 1991. Pour la période 1965-1980, la baisse des effectifs capucins fait les 24,5 %, celle des franciscains, les 21,1 %. La remontée est observable pour ces ordres monastiques ou conventuels.
[7] La description qui précède s’appuie sur l’observation participante, des entretiens et des rapports de discussion. La mise en forme est redevable aux écrits empiriques et théoriques cités supra, note 2, de même qu’à la théorisation de la religion de Peter Berger, The Sacred Canopy. Elements of a Sociological Theory of Religion, New York, Doubleday, 1967 (trad. française de Joseph Feisthauer : La religion dans la conscience moderne. Essai d’analyse culturelle, Paris, Centurion, 1972) surtout le ch. II.
[8] L’expression est de Peter Berger et Thomas Luckmann dans The Social Construction of Reality : A Treatise in the Sociology of Knowledge, New York, Anchor Books, 1966. La traduction française a connu plusieurs impressions, qui, les unes à la suite des autres, reprennent les mêmes erreurs de traduction. La lecture du texte original, en anglais ou en allemand, est conseillée.