Un périodique unique en langue française qui éclaire et accompagne des engagements toujours plus évangéliques dans toutes les formes de la vie consacrée.

Le don de la rédemption

Godfried Danneels

N°1984-5 Septembre 1984

| P. 267-283 |

Nous sommes heureux d’accueillir dans notre revue le commentaire par le Cardinal Danneels de la récente exhortation Redemptionis donum du Pape Jean-Paul II. Ces pages fortes et belles, tout imprégnées de l’Écriture et d’images bibliques, nous introduisent à la profondeur du texte pontifical et de notre vocation.

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Commentaire de l’exhortation apostolique du Pape Jean-Paul II aux religieux et aux religieuses sur leur consécration, à la lumière du mystère de la rédemption

En cette année du jubilé de la rédemption, l’Église entre dans la contemplation du mystère de Dieu, de sa miséricorde et de sa tendresse. Avec tous les chrétiens, les religieux et les religieuses sont invités à méditer plus en profondeur le mystère de la grande œuvre de Dieu dans leur propre vie et dans le monde, à se laisser purifier par le sang rédempteur de Jésus. Il s’agit, en d’autres termes, de méditer notre vocation chrétienne à la lumière de la croix du Christ, afin de nous enraciner plus profondément dans son cœur. Presque tous, en effet, en vertu de notre consécration et par la pratique des conseils évangéliques, nous pouvons comprendre un peu mieux que d’autres, grâce à Dieu – et non pas grâce à nos mérites –, la profondeur même du mystère de la rédemption : si nous suivons le Christ sur le chemin étroit dont parle l’Évangile, nous devons nous rendre compte aussi – mieux que d’autres – que « près de lui abonde le rachat » (Ps 130,7).

On s’imagine parfois qu’ayant choisi la voie de la perfection, le religieux et la religieuse sont moins sensibles aux mystères du péché et de la rédemption. Je crois, bien au contraire, que la fidélité à leur vocation leur permet de prendre une conscience particulièrement vive de l’immensité de l’amour de Dieu, de sa largeur, de sa hauteur et de sa profondeur, comme le dit saint Paul. Accueillons donc la parole d’amour que Jésus nous adresse, là où nous sommes, et laissons-la toucher notre cœur pour raviver en nous ce que nous avons entendu depuis des années : « viens, suis-moi ! »

La vocation religieuse

Commençons par nous imprégner de cette réalité mystérieuse que nous avons reçue en toute gratuité et qu’on appelle « la vocation ». Le Saint-Père nous invite à nous souvenir de l’histoire de l’homme riche : « Posant son regard sur lui, Jésus le prit en affection » (Mc 10,21), et il lui dit : « si tu veux être parfait, va et vends ce que tu possèdes et donne-le aux pauvres, puis VIENS et SUIS-MOI ! » (Mt 19,21).

Même si nous savons que l’homme riche n’a pu répondre positivement à cet appel, ce texte nous dit la structure intime de notre vocation, à la base de laquelle se trouve le regard d’amour du Christ, qui respecte pleinement la liberté de l’homme. Jésus ne touche pas l’homme riche, mais « il le regarde », ce qui est bien différent : le regard est le sens par lequel nous sommes le plus proche de l’autre (il se trouve sur notre rétine même), mais sans le toucher. Ainsi, le regard de Jésus dit bien la manière dont il nous appelle : nous sommes dans son œil, mais il respecte notre liberté sans nous contraindre.

Nous laissant libres, le regard de Jésus n’est pas pour autant froid ou distant. « Il le prit en affection » : le regard que le Christ pose sur nous est un regard d’amour, porteur d’une affection particulière pour chaque personne, et donc unique. Inspiré par le même amour qui vient de Dieu, le regard que Jésus offre à chacun est personnel, différent.

À travers le regard affectueux de Jésus à notre égard, nous pouvons percevoir l’amour et le regard éternels du Père, « qui a tant aimé le monde, qu’il lui a donné son Fils unique ». La manière dont Jésus nous regarde prolonge le regard que le Père éternel pose sur son Fils et qui lui fait dire : « Toi, tu es mon bien-aimé, mon unique ». C’est donc le même regard qui, venant du Père à travers son Fils, nous atteint chacun jusqu’au cœur.

Puisque nous sommes de pauvres pécheurs, ce regard amoureux sera aussi rédempteur, ainsi que nous pouvons certainement le découvrir si nous approfondissons notre vocation religieuse. Plus que d’autres, Dieu nous fait entrer dans le mystère de sa passion pour l’homme, malgré son péché, et le regard affectueux qu’il pose sur chacun de nous est rédempteur, car il apporte le pardon.

À travers nous, Dieu regarde le monde entier. Du Père à son Fils, puis aux consacrés et au monde, ce regard suit ainsi une ligne continue. Les religieux et les religieuses vivent, en effet, au milieu de l’Église et du monde, dont ils forment en quelque sorte les poumons. Si les prêtres sont le « cœur » du monde et de l’Église, auxquels ils doivent donner leur tonus, la vocation religieuse est là pour donner l’oxygène vital, pour purifier sans cesse le sang qui circule dans tout le corps. Ainsi, c’est un sang purifié, oxygéné, qui sera propulsé par le cœur ; dans l’Église, cette dernière fonction est assurée par les ministres ordonnés.

« Ce n’est par rien de corruptible, argent ou or, que vous avez été affranchis..., mais par un sang précieux, comme d’un agneau sans défaut et sans tache, celui du Christ », écrit saint Pierre (1 P 1,18), et saint Paul déclare : « vous avez été achetés fort cher » (1 Co 6,20). Ces phrases s’adressent à tout chrétien, mais plus particulièrement aux religieuses et aux religieux. L’amour de Jésus qui se porte sur le consacré – et, à travers lui, sur l’Église et le monde – revêt un caractère « nuptial » : il est marqué par l’unicité et l’indissolubilité. Comme l’homme choisit sa femme et l’épouse son époux, Dieu offre à chacun de nous un amour unique, exclusif, irremplaçable, et c’est pourquoi on l’appelle « amour nuptial ». Même en faisant abstraction de la « mystique nuptiale » – qui a peut-être été quelque fois exagérée –, il reste vrai que cet amour a des caractéristiques nuptiales : exclusivité, unicité, durée éternelle de l’amour, qui n’est rompu que par la mort. C’est lui, le Seigneur, qui nous aime d’un amour d’élection ; celui-ci ne rend pas l’épouse orgueilleuse, il n’en fait pas une personne supérieure aux autres, mais il la rend heureuse.

Dans cet amour profond, dans ce regard affectueux de Jésus et du Père pour chacun de nous, Dieu respecte notre liberté, et pourtant il nous dit : « Vous ne vous appartenez plus, vous m’appartenez ». C’est là une conséquence de l’amour nuptial : celui qui élit son épouse peut lui dire : « Toi, tu m’appartiens », comme elle dira de lui : « Toi, tu m’appartiens ». L’appel de Dieu nous laisse libres, mais en même temps il est bien plus fort qu’un appel forcé, car il lie librement. Le lien le plus fort entre Dieu et nous n’est pas celui qui serait imposé par la force, mais celui de notre « oui » libre en réponse à son appel.

Notre vocation est un appel à la perfection : « Si tu veux être parfait... », disait Jésus à l’homme riche. Même dans le paganisme, tout homme sérieux et noble recherche la perfection ; c’est pour les plus grands d’entre eux le contenu même de leur programme de vie : perfectionner l’homme, se perfectionner. Ce qui nous est propre, à cet égard, c’est que la perfection à laquelle nous sommes appelés est celle même du Père : « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait », disait Jésus (Mt 5, 48). Dans son exigence radicale, l’appel à la perfection du religieux et de la religieuse rejoint le projet créateur de Dieu, qui voulait former l’homme « à son image et à sa ressemblance » (Gn 1,26).

Ainsi, dire « oui » à Dieu dans la vie religieuse ne se réduit pas à accepter son amour électif, surabondant, rédempteur, mais répond aussi à la grande vocation de l’humanité appelée à sa perfection d’image ressemblante de Dieu. La vie religieuse résume en quelque sorte et fait porter à son sommet l’appel que Dieu adresse à toutes ses créatures animées et inanimées, invitées à devenir « telles qu’il les a voulues en les créant ». L’humanité et le cosmos tout entier disent à Dieu : « Fais de nous ce pour quoi tu nous as créés ». Les éléments naturels et les animaux réalisent automatiquement cette vocation ; seul, l’homme, dans sa liberté, peut dire « non ». C’est pourquoi les choses et les animaux sont souvent plus obéissants que l’homme : « L’âne et le bœuf reconnaissent la main de leur Seigneur, mais toi, Israël, tu ne m’as pas reconnu » (Is 1,3). Les hommes sont moins obéissants mais, s’ils le sont, c’est « à la joie de Dieu », parce qu’ils l’ont choisi librement. Nous sommes ainsi appelés à une perfection qui reproduit en miniature – donc de manière plus colorée, plus vive – ce que le monde entier est à la face de Dieu.

La perfection à laquelle Dieu nous appelle comporte deux volets : elle est renoncement à un programme de vie qui pourrait être caractérisé par le mot « avoir », pour choisir un programme caractérisé par le mot « être ». Religieuses et religieux choisissent la primauté de l’« être » sur l’« avoir », car « être » est toujours beaucoup plus fort qu’« avoir ». C’est là un des thèmes constants des discours et des écrits du Pape, qui précise : « Une telle compréhension des paroles du Christ constitue comme une toile de fond plus large pour l’idéal de la pauvreté évangélique (...). En lisant les paroles du Christ à la lumière du principe de la supériorité de l’« être » sur l’« avoir », surtout si ce dernier est pris dans son sens matérialiste et utilitaire, nous atteignons presque les fondements anthropologiques de la vocation dans l’Évangile ». Cela signifie que, dans notre civilisation occidentale marquée par l’hédonisme et une consommation de plus en plus effrénée, le monde découvre son propre vide : saturé d’« avoir », l’homme moderne a mutilé son « être ». Ainsi, les personnes qui ont pris comme ligne de conduite le renoncement à l’« avoir » et la primauté de l’« être » forment les avant-postes de l’humanité. Le livre des Nombres raconte qu’arrivé avec le peuple d’Israël aux abords de la Terre Promise, Moïse y envoya des explorateurs. Ceux-ci revinrent avec un double message : le peuple ne pourra entrer dans le pays qu’avec l’aide de Dieu, car il est habité par des hommes redoutables ; par ailleurs cette terre se caractérise par l’abondance du lait, du miel et des raisins. Aujourd’hui, religieuses et religieux sont les nouveaux explorateurs qui précèdent le monde dans la Terre Promise et y découvrent que la véritable grandeur de l’homme ne réside pas dans ses richesses, mais appartient à l’ordre de l’« être ».

Ainsi l’appel que vous accueillez en entrant dans la vie religieuse apporte à l’humanité un renouveau fondamental et indispensable. Les personnes qui – dans la mesure du possible, de notre liberté et de la grâce de Dieu – ont renoncé aux sécurités matérielles « du pays d’Égypte » pour vivre davantage de l’« être » renouvellent l’humanité jusqu’en ses racines. De notre humanité ne survivront ni les richesses matérielles, ni même les richesses culturelles, mais les « êtres ». En d’autres termes, les hommes qui, dès aujourd’hui, choisissent de privilégier l’« être » plutôt que l’« avoir » vivent déjà la fin des temps : c’est à eux que Jésus dit qu’« ils auront un trésor dans les cieux ».

La consécration religieuse

L’idée de « consécration » religieuse n’est pas à la mode et, surtout, elle est souvent mal comprise. La « consécration » n’est pas, comme certains l’imaginent, un texte à lire, mais plutôt un geste, une attitude du cœur. Surtout, il ne s’agit pas de « consacrer quelque chose à Dieu », de lui réserver un objet religieux, mais de se consacrer soi-même. Le religieux ou la religieuse ne consacre à Dieu ni son argent ni même ses richesses spirituelles et intellectuelles (dans l’ordre de l’« avoir »), mais se consacre lui-même (dans l’ordre de l’« être »).

« La profession religieuse ‘exprime avec plus de plénitude’ la consécration du baptême », déclare le Pape. Une telle phrase dit de la meilleure façon en quoi réside la vie religieuses. Celle-ci n’ajoute rien à la vocation de baptisé, mais elle l’approfondit jusqu’à la plénitude. C’est pourquoi la vie religieuse n’a pas de sacrement propre, comme l’ordination du prêtre ou le mariage : la consécration et la profession religieuses ne sont rien d’autre que le sacrement du baptême poussé jusqu’à la plénitude. C’est dans cette ligne d’approfondissement du baptême (et de la confirmation, qui le prolonge) que la vie religieuse doit être comprise.

L’année liturgique comporte deux fêtes de la vie religieuse, qui en soulignant des aspects complémentaires. Il y a tout d’abord la fête du baptême du Christ : plongé dans les eaux du Jourdain, Jésus se range parmi les pécheurs ; le Ciel s’ouvre alors, et la voix de Dieu retentit : « Voici mon Fils, mon unique, mon bienaimé ; écoutez-le ». En ceci consiste la vie religieuse : se trouver comme Jésus à la table des pécheurs et, en même temps, voir s’ouvrir le ciel et s’entendre dire : « Toi, tu es mon fils bien-aimé ou ma fille bien-aimée ; il faut que l’on t’écoute ». Le baptême de Jésus est en quelque sorte l’icône de la vie religieuse.

L’autre fête de la vie religieuse est celle du 25 mars, où l’on célèbre le « oui » de Marie et, en même temps, le « oui » de Jésus. En effet, avant que Marie ne dise « oui » à l’ange, Jésus a déjà dit « oui » à son Père : « Quand je suis entré dans le monde, ‘je suis venu pour faire ta volonté’ » (He 10,9). Le « oui » de la fête de l’Annonciation est donc d’abord celui du Fils à son Père, et la pleine disponibilité de Marie en est l’écho. Au don gratuit de Dieu reconnu par la fête du baptême de Jésus répond le « oui » de la disponibilité, célébré le 25 mars.

Par le baptême, tout chrétien se consacre à Dieu : il se dirige vers lui pour lui appartenir. L’enracinement de cette consécration est cependant plus profond dans la profession religieuse que dans la vie chrétienne « ordinaire ». Le Pape précise que cette profession religieuse « crée, en Jésus-Christ, un lien nouveau entre l’homme et le Dieu un en trois personnes ». Selon l’heureuse expression du décret Perfectae caritatis, la vie religieuse « s’enracine intimement dans la consécration du baptême et l’exprime avec plus de plénitude », ce qui se traduit en particulier dans les conseils évangéliques et la vie communautaire. Pour mettre en relief la nature de la profession religieuse, il faut donc reprendre les grands textes bibliques sur le baptême, et notamment celui de Rm 6,3-4 :

Ignorez-vous donc que, baptisés dans le Christ, c’est dans sa mort que nous avons tous été baptisés ? Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême dans la mort, afin que, comme le Christ nous vivions, nous aussi, dans une vie nouvelle.

Cette consécration fondamentale du baptême revêt donc deux aspects : mourir au péché (et d’une mort bien réelle, jusqu’à être enseveli) pour vivre déjà la vie nouvelle du Ressuscité. Comme le baptême, la consécration religieuse comporte une part de renoncement. C’est pourquoi, au cours de la nuit pascale, lorsque le peuple de Dieu renouvelle son engagement baptismal et affirme son choix de renoncer à Satan et à ses œuvres de mort, nous sommes appelés à dire « Je renonce » un peu plus fort que les autres. Et, d’autre part, lorsque le prêtre demande « Croyez-vous en Dieu le Père, en son Fils Jésus-Christ, en l’Esprit Saint et en l’Église ? », il nous faut répondre à haute voix, comme pour marquer une plénitude. Les religieux ne sont pas séparés du Peuple de Dieu mais, au cœur de ce peuple, ils disent avec une force particulière ce qui fait la foi de tous. Et ceci ne tient pas à une sainteté plus grande, mais à la grâce de Dieu.

Pour dire en quoi consiste la consécration religieuse, le Pape prend à témoin plusieurs textes bibliques.

  • Jésus dit à son Père : « Tu m’as façonné un corps... Voici, je viens pour faire, ô Dieu, ta volonté » (He 10,5.7). Cette parole, déjà citée plus haut, dit que « se consacrer » à Dieu équivaut à se livrer entièrement – corps et âme mais aussi cœur, intelligence et volonté – pour lui dire : « Prends-moi ».
  • Dans le livre d’Isaïe, Dieu dit au peuple : « Je t’ai racheté, je t’ai appelé par ton nom : tu es à moi » (43,10). Ces paroles valent pour tout chrétien, mais plus encore pour chaque religieuse, chaque religieux.
  • En Rm 12,1, saint Paul dit à ses lecteurs : « Je vous exhorte... à offrir vos personnes en hostie vivante, sainte, agréable à Dieu ». Il nous invite ainsi à nous offrir nous-mêmes, avec toute notre vie. Il nous faut redécouvrir les riches harmoniques des mots « consécration », « offrande de soi », « sacrifice ». Ce dernier terme inclut l’épreuve d’une souffrance : l’offrande de nous-mêmes nous arrache à certaines choses, se heurte à nos réticences et nous fait souffrir. C’est notre péché qui fait de notre offrande un sacrifice pénible, alors que l’offrande que la Vierge fait d’elle-même est un pur « oui » joyeux. Malgré leur air vieillot, les idées d’offrande de soi et de sacrifice sont fondamentales dans le christianisme. Elles correspondent même au « vœu » le plus fondamental (parce qu’il va plus loin que les autres), celui de l’obéissance, par lequel nous disons : « Je t’appartiens à toi, Dieu, ainsi qu’à ceux et celles que tu as placés pour me conduire à toi ».
  • « J’ai dit au Seigneur : ‘Tu es mon Dieu ! Je n’ai pas d’autre bonheur que toi’... Seigneur, mon partage et ma coupe : de toi dépend mon sort » (Ps 16,2.5). Ce psaume était chanté autrefois lors de la tonsure préparatoire aux ordinations. C’est, par excellence, le chant du psalmiste qui se consacre à Dieu.

La consécration religieuse peut encore être exprimée avec le vocabulaire du mariage et de l’amour nuptial. Le pape déclare, en effet : « Que la conscience d’appartenir à Dieu lui-même en Jésus-Christ, rédempteur du monde et époux de l’Église, soit comme un sceau qui marque du signe de l’épouse biblique vos cœurs, toutes vos pensées, vos paroles et vos actions ». Peut-être avez-vous peur de vous considérer comme « l’épouse du Christ » ; ajoutez alors un petit adjectif et dites : « Je suis l’épouse biblique du Christ ». Relisez les textes bibliques où le peuple est présenté comme l’épouse de Dieu. D’Osée à Jérémie, c’est en termes de relation nuptiale que les prophètes disent le lien qui unit Israël à son Dieu, et leur langage n’a rien de romantique : le peuple, pourtant choisi comme épouse, ne cesse d’être infidèle à son Dieu. On se trouve ici au cœur de la pensée biblique, qui parle sans cesse de l’alliance : comment mieux dire l’amour de Dieu pour son peuple, du Christ pour son Église, de Jésus pour chacune des âmes consacrées, pour tout homme et pour tout pécheur, qu’en utilisant l’image de l’amour nuptial ? Elle reste une image, mais c’est sans doute la moins imparfaite, celle qui nous permet d’exprimer le moins mal le mystère de notre relation à Dieu.

Les conseils évangéliques en général

« Dans l’Évangile, dit le Pape, il y a beaucoup de recommandations qui dépassent le niveau du commandement, indiquant non seulement ce qui est ‘nécessaire’, mais ce qui est ‘meilleur’. Ainsi, par exemple, l’exhortation à ne pas juger, à prêter ‘sans rien attendre en retour’, à satisfaire toutes les demandes et les désirs du prochain... ». Ces conseils, qui sont de l’ordre du « meilleur » et dépassent celui du « nécessaire », forment pratiquement tout le sermon sur la montagne de Mt 5-7.

Au cours de l’histoire de l’Église et même dans d’autres cultures ou d’autres religions, la profession de ces « conseils évangéliques » s’est concentrée sur trois points classiques : la chasteté, la pauvreté et l’obéissance. Les conseils de Jésus ne se limitent pas à ces trois point, mais ceux-ci en forment les éléments clés. Même en dehors du christianisme, la pauvreté, la chasteté et l’obéissance sont les caractéristiques d’un projet de vie religieuse radicale.

L’« universalité » des conseils évangéliques peut s’expliquer. L’homme peut, en effet, être comparé à un arbre possédant trois racines : le désir de posséder des richesses, la sexualité et le désir d’épanouissement personnel dans l’autonomie. Dès la première page de la Bible, on lit que Dieu bénit ces trois réalités : « Dieu vit que cela était bon ». Pour le peuple juif, il va de soi que les richesses, la sexualité et l’épanouissement personnel sont des choses bonnes, parce que créées par Dieu. Malheureusement notre arbre, qui a besoin de ces réalités pour vivre, ressemble à l’arbre de Jonas, rongé par un ver : le désir de l’homme méconnaît sa propre limite et se fait démesuré. Ainsi, on ne veut pas posséder seulement quelque chose, mais tout et immédiatement, et il en va de même pour la sexualité et l’épanouissement de soi.

Une telle démesure – qu’on pourrait appeler péché originel – conduit l’arbre à la mort : celui qui refuse toute limite à son désir ne vit pas, mais meurt, comme l’homme qui ne cesserait jamais de manger. Nous sommes tous menacés par cette démesure, c’est-à-dire par l’orgueil. C’est par un style de vie qui s’oppose à l’orgueil que l’homme pourra guérir de ce mal. Ceci explique pourquoi celui qui veut des racines saines veillera à garder la mesure en ces trois domaines, où l’orgueil peut devenir très puissant, et même voudra aller plus loin, par l’humilité et la petitesse. Dans ce cadre, la pauvreté, la chasteté et l’obéissance sont comme les antidotes du poison qui nous tue. Ces choses, on les a découvertes jusque dans les grandes religions non chrétiennes, où des personnes savent dire en toute liberté « non » à leur orgueil, et s’engagent avec joie sur un chemin de pauvreté, de chasteté et d’obéissance.

Dans le christianisme, ces trois conseils prennent une coloration particulière, à la lumière du Christ. Nous ne nous faisons pas pauvres, chastes et obéissants pour viser un idéal purement humain, mais parce que le Christ s’est fait pauvre, qu’il a renoncé au mariage pour se consacrer à son Père et aux hommes, et enfin parce qu’il s’est fait lui-même obéissant jusqu’à la mort. Si nous vivons les trois conseils évangéliques, ce n’est pas par idéal de sagesse humaine, mais par imitation de ce que le Christ Jésus a vécu avant nous.

Nous ne sommes donc pas à la recherche d’une « simple » perfection humaine. Cependant, en suivant le Christ dans sa pauvreté, sa chasteté et son obéissance, nous recevons la grâce d’un cœur guéri de sa démesure, de son péché et, par cette grâce, nous apportons la guérison à l’univers entier. Ainsi que le Pape le souligne, la pratique des conseils évangéliques a pour but ultime la transformation du cosmos tout entier à travers le cœur de l’homme, selon la parole de l’apôtre Paul : « La création en attente aspire à la révélation des fils de Dieu... avec l’espérance d’être elle aussi libérée de la servitude de la corruption pour entrer dans la liberté de la gloire des enfants de Dieu » (Rm 8,19-21). La tâche des religieuses et des religieux revêt ainsi une dimension cosmique : par leur cœur passe l’accomplissement auquel le cosmos entier aspire ; ils ne vivent pas seulement dans leur petite maison, mais dans le monde, pour travailler à sa guérison ou plutôt pour transmettre à tous – nature, animaux, humanité entière – la force de guérison qui vient du cœur de Dieu.

Un autre texte qui exprime bien la nature des conseils évangéliques vient de saint Jean :

N’aimez ni le monde, ni ce qui est dans le monde. Si quelqu’un aime le monde, l’amour du Père n’est pas en lui, car tout ce qui est dans le monde – la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie – vient non pas du Père, mais du monde. Or le monde passe, avec ses convoitises, mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement (1 Jn 2,15-16).

Lorsque saint Jean parle ici du monde, il vise toute la création dans la mesure où celle-ci s’oppose à Dieu. Ce monde est, dit-il, caractérisé par une triple convoitise : celle de la chair n’est autre que la sexualité ; la convoitise des yeux correspond au désir d’accumuler les richesses ; l’orgueil de la vie, enfin, est l’épanouissement personnel désordonné.

Saint Jean vise donc déjà les trois conseils évangéliques tels que nous les connaissons. Ceux-ci tendent à l’imitation du Christ dans le don total de lui-même, ainsi que l’exprime saint Paul :

Jésus-Christ, qui était de condition divine... s’anéantit lui-même, prenant la condition d’esclave et devenant semblable aux hommes (Ph 2,6-7).

Vivre la pauvreté, la chasteté et l’obéissance, c’est être inséré, implanté, branché sur le Christ qui s’anéantit jusqu’à la mort pour ressusciter. Parler ici d’imitation reste insuffisant : par la pratique des conseils évangéliques, nous nous identifions au Christ dans son double mouvement descendant (il s’anéantit) et ascendant (il ressuscite). Nous retrouvons ainsi le mystère pascal, évoqué plus haut au sujet du baptême.

La chasteté

Le document propose le texte bien connu :

Il y a des gens qui ne se marient pas, à cause du Royaume de Dieu. Qui peut comprendre, qu’il comprenne ! (Mt 19,12).

Par ces mots, Jésus ne donne pas un commandement, mais un conseil. Dans cette perspective, la chasteté revêt un caractère nuptial : en elle, nous regardons le Christ et nous ne le quittons pas des yeux. Des trois conseils évangéliques, celui de la chasteté est le plus recueilli, le plus intérieur : il regarde la personne consacrée dans sa relation unique au Christ. C’est ce que dit le Pape en deux phrases :

Le conseil de chasteté s’adresse particulièrement à l’amour du cœur humain. Il fait ressortir surtout le caractère nuptial de cet amour, tandis que la pauvreté et plus encore l’obéissance semblent mettre en relief avant tout l’aspect rédempteur de l’amour impliqué dans la consécration religieuse.

Nous pouvons comparer ceci avec le Christ en croix. Il regarde d’abord vers son Père, et le lien qui l’unit à lui est premier. Mais Jésus regarde aussi le monde, et ainsi, son amour devient rédempteur : par sa pauvreté et son obéissance, il purifie le cosmos tout entier. La chasteté est figurée par le bois vertical de la croix. Qu’il regarde vers son Père ou autour de lui, le Christ vit le même amour, mais selon deux modalités différentes : amour « nuptial » et amour « rédempteur ».

Pauvreté et obéissance mettent surtout en relief le côté « rédempteur » de l’amour, alors que la chasteté souligne davantage son côté « nuptial ». Ceci explique l’existence dans l’Église d’un état de vie de vierges consacrées, qui ne font qu’un seul vœu, celui de chasteté. Ces personnes mènent une vie contemplative avant tout, même si une telle consécration à Dieu conduit aussi, normalement, à porter le souci des autres et à vivre ainsi un amour rédempteur. Le vœu de chasteté peut cependant exister seul, et l’Église reconnaît un sens à la virginité et à la consécration virginale.

À ce propos, le Pape cite un texte de Paul, qui nécessite une explication :

Celui qui n’est pas marié a souci des affaires du Seigneur (...) De même, la femme sans mari a souci des affaires du Seigneur, afin d’être sainte de corps et d’esprit (...). Celui qui choisit le mariage fait bien, mais celui qui choisit la virginité fait mieux (1 Co 7,32-38).

De telles phrases risquent d’être mal comprises et de susciter l’indignation des gens mariés. Remarquons cependant que saint Paul n’exprime aucune mésestime pour le mariage : il n’oppose pas le « bien » et le « mal », mais le « bien » et le « meilleur ». Il faut oser dire que le mariage et la virginité ne sont pas égaux, objectivement : celui qui choisit la virginité fait mieux que celui qui choisit le mariage, parce qu’il peut ainsi s’occuper uniquement des affaires du Seigneur. On objectera : saint Paul était misogyne ! Mais peut-on disqualifier aussi aisément sa parole ? Il a l’honnêteté de dire : « C’est moi qui parle, non le Seigneur » (v. 12) ; il ajoute cependant : « Je crois, moi aussi, avoir l’Esprit de Dieu » (v. 40). Habité par l’Esprit de Dieu, Paul dit sans doute ce que Jésus aurait dit, lui aussi : « Le mariage est bon, mais la virginité est meilleure ».

Précisons bien : Paul ne déclare pas que la personne qui se marie est sainte, et que celle qui choisit la virginité l’est davantage. Ces choses dépendent de la grâce de Dieu et de notre volonté. Les religieux et les religieuses ne sont pas tous promis à la canonisation, et certaines personnes mariées vivent une sainteté réelle. Cependant il ne convient pas d’exagérer : ne soyons pas faussement modestes ; méfions-nous d’une humilité apparente qui cache en fait un orgueil bien réel. Reconnaissons donc sans culpabilisation la réalité objective : les religieux disposent – dans leur liberté et avec la grâce de Dieu – de moyens de sainteté qui leur sont particuliers : vie de prière individuelle et liturgie, vie communautaire, pauvreté, etc.

Un dernier mot, à propos de la chasteté : il faut que celle-ci soit joyeuse. Rien n’est plus triste qu’un religieux ou une religieuse triste. Le premier conseil de l’Évangile ne concerne ni la pauvreté, m la chasteté, ni l’obéissance, mais la joie !

La pauvreté

Pour parler de la pauvreté, le Pape s’appuie encore une fois sur un texte de saint Paul :

Vous connaissez la générosité de Notre Seigneur Jésus-Christ qui, pour vous, s’est fait pauvre, de riche qu’il était, pour vous enrichir de sa pauvreté (2 Co 8,9).

Dans la vie religieuse, nous imitons le Christ qui a voulu se faire pauvre pour nous rendre « riches » : à notre tour, abandonnant nos richesses, nous choisissons la pauvreté pour « rendre riches les pauvres ». C’est pourquoi, si notre congrégation possède des richesses, elle est invitée à écrire en première page de son livre de comptes : « Nous nous sommes rendues pauvres, pour rendre les pauvres riches ». L’appel à la pauvreté n’est pas adressé aux individus seulement, mais aussi à nos communautés et à nos congrégations. Je suis d’ailleurs convaincu qu’elles en vivent spontanément : on serait étonné de savoir ce que donnent les congrégations religieuses et les ordres monastiques pour enrichir les pauvres !

L’obéissance

Ce troisième conseil est peut-être le plus difficile de tous, spécialement aux yeux des jeunes. On peut s’habituer à la pauvreté, vivre la chasteté en étant porté par une certaine tradition, mais comment est-il possible de dire : « J’abandonne ma volonté », et de le dire non seulement à Dieu, mais aussi aux supérieur(e)s ?

Pour faire comprendre le sens de l’obéissance, le Pape part du texte de Paul sur l’obéissance du Christ, cité plus haut (Ph 2,6-8), mais aussi d’un passage de sa lettre aux Romains :

Comme, en effet, par la désobéissance d’un seul homme, la multitude a été constituée pécheresse, ainsi, par l’obéissance d’un seul, la multitude sera constituée juste (5. 19).

Autrement dit : la désobéissance d’Adam a entraîné le genre humain dans le péché, mais l’obéissance de Jésus, nouvel Adam, a donné à l’humanité le bonheur et la grâce.

L’obéissance chrétienne ne se résume pas à un effort personnel d’humilité : elle est surtout imitation du Christ. Si, par la désobéissance des hommes – la nôtre y compris – le péché vient donc toujours dans le monde, c’est par l’obéissance de l’homme que viendra la grâce dans le monde. Plus nous nous faisons obéissants en imitant Jésus, plus le monde deviendra humble et droit devant le Seigneur.

Regardons donc le chemin d’obéissance que le Christ a tracé dans l’Évangile. On peut citer ici de nombreux textes :

Ma nourriture est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé (Jn 4,34).
Je ne cherche pas ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé (Jn 5,30 ; voir aussi 6,38 ; 8,29).

C’est cette obéissance du Christ que nous faisons nôtre. Elle implique une disponibilité totale à l’Esprit Saint, qui agit dans toute l’Église, mais se manifeste également dans les Constitutions des ordres et congrégations religieuses.

De l’obéissance christocentrique découle la soumission religieuse à la voix du supérieur ou de la supérieure. Lisons la lettre aux Hébreux :

Obéissez à vos dirigeants et soyez-leur dociles, car ils veillent sur vos âmes, puisqu’ils en rendront compte. Ainsi pourront-ils le faire avec joie et non en gémissant (13,17).

Cette invitation est la sagesse même. Peut-être sommes-nous tentés de dire : « Obéir nous empêche d’être nous-mêmes, nous mutile ». Sachons reconnaître, bien au contraire, que l’obéissance à Dieu – médiatisée par l’obéissance à une personne humaine –, loin de nous détruire, renforce notre volonté en la plaçant dans l’axe de la volonté divine. L’obéissance ne diminue donc pas nos forces, mais les renforce en les mettant dans le grand courant de la volonté de Dieu. Même si cette obéissance au supérieur et à Dieu nous entraîne à quelques détours imprévus, nous serons portés par toute la force de la volonté de Dieu, comme Jésus marchant jusqu’à la croix et dépassant la mort pour ressusciter. Si Jésus avait voulu faire sa propre volonté, il aurait évité la mort, mais il n’aurait pas vécu la résurrection et n’aurait pas donné la vie au monde. C’est par son obéissance que le monde entier a été sauvé : de la mort même, l’obéissance tire la vie. Le disciple du Christ peut dire, lui aussi : « Lorsque je me fais obéissant, la puissance de résurrection qui est dans le cœur de Dieu m’habite et me fait dépasser la mort ».

Ainsi, comme dit le Pape, les conseils évangéliques – et en particulier celui de l’obéissance – sont une expression particulière de la liberté intérieure, de même que l’expression définitive de la liberté du Christ a été son obéissance jusqu’à la mort : « Je donne ma vie (par obéissance), pour la reprendre. Personne ne me l’enlève, mais je la donne de moi-même » (Jn 10,17-18).

Les conseils évangéliques permettent de concrétiser l’offrande totale de soi, et aussi d’en vérifier la réalité. Celui ou celle qui se donne complètement à Dieu le sera dans les trois domaines de la pauvreté, de la chasteté et de l’obéissance. Les conseils évangéliques peuvent être comparés à trois tests médicaux : s’ils sont positifs, le médecin en conclura que la personne est en bonne santé.

En même temps, ces trois conseils évangéliques sont les témoins visibles du caractère absolu de l’amour de Dieu : sans les consacrés qui mettent en pratique l’appel évangélique à la pauvreté, à la chasteté et à l’obéissance, comment les hommes pourraient-ils voir qu’il vaut la peine de donner sa vie tout entière pour la cause de Dieu ? Aussi longtemps que des personnes donnent leur vie pour une cause, sa valeur absolue est bien visible ; les causes qui meurent sont aussi celles pour lesquelles personne n’accepte de mourir. La vie religieuse rend aussi un témoignage primordial : celui d’un amour plus fort que la mort.

L’amour pour l’Église

Comment être religieux sans aimer l’Église ? S’il est triste de voir des chrétiens pleins d’aigreur à l’égard de l’Église, que dire de religieuses ou de religieux qui la critiquent sans amour ? Aimer l’Église ne signifie pas refuser de voir ses défauts, mais l’accueillir telle qu’elle est en pardonnant ses fautes.

L’amour du religieux pour l’Église ne peut se réduire à une solidarité humaine ou à un mouvement de philantropie. Il prend sa source en Dieu même, qui nous a témoigné la richesse de son amour en Jésus-Christ. Habités par cet amour qui nous vient ultimement du Père, nous nous attachons au Christ, et celui-ci nous envoie vers nos frères. Nous aimons le Christ mais, dès que nous arrivons devant lui avec notre déclaration d’amour, il nous invite à aimer nos frères.

Il nous faut commencer par aimer le Christ pour lui-même, en acceptant de marcher sur les chemins qu’il nous indique. Il y a place dans l’Église pour la vocation contemplative, c’est-à-dire l’appel à se contenter d’aimer le Christ : par des voies invisibles, cet amour se répandra dans le monde entier. Être contemplatif ou contemplative, c’est aimer le Christ d’un amour nuptial et croire profondément que le Christ diffuse cet amour dans le monde, pour en faire un amour rédempteur ; c’est dire au Christ : « Je t’aime à un point tel que je n’ai pas besoin de savoir par quels chemins tu transformeras cet amour nuptial en amour rédempteur ».

Dans d’autres formes de vie religieuse, l’amour rédempteur prend prend des chemins bien visibles : l’enseignement, le soin des malades, l’évangélisation et tant d’autres bonnes œuvres pratiquées depuis des siècles. Encore une fois, cependant, tout commence par un regard contemplatif vers le Christ. Comme la vie contemplative, la vie religieuse active prend donc son point de départ obligé dans un amour exclusif pour le Christ. Même s’il reçoit du Christ une tâche concrète dans une école ou un hôpital, par exemple, le religieux ou la religieuse doivent savoir que le Christ peut aussi répandre sa grâce par d’autres canaux, qu’il peut travailler là où il veut, en toute liberté, et toucher le cœur des hommes.

Conclusion

Lisons, ou plutôt méditons bien à l’aise « Redemptionis donum », même si ce texte est un peu difficile. Écoutons son appel à ranimer notre vocation, à approfondir notre consécration religieuse, à admirer toute la beauté des conseils évangéliques. Notre mission est admirable, en effet : elle fait de nous les explorateurs de la Terre Promise, l’avant-garde du grand peuple de Dieu ; elle nous envoie pour porter à la terre entière l’amour du Père, en son Fils, par l’Esprit, sans oublier d’aimer et de faire aimer l’Église.

Wollemarkt 15
B-2800 MECHELEN, Belgique

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