Un périodique unique en langue française qui éclaire et accompagne des engagements toujours plus évangéliques dans toutes les formes de la vie consacrée.

Éditorial

Vies Consacrées

N°1982-1 Janvier 1982

| P. 5-6 |

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À l’Est comme à l’Ouest, au Nord comme au Sud, les droits de l’homme sont aujourd’hui bafoués, la violence fait rage. Il y a quelques mois, après tant d’autres, Jean-Paul II en devenait à son tour la victime, lui aussi écrasé par la force aveugle. Le disciple de Jésus conduit par le même chemin que son Maître.

Comment ne pas voir dans cet événement une parabole de toute vie chrétienne dans un monde de violence, selon le mot du Père Lustiger ? Le martyre de nos sœurs et de nos frères nous renvoie à notre propre vie. « Vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang dans votre combat contre le péché » (He 12,4). Point n’est besoin pour cela de persécution sanglante [1]. Dans un monde post-chrétien, il suffit d’être conséquent avec notre foi, notre profession de vie évangélique et religieuse. Notre vie n’est-elle pas encore trop confortable, conformiste, adaptée au monde ? Acceptons-nous avec assez d’audace, d’amour et de « violence évangélique » (Lc 12,49 ; 16,16, etc.) de devenir selon nos pauvres forces ce corps du Christ livré au plus petit de ses frères, défendant par notre vie les droits du plus faible, suscitant dans nos communautés et nos institutions des lieux de gratuité et de miséricorde, révélateurs de l’Évangile de la grâce ? Laissons-nous la puissance de Dieu agir effectivement à travers nos faiblesses ?

Il ne s’agit pas là de quelques paroles en l’air, sans impact réel sur nos existences. Car prendre au sérieux ces questions, c’est entrer dans un processus de conversion personnelle, communautaire et institutionnelle qui nous mènera là où nous ne savons pas, là où nous ne voulons peut-être pas aller (Jn 21,18). C’est inventer un nouvel art de vivre qui soit fécond et oblige d’aller à contre-courant. Cela signifie que la vie chrétienne, a fortiori la vie religieuse, va coûter très cher dans les temps qui viennent. Nous allons réapprendre le prix de la grâce. Car il n’y aura pas d’autre chemin que celui de Jésus-Christ et de son Église : donner un corps à la richesse de la miséricorde dans un monde souvent hostile. Une fois encore, un tel chemin posera des questions radicales à nos vies personnelles, à nos vies de communautés, à nos institutions.

Il est probable qu’en cette année 1982 nous recevrons un nouveau Droit Canon, de nouvelles Constitutions, une nouvelle instruction sur la formation. Vie consacrée espère contribuer pour sa part à la mise en œuvre de ces documents dans nos instituts. Mais la question fondamentale est simple : que ferons-nous de ces textes ? Serviront-ils à mettre au point quelque adaptation facile, quelque restauration stérile ? Ou bien aideront-ils à mettre en œuvre des réponses fortes et audacieuses aux questions radicales qui nous sont posées ? Que la grâce et la puissance de Dieu nous soient données en cette année nouvelle.

[1Impossible de passer sous silence de nouvelles formes de violence, conduisant à un témoignage douloureusement paradoxal. Tel fut tout dernièrement le cas du Père Luis Pellecer, torturé psychologiquement pour l’amener à dénoncer faussement ses compagnons (cf. La Documentation catholique, 1981, 979-980).

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