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Le nouveau code de droit canonique

Approche générale

Jean Passicos

N°1983-3-4 Mai 1983

| P. 140-149 |

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La promulgation du nouveau Code de droit canonique est, à n’en pas douter, un événement de grande importance pour la communauté ecclésiale (du moins pour l’Église latine, puisque les Églises d’Orient recevront le leur dans quelques années). Certes il est des événements plus spectaculaires. Celui-ci n’est pourtant pas passé inaperçu. À des degrés divers, on a eu l’impression que quelque chose « se jouait » dans la vie de l’Église et que l’avenir dépendra pour une bonne part de cette réforme du droit. Attente réelle ici, crainte à peine voilée là, cette promulgation n’a laissé que peu de monde indifférent ! Événement aussi pour la science canonique et juridique : en quoi le droit canonique a-t-il gagné par cette nouvelle codification ? Mais la question de l’application du nouveau Code se pose déjà : qu’y aura-t-il de nouveau à réaliser après le premier dimanche de l’Avent 1983 ? que faudra-t-il changer dans nos pratiques actuelles ?

Nous voudrions suivre ici une voie à la fois théorique et pratique pour aborder le Code de 1983 : n’est-ce pas un bon moyen pour comprendre de l’intérieur cet ensemble de prescriptions dont les objectifs sont de faire le lien entre l’Église telle qu’elle se voit en son mystère et l’Église telle qu’elle essaie de vivre ce même mystère ? Cela nous évitera peut-être de tomber dans le piège de l’idéologie ou dans celui de la critique stérile.

Ce qu’est le Code de droit canonique

On le sait, les droits modernes connaissent un grand essor de codification. Nombreux sont les codes de toutes sortes dans lesquels sont rassemblées les règles qui régissent tel domaine de la vie sociale, même s’il y a une grande différence entre ces « codes » : le Code civil est autre chose que le « code de la route », improprement appelé « code » !

L’originalité du Code de droit canonique – c’était déjà le cas en 1917 – est qu’il rassemble dans un même volume en quelque sorte plusieurs petits « codes ». Le Code de 1983 comprend en effet sept Livres dont chacun a un objet précis [1] et se présente, dans cet ensemble, d’une manière toute particulière et plus rationnelle qu’en 1917 (c’est un progrès à noter pour la codification elle-même).

Ce qui n’est pas possible pour la législation étatique, fort abondante, l’est pour le droit de l’Église au champ plus restreint. L’avantage est que la publication de plusieurs « Livres » en un seul volume donne à l’ensemble une certaine homogénéité dans l’expression et dans la pensée.

Cependant, il ne faudrait pas exagérer cette homogénéité. Elle va de pair avec une grande complexité de l’ensemble codifié. Par-delà une certaine diversité d’expressions parfois sans intérêt, une lecture attentive du Code découvre bien vite une grande complexité d’un Livre à l’autre, et même à l’intérieur d’un Livre, signe d’un compromis entre plusieurs tendances doctrinales ou encore entre plusieurs pratiques pastorales. Comment en serait-il autrement ? Le droit en lui-même est bien souvent sinon toujours un compromis. Lorsqu’il s’agit de refaire une codification aussi large, la nécessité du compromis n’a pas pu ne pas se poser à plusieurs reprises au législateur. Enfin, n’oublions pas que ce Code est destiné à la vaste Église latine qui est loin d’être monolithe, de l’Europe à l’Asie, de l’Afrique aux Amériques, si tant est qu’un même continent est lui-même homogène ! Véritable gageure dont l’histoire dira si elle aura été une réussite. Le droit est toujours peu ou prou le reflet d’une situation donnée ; comment ce Code aurait-il pu échapper à la diversité du monde actuel ? Comment la prend-il en compte ?

L’avantage d’un code en un seul volume est donc certain. L’unité est favorisée, l’essentiel est bien dit. La référence est facile aussi.

Toutefois, il faudrait éviter de tomber dans l’erreur de l’utilitarisme immédiat, qui se contente de certaines prescriptions en laissant de côté les autres. Précisément, l’avantage d’un code, c’est de pouvoir faire appel d’une manière dynamique et complémentaire aux institutions voisines, aux prescriptions proches de celles qui retiennent plus particulièrement l’attention. Il favorise une vision d’ensemble de l’Église et c’est cela qui est important. £A quoi bon établir des communautés « de communion » si on oublie comment les défaillances à la communion doivent être prises en compte ? À l’inverse, comment comprendre l’excommunication si on oublie la nature profonde de la communion ecclésiale et les institutions qui la sous-tendent ou l’expriment, dans tel conseil pastoral, par exemple ?

L’approche de notre Code ne sera donc pas aisée. L’essentiel est qu’il soit considéré comme un patrimoine commun dans lequel chacun pourra trouver les références essentielles à sa vie en Église. Cela suppose que l’on se garde des vues réductrices toujours partiales. Le droit, parce qu’il est tourné vers des situations concrètes, permet de ne pas se laisser enfermer dans sa petite sphère mais d’accepter les relations vitales avec d’autres.

Le Code de 1983 est appelé à jouer ce rôle. Mais, dans sa texture juridique, il apparaît moins simple et moins homogène que celui de 1917. Ce peut être une richesse ; ce ne sera pas sans inconvénient. Car, bien plus que celui qui l’a précédé, il se trouve comme à un carrefour de l’histoire de l’Église après le concile Vatican II.

Le Code et Vatican II

La première question qui est venue à l’esprit de tout le monde, a été de savoir si le nouveau Code est « bien dans la ligne » de Vatican II.

Interrogation tout à fait normale. Aucune réforme juridique de cette ampleur ne saurait être neutre, ni dans ses principes ni dans ses objectifs. L’histoire de l’Église fournirait plus d’un exemple de ce genre : aux grands moments de son histoire, celle-ci a éprouvé la nécessité de réformer ses structures et son droit. Or, dès le début, Jean XXIII a lié l’ aggiornamento du Code à la rénovation de l’Église par la célébration d’un concile œcuménique. Par la suite, la préparation du futur Code a été comprise comme un moyen de mise en œuvre du concile : telle a été la vocation confiée à la commission de révision par Paul VI et le Synode des évêques, qui a été informé à chaque fois des travaux. Chemin faisant, on s’est aperçu que c’était la conception même du Code et partant du droit canonique qu’il fallait renouveler. Les rapports de l’Église au monde ont changé ; son mystère a été à nouveau exprimé en termes adaptés à l’époque. Cela ne pouvait pas ne pas marquer le droit.

Jean-Paul II a fait sienne la perspective de ses prédécesseurs. « En un certain sens, écrit-il dans la Constitution de promulgation du Code, on pourrait même voir dans ce Code un grand effort pour traduire en langage canonique cette doctrine même de l’ecclésiologie conciliaire. Si. cependant, il n’est pas possible de traduire parfaitement en langage canonique l’image conciliaire de l’Église, le Code doit néanmoins être toujours référé à cette image comme à son exemplaire primordial dont, par sa nature même, il doit exprimer les traits autant qu’il est possible [2] ». Et le pape de parler de la complémentarité entre le Code et le Concile, spécialement pour ce qui concerne les Constitutions Lumen gentium et Gaudium et spes. Telle serait donc la grande caractéristique du nouveau Code.

Cependant l’erreur serait d’établir une comparaison trop stricte entre les textes conciliaires et le Code. Ils ne sont pas de même nature, ce que note Jean-Paul II d’ailleurs. Le Concile n’a guère établi de normes juridiques (sauf de très rares exceptions). Ce sont ses principes qui doivent innerver le nouveau Code et il importe alors de se demander comment celui-ci leur a donné forme juridique.

Il faut se garder en outre de la tentation de vouloir déduire purement et simplement du Concile le nouveau Code. Le droit ne se construit pas uniquement à partir de principes généraux d’ordre théologique ou philosophique, ou même d’ordre pastoral. Il se construit à partir d’un va-et-vient entre ces principes et la vie qu’il faut régir d’une manière précise ; il a sa propre approche des institutions et de la vie sociale, et ses méthodes particulières. Voilà pourquoi il est un complément indispensable à la théologie (ou à la philosophie) et à la pastorale. Que le Concile se traduise dans le Code, c’est normal, mais c’est d’une traduction qu’il s’agit. Il ne faudrait pas que ce soit une trahison !

Oui, le nouveau Code se situe bien dans l’orbite de Vatican II. L’esprit du Concile y est présent et certaines décisions émanant des Pères conciliaires sont prises en compte par le législateur de 1983.

Le Livre auquel on pense tout aussitôt est sans nul doute le deuxième : « Du Peuple de Dieu ». Ce titre évoque d’une manière significative le Concile auquel l’expression était chère. Mais il n’est pas le seul.

Ainsi, à plusieurs reprises, l’accent est mis sur la communauté des croyants, soit dans le diocèse soit dans la paroisse ou encore dans les associations, dont le nouveau statut est fort important. La participation est honorée à travers les grandes institutions créées par Vatican II : le synode des évêques, la conférence des évêques, le conseil presbytéral ou pastoral. Allant plus loin, le Code fait du synode diocésain et du concile particulier une institution représentative non plus des seuls clercs mais de tous les fidèles.

Le collège des évêques fait son entrée dans le droit positif, même si on aurait souhaité plus de vigueur dans les normes qui le régissent.

Le statut des fidèles est lui aussi renouvelé : les laïcs sont en bonne place (ils sont situés avant les clercs !). Quant aux Instituts de vie consacrée, ils voient leur charisme propre bien reconnu.

On sera frappé encore par une plus grande simplicité des textes (on le voit bien dans le Livre III sur l’enseignement et le Livre VI sur les sanctions). On reconnaîtra à beaucoup de prescriptions une réelle ouverture pastorale ou un meilleur enracinement dans la théologie : ce qui devrait rendre plus crédible le Code lui-même. Le droit particulier voit sa place et son rôle mieux situés, ce qui aura pour conséquence que ce Code ne se suffira pas à lui-même, encore moins que celui de 1917, trop centralisateur et trop détaillé.

Cependant le Code se ressent des hésitations ou des compromis de Vatican II (il en révèle, à sa manière, pas mal). Cela fait aussi partie de l’héritage du Concile ! Les limites du Code sont ainsi, bien souvent, celles du Concile. Le législateur a-t-il manqué d’audace, a-t-il été trop prisonnier du Concile – du compromis du Concile – ou de ses propres tendances qui le poussaient tantôt vers telle ecclésiologie, tantôt vers telle autre ? Cela expliquerait telle insistance ou telle discrétion. La terminologie est parfois imprécise (ne l’était-elle pas au Concile ?) et les options sont parfois mal « nouées ».

Il ne faudrait pas enfin oublier que le Code reçoit l’héritage de l’ensemble des normes juridiques qui ont permis la première mise en œuvre du Concile. Or cette période, riche en promesses, n’a pas connu que des réussites, elle a eu son lot d’hésitations et même d’échecs. Le Code se ressent de tout cela, peut-être encore une fois ; par manque d’audace.

Le Code et la vie de l’Église

Héritier de Vatican II, le Code de 1983 n’en est pas moins marqué par la vie de l’Église, celle qui remonte très haut dans l’histoire et celle qui fait actuellement l’histoire.

Héritier d’une longue histoire

Vatican II avait rencontré sur son chemin la tradition de l’Église (pas seulement celle de Trente ou de Vatican I) à laquelle il apportait sa pierre. À sa manière, le Code de 1983 s’inscrit dans la longue et prestigieuse tradition canonique. Jean-Paul II le rappelle d’une manière fort opportune dans la constitution de promulgation. Le droit en effet se situe dans la trame profonde des institutions, de ce qui fait la substructure de la vie collective, pas forcément de ce qui est le plus spectaculaire, mais qui marque profondément la vie collective et les mentalités (même s’il évolue parfois plus vite qu’elles). Le poids de l’histoire peut fructifier en sagesse lorsque les institutions ont fait leur preuve, non pas pour qu’elles soient maintenues figées ou dans la répétition, mais pour qu’on s’en inspire lorsque les temps le demandent.

Le Code de 1983 est ainsi porteur de cette mémoire collective de l’Église. Il est « un document législatif principal de l’Église, fondé sur l’héritage juridico-législatif de la Révélation et de la Tradition », écrit le pape. Pour le comprendre et l’appliquer il faudra faire appel à « tout le magistère des précédents conciles œcuméniques et aussi... (au) patrimoine de sagesse juridique qui appartient à l’Église [3] ».

Comment la nouvelle codification a-t-elle gardé et compris ce patrimoine de sagesse juridique ? A-t-elle purement et simplement repris les vieilles expressions ? a-t-elle renouvelé leur compréhension au contact des nouvelles institutions ? Ici encore il y avait un compromis à faire, d’une autre manière que ce qui avait été fait au concile. A cet égard, le Code a plus d’ampleur que le Concile lui-même. Mais de la réponse qui sera apportée à cette question, on conclura à l’adaptation du droit ou à son côté répétitif.

Cette étude demande autant de circonspection que celle de la réception de Vatican II par le Code.

Il y a bien un renouvellement des institutions traditionnelles : ainsi en est-il de la paroisse, qui montre une fois de plus son étonnante capacité d’adaptation ; c’est vrai des ministères, qui s’ouvrent à une plus grande participation, c’est vrai encore du vieux statut des confréries ou des pieuses unions, qui s’ouvre au droit d’association.

On retiendra pourtant combien l’accent est mis ici ou là avec insistance sur le ministère hiérarchique (la référence au pontife romain est très soulignée, comme aux beaux jours de Vatican I) ; la grande valeur de consécration n’est pas toujours dans un rapport très équilibré avec la mission ; la mission de toute l’Église et celle de la hiérarchie ne sont pas toujours exprimées en termes bien complémentaires ou harmonieux ; la centralisation est encore trop fortement marquée ici ou là. Cependant, tout cela est situé différemment qu’hier.

Partenaire de la vie actuelle

Vatican II s’éloigne de plus en plus dans le temps. Selon des sondages, pour les jeunes générations, il est déjà loin dans l’histoire ! Il a marqué profondément une génération, mais ce n’est plus elle qui aura désormais à l’appliquer. Depuis 1965, le monde et l’Église ont fait du chemin. Le droit postérieur au Concile a dû faire face à des situations que celui-ci lui-même n’avait pas envisagées.

Le Code de 1983 a pris acte de cette évolution. Cela ne veut pas dire qu’il répondra à toutes nos attentes.

Ainsi en est-il des dispositions liturgiques, peut-être encore trop tributaires des premières audaces du Concile mais aussi de ses premières limites. On sent que le législateur sait que la foi, sans laquelle il ne peut y avoir de vie sacramentelle valable, est aujourd’hui au centre des grands débats et qu’elle ne fait plus le ciment de la chrétienté comme hier. L’Église s’avance de plus en plus dans un monde « a-thée ». Cette problématique n’est pas étrangère au Code, mais il l’aborde avec une très grande prudence.

Par contre, la question des ministères ne pouvait pas échapper au législateur, en des termes peut-être insoupçonnés de nombreux Pères conciliaires. A la suite des lois de Paul VI, l’ouverture est faite, après de nombreuses discussions, semble-t-il.

L’œcuménisme n’est pas absent de notre document. Le Concile y avait attaché une grande importance. Beaucoup de prescriptions en font cas et la notion de communion introduite à différentes reprises dans les canons devra être étudiée de près pour qu’on puisse en saisir tout le dynamisme.

Les mentalités actuelles, si proches de leurs droits, ne sont pas méconnues. Le Code a reçu le message de l’importance de la femme dans le monde de ce temps et dans l’Église (même s’il n’a pas ouvert aux femmes les marches de l’autel). Le désir de participation a reçu des réponses positives. Une innovation même pour l’Église : certains canons sont consacrés « aux obligations et aux droits des fidèles » en des termes qui rappellent les déclarations modernes des droits. Le pape n’hésite pas à parler d’une sorte de « charte fondamentale » des fidèles (allocution aux membres de la Rote romaine du 26 février 1983). Sans doute la protection juridique de ces droits est-elle encore trop peu élaborée et les prévisions des schémas n’ont-elles pas été retenues. L’esprit y est pourtant et il faudra aller plus loin et rapidement. Saluons enfin les droits reconnus à la défense d’une manière bien plus large qu’hier. Cela est heureux.

Comme on l’a déjà dit, le Code fait grande place au phénomène associatif : celui-ci s’est développé dans l’Église et dans le monde moderne d’une manière étonnante depuis quelques années, comme une réaction saine contre l’anonymat de la vie moderne. Le Code en prend acte, tout en développant l’idéal de communion qui est aussi la réalité même de la vie ecclésiale.

L’acquis des sciences contemporaines n’est pas ignoré. La jurisprudence des tribunaux ecclésiastiques, qui s’en inspire depuis plusieurs années, a contribué à adapter le droit matrimonial. Les media, si importants aujourd’hui, reçoivent un statut particulier. Quant aux techniques juridiques modernes, elles sont aussi reçues : représentation, participation ou encore le côté administratif du gouvernement pastoral qui se trouve renforcé, tandis que la hiérarchie entre les textes juridiques pourra apporter clarté dans la vie ecclésiale.

Mais du monde contemporain, le Code est sensible aux hésitations, aux incertitudes mêmes. On sait la crise des valeurs fondamentales dans les sociétés (du moins occidentales) qui se répercute tout particulièrement dans le droit pénal. Le droit pénal donne une impression d’ouverture mais aussi de grande fragilité : on mesure déjà la difficulté qu’il y aura à appliquer ces dispositions pénales. On a voulu personnaliser au maximum les peines dans la grande tradition canonique, mais cela risque d’accentuer le malaise dans l’Église. Du reste, cela ne reflète-t-il pas des réactions courantes dans la mentalité d’aujourd’hui ? On comprend mal un système de peines dans l’Église, mais que devient alors l’Église ?

La crise du droit et de l’autorité a sûrement été présente au législateur. Se voulant « pastoral », le Concile n’a pas voulu donner trop de prescriptions, mais plutôt des orientations. Le Code contient un grand nombre de dispositions permissives laissant place à une réelle liberté d’action. Ce phénomène est propre au droit actuel. On peut se demander si ce Code n’appellera pas un grand nombre de normes complémentaires, comme la loi moderne. Il serait regrettable de tomber dans une prolifération de normes, ce qui n’est pas dans l’esprit du législateur et n’est guère souhaité à la base.

Enfin, on a l’impression que le Code de 1983 prend acte de la situation nouvelle de l’Église dans le monde. Communauté par nature spirituelle, son droit ne veut servir que cette mission. Ainsi perce une nouvelle conception du droit canonique.

« Je remets officiellement (ce Code) à toute l’Église, répétant à chacun l’invitation augustinienne : prends et lis. Ce nouveau Code, je le remets aux pasteurs et aux fidèles, aux juges et aux officiais des tribunaux ecclésiastiques, aux religieux et aux religieuses, aux missionnaires, comme aussi aux spécialistes du droit canonique », disait Jean-Paul II dans son discours de présentation [4].

Ce Code est donc celui de tout le Peuple de Dieu. C’est dans cette perspective qu’il faut le recevoir et d’abord le comprendre.

Certes, le texte doit être étudié en lui-même, en sa facture, en ses termes et expressions. Il doit être confronté à la théologie et aux besoins pastoraux ; vice versa, la théologie et la pastorale doivent y faire référence, dans une fécondité mutuelle.

C’est dire qu’il ne faut pas l’étudier pour lui-même, mais pour ce qu’il révèle du mystère de l’Église et pour ce qu’il donnera à la vie pastorale. Au fond, c’est dans sa pratique qu’il apparaîtra dans toutes ses dimensions et non dans son abstraction.

Il est perfectible, comme tout document juridique. Il le sera dans ce lien intime que nous évoquions plus haut, et aussi dans la confrontation avec la science juridique.

Il ne sera pas d’application facile, pour de multiples raisons. La volonté de le mettre en œuvre appartient à tous, à ceux qui sont chargés du gouvernement pastoral des communautés à quelque titre que ce soit comme aux fidèles, dont le désir d’être membres à part entière de l’Église du Christ est vrai. Il sera pour tous un stimulant et, croyons-nous, beaucoup plus qu’un frein. Plus que le précédent, il ouvre de larges ouvertures au droit particulier (même si l’on aurait pu souhaiter qu’il le fasse plus largement) ; il fait donc appel à l’initiative et à la responsabilité des communautés pour qu’elles trouvent une meilleure place dans l’ensemble ecclésial : cela aussi est l’œuvre de l’Esprit.

« Dans la confiance et l’espérance, je l’offre à l’Église qui marche vers son troisième millénaire : à côté du livre contenant les Actes du Concile, il y a maintenant le nouveau Code de droit canonique... Mais au-dessus, mais avant ces deux livres, il faut mettre, comme sommet d’éminence transcendante, le Livre éternel de la Parole de Dieu, dont le centre et le cœur est l’Évangile [5] ». Ce rappel du pape sera un guide précieux pour tous, pour ceux qui seraient tentés de tout enfermer dans le Code ou le droit (et le Concile) comme pour ceux qui n’en voudraient pas.

21 rue d’Assas
F-75270 PARIS CEDEX 06, France

[1Livre I : Les normes générales. Livre II : Le Peuple de Dieu. Livre III : La mission d’enseignement de l’Église. Livre IV : La mission de sanctification de l’Église. Livre V : Les biens dans l’Église. Livre VI : Les sanctions dans l’Église. Livre VII : Les procès.

[2La Documentation Catholique, 80 (1983), 246.

[3Ibid., 250.

[4Ibid.

[5Ibid.

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