Un périodique unique en langue française qui éclaire et accompagne des engagements toujours plus évangéliques dans toutes les formes de la vie consacrée.

Conditions pour un avenir de la vie religieuse

Jean-Claude Guy, s.j.

N°1982-1 Janvier 1982

| P. 10-26 |

Une première partie évoque quelques axes constitutifs de toute vie religieuse remis en valeur par les évolutions récentes. Chacun de ces axes nous pose une question majeure et dévoile la crise spirituelle que nous traversons. Nous sommes ainsi introduits à une seconde partie. Pour qu’un avenir soit possible, il importe de revivre aujourd’hui l’expérience organique de Dieu qui est à la source d’une fondation religieuse. Cette affirmation fondamentale amène le Père Guy à poser deux questions. Tout d’abord : quels sont les fidélités et les axes majeurs de notre « spiritualité » qui alimentent réellement notre dynamisme apostolique ? Répondre en vérité à cette question en implique une seconde, une « question de vie ou de mort » : quels moyens allons-nous mettre en œuvre pour rendre opératoires ces fidélités dans la vie des membres de nos Instituts ?

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Parler des conditions pour un avenir de la vie religieuse est une entreprise périlleuse. N’est-ce pas courir le risque soit de tomber dans la futurologie, soit de ne tenir que des propos abstraits sans incidence sur notre vie réelle ? D’autant plus, pourrait-on objecter, que la vie religieuse n’existe pas : seules existent des formes particulières de vie religieuse, fort nombreuses, diversifiées presque à l’infini et dont le principe d’unité n’est pas toujours évident. Tout en reconnaissant que le problème de l’avenir ne peut être résolu que par chaque institut particulier et que, d’un institut à l’autre, ce problème se pose en des termes différents, je ne pense pas cependant que l’objection soit recevable. Car, si abondante que soit la diversité des formes dans lesquelles la vie religieuse s’exprime, elle est cependant, malgré certaines apparences contraires, fondamentalement une. Son développement et sa diversification progressive au long des siècles le manifestent. Dans une Assemblée de supérieurs majeurs, il y a quelque chose qui assure l’unité des participants, et c’est plus profond que le seul fait administratif de dépendre de la même Congrégation des religieux.

Tous nous reconnaissons que, si nous sommes entrés dans la vie religieuse, c’était pour répondre à un appel perçu, une « vocation » différente de celle qui nous aurait conduits au séminaire et qui ne s’identifie pas non plus à l’appel universel à la sainteté. Tous nous sommes entrés dans notre institut pour y constituer, avec d’autres ayant perçu le même appel, un corps fraternel d’un type original, solidaire de cette parcelle d’humanité dans laquelle il est inséré, et reconnaissant que notre mission à tous est d’être, sous des formes sans doute très diversifiées, signe d’espérance pour ce monde. Je pense que, du chartreux au religieux très engagé dans les combats des hommes, tous nous pouvons nous reconnaître dans une définition de ce genre. Et c’est à ce niveau plus profond, fondement de toutes les différences, que je vais essayer de me situer.

Je procéderai de la façon suivante.

D’abord, constatant que nous sommes déjà engagés dans notre avenir, et que l’effort dit d’ aggiornamento a déjà produit des fruits, je reprendrai, dans la première partie, quelques-uns des aspects de notre vie religieuse qui ont été remis en valeur par les évolutions récentes, et qui de plus en plus nous apparaissent comme des axes constitutifs de toute vie religieuse, et j’essaierai de cerner les rebondissements ou questions nouvelles que ces progrès nous obligent à affronter. Les quatre points que j’ai retenus sont les suivants :

  • entrer dans la vie religieuse c’est répondre à une vocation qui insère à un titre particulier dans l’Église ;
  • c’est une vocation qui nous amène à constituer ensemble un corps fraternel ;
  • ce corps fraternel n’a de valeur dans l’Église que s’il fait sienne, à sa façon à lui, la culture du peuple auquel il est donné ;
  • la finalité apostolique de ce corps fraternel qu’est un institut religieux est d’être parole d’espérance pour le monde, que cette parole s’exprime explicitement ou silencieusement, qu’elle soit prédication directe de la foi ou qu’elle passe par la médiation de situations profanes.

L’explicitation de ces quatre points nous permettra de nous concentrer, dans une seconde partie, sur ce que l’on peut considérer comme la condition fondamentale de tout avenir pour la vie religieuse, à savoir : le type d’expérience de Dieu qui la soutient et l’alimente sans cesse, sans laquelle elle perdrait bientôt et son identité et sa raison d’être.

Quatre axes constitutifs de la vie religieuse

Vocation : vivre en état de fondation

Le premier trait commun caractérisant notre vie religieuse est qu’il s’agit d’une vocation. Voilà qui semble un lieu commun. Il vaut cependant la peine de s’y arrêter un peu. Dire que l’on entre dans la vie religieuse par vocation, cela veut dire que ce n’est pas par choix personnel, mais parce qu’on a reconnu y être appelé. La vie religieuse n’est jamais le résultat du simple choix de l’homme, fût-ce un choix bien réfléchi. Il ne suffit pas d’en avoir le goût et les aptitudes ; il faut y être appelé.

Et ceci est un point sur lequel nous avons beaucoup insisté depuis quelque temps. Non seulement les déboires rencontrés avec des départs nombreux dans lesquels il fallait bien reconnaître une erreur d’orientation au point de départ, mais aussi l’approfondissement de notre réflexion sur la vie religieuse nous ont rendus beaucoup plus attentifs à la « vocation » des candidats se présentant.

Mais par qui le candidat est-il appelé ? Ce ne peut être par les supérieurs de l’institut concerné : selon l’expression consacrée, ils « reçoivent » seulement l’engagement du candidat, une fois qu’ils ont mis à l’épreuve l’authenticité de sa vocation (qui, par conséquent, n’a pas en eux son origine). Ce n’est pas non plus par la hiérarchie ecclésiale que le candidat est appelé, comme cela se passe pour la vocation presbytérale où c’est l’évêque qui appelle les candidats reconnus aptes, ainsi que le manifeste fort bien le rituel de l’ordination. Car la vie religieuse, justement, n’est pas un « ordre », elle n’appartient pas à la hiérarchie ecclésiale [1], et sa dépendance par rapport à celle-ci demeurera toujours difficile à définir, et donc à vivre, comme en témoigne le récent document Mutuae Relationes.

Lorsqu’un candidat se présente à un institut religieux, il le fait parce qu’il se reconnaît appelé – ou plus exactement peut-être : poussé – par l’Esprit de Dieu à prendre une distance par rapport au chemin normal de l’existence chrétienne, pour s’engager sur un autre chemin, celui que l’on appelait souvent, de façon ambiguë et exégétiquement erronée, la « voie des conseils évangéliques ». La vocation à la vie religieuse est un appel personnel de l’Esprit de Jésus, que les supérieurs ne peuvent qu’authentifier, tout de même que la hiérarchie ecclésiale ne peut qu’authentifier la naissance d’un nouvel institut et non en prendre l’initiative. De par son type de vocation, la vie religieuse aura toujours une situation en quelque sorte marginale ou limite dans l’Église. J. B. Metz, qui n’est pas lui-même religieux, la définit comme une fonction d’« innovation » et de « critique prophétique [2] ».

L’histoire passée est d’ailleurs là pour nous rappeler que telle fut l’origine de la vie religieuse : celle-ci n’est pas née, comme l’Église, du corps disparaissant du Sauveur ; elle ne fut suscitée que trois siècles plus tard pour rendre à l’Église désormais partie prenante des transformations du monde le service de « critique prophétique » qui lui était alors nécessaire.

Vous voyez dans quel sens j’invoque ce premier trait comme condition pour un avenir. Le propre d’une vocation reçue de l’Esprit est qu’elle est imprévisible et, au sens fort du terme, « désinstallée ». Pour survivre sans laisser sa spécificité se réduire dans le contexte mouvant où nous vivons, notre vie religieuse a besoin de s’interroger à nouveau sur sa vocation dans l’Église et sur la façon dont elle y répond. Nous sommes utilement installés dans des œuvres et des manières d’exister qui ont fait leurs preuves. Notre vie religieuse est sans surprise. Certes, depuis une vingtaine d’années notamment, nous avons fait un considérable effort d’adaptation ; mais nous comprenons bien que l’adaptation, pour nécessaire qu’elle soit, ne suffit pas. De par sa nature, l’adaptation ne fait jamais que suivre ; elle n’est pas créatrice. Or, dans la fidélité à nos fondateurs respectifs, qui tous furent de grands créateurs, il apparaît que la première condition pour un avenir soit de nous rendre capables à notre tour de créativité évangélique.

Entendons-nous : je ne veux pas dire par là qu’il nous faille à tout prix changer nos activités et nos manières de vivre pour répondre aux interpellations – parfois d’ailleurs très épidermiques – de nos contemporains. Ce ne serait le plus souvent qu’une mauvaise adaptation. La créativité dont il s’agit ne se programme pas. Elle ne s’invente pas. Elle se reçoit de l’Esprit de Jésus. C’est une vocation, et elle est exigeante. Mais nous ne pouvons pas nous en décharger sur la créativité de nos fondateurs, dont nous devrions être des copies fidèles. Car il en va des instituts comme des individus : l’appel à la vie religieuse n’est pas d’un jour, ponctuel, fût-ce le jour de la naissance de notre institut. Il est coextensif à toute la durée de l’existence. Aussi, consentir à ce que notre vie repose tout entière sur une vocation de l’Esprit, c’est consentir à vivre sans cesse en état de fondation ou de créativité évangélique.

Par ce rappel que la vie religieuse est réponse à une vocation particulière dans l’Église, je voulais préciser que la condition primordiale pour un avenir est de nous remettre dans des conditions où nous puissions être appelés, poussés par l’Esprit. J’y reviendrai dans la deuxième partie de l’exposé.

Fraternité : se recevoir ensemble du Seigneur

Deuxième aspect (sur lequel je serai très bref) : notre vocation, si elle atteint chacun de nous au plus intime de lui-même, n’est cependant pas une vocation individuelle. C’est un appel à vivre avec d’autres, pour constituer ensemble un corps fraternel d’un type original et spécifique.

Certes, les façons concrètes de comprendre et d’organiser cette communion fraternelle peuvent varier considérablement d’un institut à l’autre, et même à l’intérieur d’un unique institut. Il y a cependant un point commun entre tous, et qui spécifie cette fraternité : aucun autre motif ne la justifie finalement que le fait que chacun y a été appelé par le Seigneur pour y vivre. Ce ne sont pas les membres qui se choisissent ou se cooptent. Ils ont au contraire à s’accepter et à se recevoir les uns les autres comme envoyés, conduits par le Seigneur.

On voit ce qui différencie cette fraternité nouvelle de toutes les autres fraternités humaines. Ces dernières reposent sur le principe du choix ou de la sélection qui fait que telle personne est acceptée et telle autre refusée ; elles sont donc nécessairement fermées, puisque toute sélection implique exclusion ou limitation. Mais ici, où la vocation par le Seigneur est la seule raison d’être du groupe, on parlera d’une fraternité non plus de sélection mais d’accueil, d’une fraternité « reçue », c’est-à-dire en laquelle chacun reçoit les autres comme appelés par le Seigneur. A ce titre, elle n’implique aucune exclusion ou limitation. Fraternité ouverte, dont on mesure sans peine l’importance et la signification dans l’Église.

De tout ceci, nous sommes bien convaincus ; et c’est même une chose admirable de constater comment, sous l’impulsion de Vatican II qui les a heureusement libérés, tous nos instituts ont redécouvert la composante communautaire ou communionnelle de leur existence. Parmi d’autres, une conséquence au moins de cette redécouverte doit être ici signalée parce que nous la retrouverons tout à l’heure : l’expérience de Dieu qu’ont à revivre sans cesse nos instituts religieux n’est pas simplement la somme des expériences vécues par les individus ; elle doit revêtir une dimension communionnelle.

Inculturation : édifier un corps pluriculturel

Le troisième point que je vais évoquer, d’un autre type que les deux précédents, est celui de l’inculturation de la vie religieuse. Je l’aborde sous son angle institutionnel, pour mieux en saisir l’enjeu.

D’une part, beaucoup de nos instituts sont nés en France, pour répondre à des besoins français ; ils se sont donc moulés dans la culture française. Mais bientôt les circonstances et plus encore une prodigieuse vitalité les ont amenés à se répandre dans d’autres zones culturelles. Il leur en a coûté des efforts considérables pour se défaire du modèle et des traditions françaises des origines et élargir leur vocation à d’autres cultures.

D’autre part, un constat analogue peut être dressé pour les instituts religieux, généralement plus anciens, et qui dès leur fondation se voulaient internationaux, ouverts à tous les peuples et à toutes les cultures. En réalité, leur berceau fut la culture européenne, ayant à l’époque une certaine unité et que tous considéraient comme l’unique culture. L’Église était culturellement européenne, la vie religieuse aussi. Et même lorsqu’on n’allait pas chez les « sauvages » mais chez des peuples dont la qualité culturelle était reconnue, c’est à l’intérieur des particularités de la culture européenne que la foi devait être transmise et vécue. La vie religieuse aussi.

Certes, nous n’en sommes plus là. Et on peut dire que, dans un cas comme dans l’autre (instituts d’origine culturelle régionale ou européenne), la nécessaire pluralité des cultures à l’intérieur d’un institut répandu en plusieurs lieux du monde est un point que l’on peut considérer comme intellectuellement acquis. Il s’exprime même dans les structures gouvernementales de l’institut. Mais les problèmes les plus décisifs pour l’avenir de la vie religieuse ne sont pas pour autant résolus.

D’autant plus que la difficulté rebondit du fait que, à l’intérieur d’une aire géographique unique (la France, par exemple), plusieurs cultures cohabitent et souvent s’affrontent : une culture ouvrière, par exemple, qui revendique son autonomie et sa spécificité face à une culture bourgeoise. Et alors se repose la même difficulté que précédemment, mais en des termes plus incisifs, puisque se côtoient dans une même province ou région, voire à l’intérieur d’une même communauté religieuse, des modalités divergentes, quand elles ne sont pas opposées, de vivre la même vie religieuse : autres hiérarchies des valeurs, autres sensibilités aux phénomènes sociaux et ecclésiaux, autres interpellations de l’Écriture, autre sens de la mission, etc.

On voit l’enjeu de ce phénomène qui nous dépasse, et à quel point il concerne l’avenir de la vie religieuse : comment assurer l’unité et la cohésion d’un corps religieux ainsi sollicité par plusieurs cultures incompatibles ? Quel discours pertinent le pouvoir central pourra-t-il tenir, qui éclaire chacun dans son effort d’inculturation sans heurter les autres ? Comment permettre à tous de se sentir partie prenante de la même vocation ?

S’interroger sur l’inculturation, ce n’est pas simplement s’interroger sur la communicabilité à tous du message évangélique, c’est aussi et c’est d’abord s’interroger sur les conditions de possibilité d’une expérience de Dieu assurant l’unité d’un corps religieux pluriculturel. Faute de pouvoir satisfaire à cette dernière exigence, c’est l’avenir des instituts religieux pluriculturels qui se trouverait alors remis en question.

Finalité apostolique : devenir ce que nous sommes et trouver un nouveau langage

Enfin, le quatrième point névralgique que je retiens est celui de notre finalité apostolique, c’est-à-dire de la Parole qu’il est de notre vocation de proclamer. Encore une fois, peu importe ici la modalité – explicite, tacite ou médiate – selon laquelle se vit cette proclamation. La vocation du moine est de proclamer la Parole, tout comme celle du Prêcheur, même si c’est sous un autre mode. C’est là une des dimensions constitutives de toute forme de vie religieuse, et devant laquelle nous ne pouvons que nous reconnaître particulièrement vulnérables. Or notre avenir dépend aussi de la façon dont nous y ferons face.

Notre vulnérabilité en ce domaine a plusieurs causes. J’en évoque deux, qui me semblent majeures. La première est notre incertitude actuelle sur qui nous sommes. Les certitudes qui jadis pouvaient être les nôtres se sont dissipées. Nous savons que nous ne sommes plus, de par notre profession religieuse, ceux qui ont choisi la « meilleure part » en s’engageant sur la voie supérieure des « conseils évangéliques ». Tous les baptisés sont comme nous appelés à la sainteté. Mais nous sommes fort mal à l’aise lorsqu’il s’agit de définir, dans cette perspective nouvelle, quelle est notre spécificité. Nous souffrons d’une crise d’identité évangélique qui entrave notre finalité apostolique et souvent nous paralyse dans notre fonction de « critique prophétique » et d’« innovation », pour reprendre une fois encore les mots de J. B. Metz. A quel titre témoignerions-nous d’une vérité dont nous savons que nous ne vivons pas plus que ceux auxquels s’adresserait notre témoignage ?

Et la deuxième cause de vulnérabilité – qui ne nous est pas propre, mais que nous partageons avec l’ensemble de l’Église – est une crise du langage religieux. Nous vivons encore dans l’Église, et donc aussi dans la vie religieuse, sur une problématique et sur un vocabulaire hérités du passé, qui furent sans doute signifiants pour le monde culturel dans lequel ils ont été élaborés, mais qui aujourd’hui sont de moins en moins porteurs de sens, autant pour nous-mêmes d’ailleurs que pour nos contemporains. Par exemple : ascèse, mortification, Royaume de Dieu, apostolat, charité... Alors, quand on nous rappelle que la vie religieuse « tend par-dessus tout à offrir au monde un témoignage visible de l’insondable mystère du Christ » (M.R. 10), nous sommes sans doute heureux de cette mission reconnue ; mais à mesure même de notre effort d’inculturation, nous nous sentons démunis pour en assumer la responsabilité. Plus intensément peut-être que d’autres dans l’Église, nous sentons l’urgence d’un nouveau langage religieux, non pas artificiellement fabriqué au gré de modes éphémères, mais qui soit l’expression d’une authentique expérience de Dieu vécue dans la modernité.

Conclusion

Pour conclure cette première partie de mon exposé, je voudrais souligner le lien étroit qui existe entre ces deux causes ou ces deux crises que je viens de mentionner (crise d’identité et crise du langage) et en manifester l’enjeu quant aux conditions pour notre avenir.

Car notre langage est toujours l’expression de ce que nous vivons. Une crise du langage spirituel traduit et trahit une crise de l’expérience spirituelle. Au-delà de tous les autres facteurs qui peuvent aussi intervenir, c’est cela que manifeste la difficulté que nous éprouvons à dire qui nous sommes et, par conséquent, à donner cet authentique témoignage évangélique inhérent à notre vocation.

Entendons-nous bien : je ne veux pas dire qu’il n’y ait pas aujourd’hui de sainteté dans l’Église ou dans la vie religieuse, comme il y en eut jadis. L’évidence est inverse. Mais ce n’est pas une question de sainteté subjective. Nous connaissons tous, dans nos instituts, des religieux qui nous émerveillent par la générosité avec laquelle ils se sont donnés au Seigneur et à son service. Mais il faut bien reconnaître que notre vie religieuse, nos instituts religieux comme tels, ne sont guère signifiants pour la société. Là est le point fondamental. Comme le disait un vieux sage : on se demande comment être adapté ; il faudrait d’abord se demander comment être. Devenons nous-mêmes, et l’adaptation, la capacité de signifier nous sera donnée par surcroît. Le problème central qui se pose à nous aujourd’hui est celui de notre identité religieuse.

Or cette identité religieuse, elle ne s’improvise ni ne se fabrique artificiellement. Elle ne tombe pas non plus miraculeusement du ciel. Elle émerge lentement d’une expérience de Dieu, en laquelle on s’engage et qui peu à peu nous transforme en un corps spirituel.

C’est de cela que je vais essayer de parler maintenant, bien conscient non seulement de la difficulté du sujet, mais aussi du fait que, loin d’avoir des leçons à donner, mon exposé posera plus de questions – mes propres questions – qu’il n’apportera une réponse.

Condition fondamentalement requise pour un avenir

Les quatre points ou axes que je viens d’évoquer convergent en ce qu’ils nous font réaliser que l’avenir, pour nos divers instituts religieux, est dépendant de la façon dont nous pourrons résoudre la crise spirituelle que nous traversons actuellement. Nous sommes ainsi renvoyés à cette expérience de Dieu, condition fondamentale de notre existence, et que chaque institut religieux n’a jamais fini de reprendre tout au long de son histoire.

Il est difficile d’en parler. Pour le faire, je vous propose une démarche par étapes permettant de définir progressivement le contenu et les modalités de cette expérience. Il sera plus facile alors d’envisager quelques moyens à notre disposition pour en vivre.

Genèse d’une expérience de Dieu

Pour la présenter, je prends comme illustration les discussions très vives qui eurent lieu en France dans l’immédiat après-guerre. Elles tournaient autour de la question suivante : y a-t-il une spiritualité du clergé diocésain, équivalente à la spiritualité des religieux ? Il est inutile de revenir sur le regrettable contexte polémique dans lequel était formulée cette question. Je l’évoque uniquement à cause des arguments sur lesquels on s’appuyait, et qui se résument ainsi : de même que les religieux ont des vœux, une règle et des pratiques diverses de piété ou d’apostolat, tout cet ensemble leur donnant leur spiritualité, de même les prêtres diocésains ont-ils leur engagement au célibat, l’exercice de leur ministère, la récitation de l’office divin, etc., qui, de façon semblable, leur donnent une spiritualité propre, qui ne le cède en rien à celle des religieux.

Avec le recul du temps, il nous est plus facile de découvrir ce qu’il y avait d’erroné dans une telle problématique. On partait en effet de pratiques et obligations diverses caractérisant un état de vie, et qui étaient donc de l’ordre des comportements extérieurs, et on présupposait que ces pratiques, sérieusement mises en œuvre, engendraient une spiritualité, c’est-à-dire un certain type d’expérience de Dieu. Mais c’était s’engager dans une impasse, car jamais des comportements extérieurs, aussi sincèrement vécus qu’ils puissent l’être, ne peuvent faire advenir et agir en nous l’Esprit de Dieu. Tous les maîtres spirituels, de quelque école qu’ils soient, sont unanimes à reconnaître que la croissance dans la vie selon l’Esprit de Jésus, la genèse d’une expérience de Dieu se fait à partir de l’intérieur de nous-mêmes, du cœur, et que peu à peu elle irradie toute notre personne jusqu’à s’exprimer en des comportements extérieurs. Il y a certes un lien entre manière d’agir et de vivre et expérience de Dieu, mais c’est celle-ci toujours qui est première, l’autre n’en étant que le fruit et la vérification. Un état social ou ecclésial de vie n’engendre pas une spiritualité, même s’il s’harmonise mieux avec telle ou telle.

Concluons. – Une expérience de Dieu, dans la vie religieuse comme partout, ne se marque pas d’abord dans des comportements ou des pratiques ; elle se joue d’abord dans le cœur de l’homme qui se laisse éclairer et mouvoir par l’Esprit de Jésus. Et c’est cet Esprit, habitant et vivant en lui, qui lui « suggérera » peu à peu ce qu’il lui faut faire, compte tenu des circonstances. Et ce qui est vrai d’un individu particulier, de chacun d’entre nous, l’est tout autant pour ce corps fraternel qu’est notre institut. Nous avons à revenir à notre vocation spirituelle comme source permanente de notre inspiration.

Écoles de spiritualité

Je vais illustrer ce point, lui aussi, par le rappel d’une discussion. Certains, il y a une vingtaine d’années, ont contesté l’existence et même la possibilité de spiritualités diverses dans l’Église, affirmant qu’il ne pouvait y en avoir qu’une seule, la spiritualité catholique, s’enracinant dans l’unique Évangile du Christ. Là encore, si j’évoque cette querelle, ce n’est pas pour entrer dans le détail des discussions auxquelles elle a donné lieu et qui sont désormais périmées, mais parce qu’elle nous permet de préciser notre point de vue.

Il est vrai qu’il n’y a qu’un seul Évangile, et qu’à ce titre il n’y a qu’une seule spiritualité chrétienne. Mais il est vrai aussi, non seulement que dans la maison du Père les demeures sont nombreuses, mais plus encore que les chemins donnant accès à la plénitude d’une vie selon l’Évangile peuvent être très divers. Ils dépendent des époques et des contextes, des tempéraments et des attirances ou vocations personnelles. Bien des chemins conduisent au Christ, et qui ne traversent pas les mêmes contrées. Ce que nous appelons couramment, dans un raccourci peut-être ambigu pour certains, des spiritualités diverses, sont en réalité des chemins spirituels ou mieux encore, selon l’expression célèbre, des écoles spirituelles où l’on apprend le service du Seigneur.

Revenons au cœur de notre interrogation. Si nous entrons dans un institut religieux, c’est pour y entreprendre et y vivre une expérience de la présence agissante et transformante de l’Esprit de Jésus qui, nous déboutant de notre autosuffisance, nous conduit à reconnaître que, par le Christ, Dieu est notre Père et que tout homme est notre frère. Telle est la définition générique de toute spiritualité. Mais il y a différentes façons d’entreprendre et de mener à bonne fin une telle expérience. Elle peut être vécue selon des pédagogies diverses, adaptées aux particularités et à la vocation d’un chacun. Alors, si j’entre dans tel institut particulier, c’est pour y entreprendre cette expérience selon telle pédagogie particulière qui me semble correspondre mieux à ma vocation particulière.

Réciproquement, on peut dire qu’un institut qui ne permettrait pas à ses membres de vivre une expérience de Dieu menée selon une commune pédagogie, faisant leur unité et alimentant leur créativité, cet institut manquerait à sa mission.

L’histoire montre que tous les grands fondateurs de types nouveaux de vie religieuse ont aussi été les initiateurs d’un nouveau chemin vers Dieu, d’un nouveau mode d’expérience spirituelle, et que leur fondation, l’état de vie qu’ils ont inauguré, n’est venu qu’ensuite, comme le fruit de l’expérience qu’ils ont vécue eux-mêmes au préalable et qu’ils ont fait vivre à leurs premiers disciples. Pour ne citer que quelques exemples plus célèbres, songeons à saint Antoine ou à saint Bruno, à saint François ou à saint Ignace, à Charles de Foucauld.

Et puisque nous sommes dans la période de leurs anniversaires, ouvrons, par exemple, la Règle de saint Benoît et celle de saint François, et comparons-les. Il est tout à fait évident que l’un et l’autre ne visent qu’un but identique : faire accéder leurs disciples à une vie authentiquement évangélique. Mais il est tout aussi évident que la pédagogie qu’ils appliquent, les moyens qu’ils organisent dans ce but sont très différents : autre façon d’occuper l’espace dans la stabilité ou dans l’itinérance, autre façon de se situer à l’intérieur de l’Église et par rapport à la société, autre relation aux biens de ce monde, autre manière de tendre à la prière continuelle, en un mot, autre pédagogie ou spiritualité. Et dans ces deux cas apparaît clairement le lien intrinsèque entre le type d’expérience de Dieu ou de spiritualité qui est inauguré et l’état de vie auquel conduit la spiritualité en question.

Je voudrais ici insister sur un point et me prémunir contre une objection. On me dira peut-être, en effet, que je me donne la partie belle en prenant mes exemples dans quelques cas célèbres, mais que cela ne correspond qu’imparfaitement à la réalité. Pour quelques fondateurs illustres qui furent d’abord les initiateurs d’un nouveau chemin vers Dieu, il y en a beaucoup d’autres qui, loin d’inaugurer une nouvelle spiritualité, se sont simplement laissé porter par le courant prévalant de leur époque ; ce à quoi ils se sentaient appelés, ce n’était pas à frayer un nouveau chemin évangélique, mais à accomplir telle tâche plus importante ou urgente dans l’Église. Et il est vrai que c’est ainsi que les choses se sont le plus souvent passées.

On pourrait même « noircir » encore plus le tableau en notant qu’il y a plus d’un institut dans lequel le fondateur semble l’avoir été comme malgré lui : il se proposait simplement de réunir quelques collaborateurs pour un service de charité, et les évolutions des choses, parfois même l’intervention de la hiérarchie ecclésiale, ont fait que ce petit groupe initial de bonnes volontés s’est trouvé transformé en un institut religieux !

Pourtant, malgré les apparences, je ne crois pas l’objection recevable. Car même si tous les fondateurs n’ont pas été des initiateurs d’une spiritualité nouvelle (ce qui est évident), mais qu’ils se sont alimentés à une école antérieure ou bien qu’ils ont puisé spontanément dans les courants spirituels prédominants à leur époque, ils l’ont fait cependant d’une façon originale et adaptée aux circonstances diverses de leur fondation. Et de toutes façons, ce qu’ont fait nos fondateurs n’a jamais été qu’un commencement, un premier jalon qui appelle approfondissement et enrichissement. Aussi doit-on reconnaître que, sous un mode ou sous un autre, seule une expérience organique de Dieu donne sa vitalité évangélique à une fondation religieuse.

Concluons. – Ce fait est pour nous d’une importance capitale, car s’il est vrai que nos instituts religieux auront un avenir à proportion de la façon dont ils résoudront leur crise d’identité qui est une crise de spiritualité, c’est à lui qu’il faut revenir. En effet, l’usure du temps, l’influence de facteurs divers qu’il serait trop long de reprendre ici, le retentissement aussi des discussions dont j’ai fait état tout à l’heure, ont incontestablement amoindri l’importance – concrète – attribuée à une profonde expérience de Dieu comme fondatrice de notre vie religieuse et lui donnant à chaque fois sa spécificité. Or il ne faut pas oublier que, dans un sens, chaque institut religieux est en état permanent de fondation et que donc il ne peut pas se reposer sur sa seule fondation première, quelque glorieuse qu’elle ait pu être.

Deux pistes de recherche

Pour le dernier développement de cet exposé, je voudrais poser quelques questions, ou plutôt ouvrir quelque pistes où la recherche pourrait se poursuivre. Elles concernent les conditions pour notre avenir.

Première piste (ou question). Interrogeons-nous et essayons de définir les axes majeurs de notre « spiritualité », c’est-à-dire de l’expérience de Dieu qui réellement (et pas seulement intentionnellement) alimente notre dynamisme apostolique et en même temps fortifie notre corps communautaire.

Je développe un peu. Toute spiritualité se vit au confluent de trois fidélités : une fidélité à nos origines (la naissance ou vocation de notre institut), une fidélité à l’inspiration personnelle de l’Esprit (notre vocation personnelle), et une fidélité au monde et à l’Église (en dehors desquels nous n’aurions aucune raison d’exister).

Ces trois fidélités sont toutes trois nécessaires à une spiritualité, et il importe de comprendre qu’elles se vérifient l’une par l’autre et se fortifient réciproquement. Je m’explique.

Si notre fidélité aux origines n’était pas sans cesse réinterrogée et vérifiée et transformée par notre fidélité à l’inspiration personnelle d’aujourd’hui, alors elle ne tarderait pas à nous faire considérer nos origines comme la forme parfaite, le modèle achevé de ce que nous avons à devenir. On sacraliserait les origines, comme on l’a souvent fait dans le passé (c’est une tentation qui semble congénitale à la vie religieuse [3]) et comme on risque encore de le faire par une sorte d’inflation autour du charisme fondateur. Et nous-mêmes ne serions plus alors que des robots.

Si au contraire notre fidélité à l’inspiration personnelle n’était pas canalisée et, pour ainsi dire, passée au crible de la fidélité à nos origines, alors elle serait aussi infructueuse qu’un arbre dont jamais les branches ne sont émondées et que sa sève n’arrive plus à nourrir. Nous n’aurions plus de critère de discernement, et nous risquerions d’être le jouet de nos projets personnels, trop vite identifiés à l’inspiration de l’Esprit.

Il va sans dire que seule la fidélité au monde et à l’Église permet d’authentifier l’inspiration tant personnelle que celle des origines. Cela est évident pour la fidélité à l’Église, si nous croyons « qu’identique est l’Esprit de Notre-Seigneur Jésus-Christ et de l’Église orthodoxe, son épouse, par lequel nous sommes gouvernés et dirigés vers le salut [4] ». Cela est tout aussi vrai pour le monde, si nous tenons qu’à celui qui « a reçu l’intelligence de la foi, Dieu parle par toutes les créatures », et que « l’univers est pour lui une écriture vivante que le doigt de Dieu trace incessamment devant ses yeux. L’histoire de tous les moments qui coulent est une histoire sainte [5] ».

Oui, c’est en nous interrogeant sur cette triple fidélité que nous approfondirons notre « spiritualité », que nous lui permettrons d’irriguer le corps religieux dont nous sommes partie prenante. C’est le point de départ de toute renaissance et de toute croissance. Peut-être les fruits seront-ils lents à mûrir. Mais il n’y a pas d’autre chemin. Je le rappelais tout à l’heure : toute croissance dans la vie selon l’Esprit part de l’intérieur, du cœur.

Mais il ne faut pas non plus se dissimuler qu’une entreprise de ce genre est dispendieuse. Nous ne pouvons pas l’effleurer seulement. Elle exige que nous nous y engagions totalement, que nous prenions les moyens requis pour la mener à terme. D’où la seconde question.

Deuxième question (ou piste). Demandons-nous quels sont les moyens dont nous disposons et que nous pouvons mettre en œuvre pour rendre opératoire cette triple fidélité qui est condition nécessaire de l’unité et de la vigueur de notre institut.

Car, l’histoire au besoin nous le rappellerait, le don de Dieu qu’a été notre origine n’est pas à accueillir comme un trésor que l’on se transmettrait intact de génération en génération. C’est le germe d’une vie qui ne se transmet qu’à condition de s’épanouir et de se transformer au long des années et des siècles [6]. Petite pousse fragile lorsque l’Esprit de Dieu l’a fait sortir de terre, chaque génération se doit de la cultiver et de lui donner de croître. Sinon, elle ne tardera pas à s’étioler et à dépérir : son seul avenir est celui que nous lui assurons. Aussi cette deuxième question est-elle d’une certaine façon une question de vie ou de mort.

Elle peut se poser concrètement à plusieurs niveaux. D’abord celui de la formation première des candidats que nous accueillons. Il est clair qu’aujourd’hui les conditions de la vie religieuse sont beaucoup plus rudes qu’à d’autres époques. Toutes les protections à l’abri desquelles notre vie religieuse pouvait naguère se maintenir disparaissent les unes après les autres : le vêtement, les règlements, l’« étrangeté » du mode de vie, etc. Nous sommes sans protection, vulnérables ; et sans doute est-ce heureux pour autant que ces protections étaient aussi des entraves parfois à notre ministère apostolique. Mais cette évolution ne fait que rendre plus urgente la nécessité d’une sève vigoureuse qui alimente toute notre vie en même temps qu’elle assure l’unité de notre corps communautaire. D’où l’importance de la première étape de la formation des candidats : quelle expérience personnelle de la présence agissante et transformante de l’Esprit de Jésus leur permet-on de faire ? A quelles sources communes leur donne-t-on de pouvoir alimenter cette expérience ? Quelle fidélité au monde et à l’Église leur permet-on d’approfondir ?

Mais la question se pose aussi à un deuxième niveau. Une expérience de Dieu, en effet, n’est jamais achevée, car elle est une vie qui, comme telle, ne peut rester stationnaire. Elle croît ou elle décroît. Il ne servirait à rien qu’un institut ait permis à un candidat d’inaugurer une réelle expérience de Dieu, prenante de toute sa personne et l’incorporant au corps communautaire, s’il ne rendait pas possible aussi la maturation, tout au long de l’existence, de cette expérience première. En tous les domaines, professionnel ou théologique, on parle beaucoup aujourd’hui de formation permanente. En ce domaine aussi chaque institut a le devoir d’assurer la formation permanente de ses membres, leur permettant d’approfondir et d’enrichir tout au long de leur vie l’expérience spirituelle dont ils vivent. Les modalités concrètes peuvent varier presque à l’infini, et il ne m’appartient pas d’en faire l’inventaire. Ce sera toujours, d’une façon ou d’une autre, permettre à l’individu de revenir à la spiritualité qui est la sienne, c’est-à-dire à la façon propre à l’institut de conjuguer ces trois fidélités, pour se l’approprier et en vivre plus pleinement. S’il est vrai qu’aucune vocation religieuse n’est donnée une fois pour toutes, mais qu’elle se déploie et s’approfondit à chaque étape de l’existence, on comprend la nécessité de cette formation spirituelle permanente. Est-il besoin d’ajouter qu’au-delà de la vitalité de l’individu, elle est une des premières conditions de la vitalité, et donc de l’avenir de chaque institut ?

Plutôt que de conclure, vous me permettrez de vous relire seulement cette célèbre déclaration de sainte Thérèse d’Avila, car elle n’a rien perdu de son actualité :

J’entends dire parfois que le Seigneur a accordé de plus grandes grâces aux saints qui ont vécu autrefois parce qu’ils étaient les fondements de leur Ordre. Et cela doit être vrai. Mais il faudrait toujours considérer que l’on est comme un fondement par rapport à ceux qui viendront par la suite. Si nous, qui vivons maintenant, nous n’avons pas abandonné la voie de la perfection tracée par nos ancêtres, et si nos successeurs faisaient de même, l’édifice demeurerait toujours ferme. De quoi me sert que les saints d’autrefois aient été vraiment parfaits, si je ruine l’édifice par mon peu de vertu et mes mauvais exemples ? (...)
Si on voit l’Ordre perdre quelque chose de sa ferveur primitive, on doit travailler à être comme une pierre fondamentale sur laquelle sera rebâti l’édifice, et le Seigneur donnera son secours pour nous amener à réussir.

81, Boulevard du Lycée
F-92170 VANVES, France

[1« L’état religieux ne concerne pas la structure hiérarchique de l’Église » (Lumen gentium, 44).

[2J. B. Metz, Un temps pour les Ordres religieux ?, Coll. Problèmes de vie religieuse, 43, Paris, Cerf, 1981, 9-16.

[3Elle se manifeste dès le IVe siècle, avec l’élaboration du mythe de l’origine angélique de la Règle chez Pakôme.

[4Exercices spirituels, 365 (trad. J.-Cl. Guy, Paris, Seuil, 1982).

[5Jean-Pierre de Caussade, s.j., L’abandon à la providence divine, Coll. Christus, 22, Paris, Desclée De Brouwer, 1966, 143.

[6A cet égard, les instituts aux origines « glorieuses » sont parfois plus vulnérables.

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