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La maturation de la sexualité dans le célibat

Réflexions à partir d’une expérience

Albert Chapelle, s.j.

N°1972-6 Novembre 1972

| P. 321-331 |

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Préambules

A. Sur la forme

Il s’agira de la description d’une expérience [1]. Par définition, toute expérience est personnelle. Elle sera décrite en fonction du tempérament, de l’éducation, des lectures, des rencontres pastorales du prêtre qui écrit. Un autre écrirait, dirait autre chose, et autrement. Cette situation invite l’auteur à livrer son expérience avec simplicité fraternelle, et le lecteur à discerner comment il se situe, en toute liberté, par rapport à ce qui lui est présenté. En toute liberté, j’insiste. Qu’il ne se croie notamment pas obligé de se poser la question : « Comment moi ai-je fait l’expérience de ces dimensions de la sexualité ? » Cette question est instinctive et spontanée. Elle ne s’impose nullement. Elle peut être bonne. Elle peut être nocive. Elle l’est sûrement si l’on considère qu’il est du devoir ou de la maturité de chacun de pouvoir discerner objectivement, précisément, comment les différentes réalités qui vont être décrites, ont été, sont et seront vécues par lui.

Une description n’a rien d’une évidence de droit. Elle ne s’offre pas comme un dogme de foi ni ne s’impose à la manière d’un raisonnement philosophique. Elle n’exhorte pas. Elle n’interpelle pas directement ou indirectement. Elle est à prendre bonnement, tout comme elle se présente.

Célibataire religieux, forcément je parlerai en fonction de la maturation de la sexualité dans le célibat religieux. Homme, je me mettrai plutôt du point de vue de l’évolution de la sexualité masculine. Ces lignes ne s’adressent pas moins toutefois à des laïcs ou à des femmes.

B. Sur le fond

La maturation implique un cheminement : l’évolution d’une maturité dans le temps avec ce que cela comporte de progression, de points cruciaux et donc de points de crise. Le thème de la progressivité est peut-être ce qu’il y a de plus fondamental à retenir dans ces quelques suggestions.

L’intégration spirituelle de la sexualité dans le célibat est un cheminement épanouissant, vivace, source de joie et de sérénité, bien sûr, mais nécessairement à certains moments austère et douloureux. Nous avons tous de la difficulté à entrer progressivement dans une perception globale de la réalité spirituelle et affective, anthropologique aussi bien que théologique, de ce qu’est la sexualité. Cette difficulté en est une réalité constitutive.

Ce ne sont pas les données les plus contemplatives, les plus spirituelles, la réalité eschatologique du célibat, qui se trouvent d’abord charnellement éprouvées. Il faut toute une vie, tout un temps, certainement, pour que ces réalités dernières, l’Esprit de Dieu, la présence de Dieu à l’intérieur du corps et de la sexualité, deviennent aussi immédiatement tangibles et manifestes que la relation à l’autre, que le désir sexuel au sens génital du terme. Cela nous invite à prendre vraiment au sérieux le fait que la sexualité est engagée, pour chacun comme pour l’humanité, dans l’histoire de son salut.

C. Sur le vocabulaire

Avant d’aborder la description, il est utile de préciser les mots de maturité spirituelle et de maturité psychologique. Je limiterai à ce seul point la théorie de ce développement.

La maturité spirituelle est la capacité de discerner avec sérénité les situations que l’on vit et de reconnaître les choix qu’elles appellent à la lumière de la foi dans la présence et l’action de l’Esprit de Dieu. Par deux exemples, je voudrais indiquer comment l’homme, en réinventant les motifs de ses choix, découvre la créativité de cette liberté spirituelle.

Un jeune homme s’ouvre à l’amour dans la rencontre d’une jeune fille. Une jeune fille s’éprend d’un jeune homme et voici que Dieu les a unis dans le sacrement. Leurs motifs de s’aimer après dix ans de mariage s’exprimeront dans un autre langage. Ils s’aimeront peut-être du même amour, mais il faudra qu’ils réinventent en quelque sorte le motif d’aimer. La vie, l’amour se réinventent. La fidélité au sacrement est une créativité incessante. La liberté renouvelle le regard sur l’autre, la manière de vivre l’amour et de le formuler.

À lire certains auteurs sur la « vocation névrotique au célibat », on a le sentiment que la découverte d’éléments de déséquilibre psychologique dans la vie de quelqu’un au moment où il opte pour le célibat (à 17, 18, 19 ans) jette nécessairement la suspicion sur l’ensemble de sa vocation spirituelle. En aucune manière. Il peut effectivement y avoir eu au moment du choix des éléments d’angoisse, de culpabilité ou d’autres facteurs psychiques qui ne soient pas vraiment libres. Reconnaissons qu’aucune vocation n’est pleinement libre, motivée uniquement par l’amour de Dieu. A l’intérieur de toute décision humaine, il y a toujours une marge d’infantilisme et d’amour de Dieu. Mais une vocation se réinvente. Quand on découvre de l’infantilisme psychologique à l’intérieur d’une vocation au moment où la décision est prise, rien n’est dit finalement de la qualité de cette vocation. Tout reste à dire au moment où elle se réfléchit spirituellement.

La maturité psychologique pourrait se définir comme la capacité d’objectiver lucidement ses propres réactions par rapport aux autres de manière à prendre personnellement distance et à déterminer librement ses comportements. Elle est un long pèlerinage. Nous le savons tous.

Il ne sera guère ici question de l’itinéraire proprement spirituel, bien que cet itinéraire joue un rôle déterminant dans la maturation de l’affectivité et de la sexualité. Le point décisif est la manière dont l’homme est immédiatement affecté par Dieu : c’est là que se noue sa liberté. Mais nous nous plaçons avant tout ici au niveau de la relation à l’autre. Ce que nous décrirons sera d’abord la maturation psychologique d’une expérience spirituelle.

Trois types de relation à assumer

À l’intérieur de la vie d’un homme qui contracte mariage, c’est tout autre chose de découvrir la partenaire idéale, la jeune femme que l’on veut épouser pour fonder un foyer et de reconnaître dans cette jeune femme la mère de ses enfants [2]. Il s’agit, pour lui, dans les trois moments, de sensibilités et d’actes humains extrêmement différents. Chacune des étapes qu’il a ainsi à franchir met à vif toutes les phases antérieures de son évolution sexuelle et affective.

À l’intérieur de la vie d’un religieux, ces étapes ont d’une manière ou d’une autre à être traversées. Des nuances toutefois sont à apporter. D’une part, dire qu’il n’y a pas de maturation affective sexuelle si un religieux ne noue pas une relation d’affection avec une jeune fille à laquelle il aurait pu se fiancer, une relation d’amitié avec une jeune femme qu’il aurait pu épouser, voire aimer comme la mère de ses enfants, est une erreur. Elle consiste à mettre le facteur d’équilibre de l’affectivité à l’intérieur de la relation à l’autre sexe, alors que le célibat, en instituant le renoncement à cette relation, reconnaît le facteur d’équilibre dans la relation psychique immédiate à Dieu. Ce serait une erreur symétrique de considérer ce triple genre de rencontres comme une anormalité ou même toujours – et nous verrons plus en détail pourquoi – comme une reprise sur le vœu de célibat. L’intégration spirituelle de la sexualité ne se fait pas par bonnes intentions seulement, mais par un travail lent et difficile où tous les éléments du psychisme ont à être assumés d’une manière ou d’une autre. Plutôt que de parler d’étapes qu’il y aurait à franchir successivement, il est préférable de dire qu’il y a trois dimensions, trois types de relations possibles à assumer. Cela se passe en chaque homme de façon extrêmement diverse. On ne saurait trop souligner cette diversité de l’affectivité et de la sexualité de chacun. Dans l’hypothèse la meilleure d’un homme pleinement équilibré, les trois dimensions peuvent être vécues soit dans l’absence de rencontre, soit à l’intérieur d’une seule et même rencontre, soit dans des rencontres successives. La manière de vivre ces situations peut être extrêmement différente d’un homme à l’autre. L’un peut vivre par exemple l’absence de rencontre d’une manière douloureuse, à vif : au fur et à mesure de son cheminement, à travers des difficultés auto-érotiques considérables, il peut éprouver comme une certaine frustration le besoin de ces différentes relations. C’est en vain (frustra) qu’il désire. Non pas dans un sens péjoratif. Mais il éprouve vraiment dans sa chair et dans son cœur ce qu’il lui manque. Dans ce manque interprété à la lumière du Christ, se lit la vérité des relations. Cette souffrance peut être aussi révélatrice que les relations elles-mêmes.

Un autre vivra le manque de manière toute différente. Il y aura chez lui une sorte de progressive et lente montée de ces différentes dimensions : elles se trouveront intégrées spirituellement au fur et à mesure de leur apparition d’une manière aussi plénière que si le manque avait été mûri dans la souffrance.

Au cours de la description de ces différentes rencontres, il nous faudra être attentif à ce que chacune a de spécifique. Peut-être est-ce là le point le plus inaperçu. Faute de discerner de quel type de rencontre il s’agit, on use de critères totalement inadaptés à la situation vécue. Ce qui entraîne des difficultés, parfois majeures.

I. Premier type de rencontre : la jeune fille rêvée

La rencontre amoureuse d’une jeune fille n’est réservée ni à celui qui a le projet de s’engager dans l’état de mariage ni à celui qui est appelé à vouer le célibat. Il importe de le voir. Cette rencontre est la première expérience où l’affectivité et l’imaginaire s’éveillent vis-à-vis de l’autre sexe, mais elle n’est pas encore déterminément orientée soit vers le mariage, soit vers le célibat.

A. Spécificité

Une jeune fille est rencontrée à la fois comme complémentaire et comme celle avec laquelle il y a moyen de dialoguer. Les processus d’identification et de projection jouent à coup sûr. Jeune prêtre, quand un étudiant me parlait de la jeune fille qu’il connaissait, je lui demandais de me décrire son caractère et son tempérament. J’imaginais qu’à travers sa description pourrait m’apparaître si, en fait, il y avait quelque complémentarité entre lui et elle. C’était une illusion. La description qu’il me faisait était toujours celle de la jeune fille qui idéalement lui conviendrait. Je n’y trouvais par conséquent aucune matière à discernement.

Qu’est-ce que cela signifie ? Sinon que l’imagination, dans l’émoi amoureux, donne à l’homme non pas tellement de falsifier, mais de projeter dans l’autre l’idéal de son moi, de créer dans l’autre la complémentarité dont il a besoin.

Cette rencontre est d’abord source d’apaisement aux niveaux physique, sentimental, intellectuel et spirituel dans la mesure où elle est vécue avec une réelle profondeur. Mais l’apaisement est toujours et nécessairement transitoire, parce que seul ce qu’il y a de plus immédiat dans l’affectivité se trouve engagé. Dans cette « consolation sensible », les sentiments, qu’ils soient violents, doux, rapides, insinuants, ne concernent pas l’homme tout entier. Sa liberté reste intacte. Il a encore à se situer par rapport à cette rencontre. Il peut en faire la plus belle chose au monde ; soit y renoncer pour le Royaume, soit contracté mariage avec cette jeune fille. Il peut aussi en faire une chose malheureuse. Cette rencontre est une sorte de matériau offert à la vie et offert à la liberté.

Le caractère partiel de l’engagement fait que la paix est transitoire et précaire. Elle est suivie d’un trouble. Il est important au moment où un jeune homme annonce qu’il a rencontré une jeune fille qui lui apporte la paix, signe d’un univers immense, de respecter ce qui est en train de germer en lui. Mais il faut se préparer à ce que ce même garçon, un mois ou deux après, éprouve un trouble à cause de la même rencontre. La rencontre n’en est pas moins bonne. Le trouble ne signifie en aucune manière qu’il y a là de soi quelque chose d’immoral ou de peu prometteurs d’avenir. La paix et le trouble sont des éléments constitutifs de cette rencontre.

La dimension éveillée par cette rencontre est celle de l’érotique, de l’imaginaire, de l’affectivité. A ce niveau, les réactions vis-à-vis de la jeune fille que l’on aime sont différentes de celles vis-à-vis de toute autre jeune fille. La rencontre de la jeune fille aimée est purifiante, mais nécessairement, puisqu’elle concerne l’affectivité globale, elle suscite, vis-à-vis d’autres jeunes filles, et à l’occasion de films et de lectures également, tout un monde imaginaire et affectif où l’érotisme peut être très prégnant. On n’opère pas toujours le discernement. C’est une illusion d’imaginer que l’on échappe à l’érotique, en se « réfugiant » dans un monde où l’autre par la pureté, par le respect qu’il suppose, apporterait la « guérison » de la pulsion. En réalité l’on ne peut aimer sans que toutes les puissances affectives et donc sexuelles, et donc érotiques, soient éveillées. Le trouble se retrouve à un autre moment, dans d’autres types de relation ou d’activités. Le discernement doit s’opérer globalement : c’est dans la mesure où il y a une discipline de l’affectivité et de l’imaginaire dans l’ensemble du comportement, qu’il y a réellement possibilité de se situer vis-à-vis de l’autre, aimée. Sans quoi l’ambiguïté entre la paix et le trouble, constitutive de cette relation, devient si pénible et angoissante qu’il devient impossible de prendre position vis-à-vis de l’autre.

Ce qui caractérise cette situation, c’est que l’individu parle beaucoup de lui et qu’il est relativement peu attentif aux réactions de l’autre. Vous pouvez entendre parler quelqu’un un certain temps sur une rencontre de ce type sans qu’il ait même songé à évoquer la manière dont la jeune fille réagissait à son comportement [3]. Il n’y a pas de reproche à adresser à celui qui se trouve dans cette situation ; il y a à constater qu’à ce niveau où l’imaginaire est « pris », l’autre n’est ressaisi qu’à travers l’image prise de lui.

B. Critères

Le premier critère de discernement de la profondeur où s’engage cette relation est l’ attention à l’autre. Il s’agit de savoir si on aime pour soi ou non.

Dans ce genre de relation où j’éprouve comme venant de l’autre la gratification d’une paix qui me permet de surmonter le trouble qu’il éveille, il y a comme un besoin de l’autre, besoin de son appui, besoin de sa « consolation ». L’autre est celui qui donne un équilibre, qui donne d’échapper à l’isolement physique et psychologique. Dans la mesure cependant où la relation, au niveau imaginaire et affectif, conduit à une maturation de la sexualité, le second critère de discernement passe par l’exigence de la gratuité. Si je vis en fonction du besoin que j’ai de l’autre, si je vis de manière à m’appuyer sur lui, à trouver ma consolation en lui, il est bien sûr que se noue une relation dans laquelle l’autre, indépendamment de sa réaction propre, devient la référence de ma vie.

Éprouver ce besoin de l’autre, chercher cet appui, cette consolation est une réalité humaine fondamentale. Mais voici le point : ce besoin de l’autre est-il vécu dans la gratuité ou bien est-il déterminant de ma relation ? Vécu dans la gratuité, je n’ai pas d’exigence à poser à l’autre. Déterminant de ma relation, je vis en fonction de ce que l’autre me donne, mes humeurs sont déterminées par ses réactions, et par le fait même, je me découvre des exigences sur l’autre.

L’attention à l’autre ne suffit en aucune manière à déterminer le comportement de quelqu’un qui s’engage dans le célibat. Car ce critère premier vaut de toute maturation sexuelle. La gratuité pure, qui ne se reconnaît aucun droit, pas même celui de proposer une attente, est, de plus, indispensable à qui veut discerner son engagement dans le célibat et lui rester fidèle.

Un religieux qui fait ce type de rencontre et l’éprouve dans sa vérité, peut en intégrer la réalité la plus profonde comme éducation de l’affectivité à la délicatesse. Mais n’y a-t-il pas dans cette rencontre une reprise du vœu de célibat ? La question est complexe et traitée souvent d’une manière forte leste. Il suffit qu’un religieux rencontre une jeune fille pour que les langues se délient automatiquement. C’est le signe d’une jalousie qui ne se connaît pas, d’un manque de liberté spirituelle et affective, d’un manque de respect pour l’un et pour l’autre. Certes, personne n’est parfaitement intégré spirituellement et nous sommes tous pécheurs. Mais la rencontre comme telle n’est pas un péché et ne constitue nullement une reprise du vœu de célibat. Elle peut signifier deux choses très opposées selon qu’elle est vécue dans une volonté profonde de fidélité à Dieu et à l’engagement que l’on a voué, ou selon qu’elle est déterminée par l’hésitation.

Le jeune religieux qui se trouve engagé dans une rencontre de ce type a presque toujours le sentiment d’une infidélité. Ce sentiment est en partie vrai, en partie erroné. La rencontre comme telle n’est pas infidélité. Mais pour le tranquilliser, il ne faut pas tomber dans l’excès contraire et le convaincre que dans cette part spéciale de sa vie, comme dans une oasis, il n’y aurait aucune infidélité. Dans la mesure où la rencontre polarise l’affectivité, elle ne signifie pas un recul, une reprise du célibat, mais elle révèle l’emprise encore partielle de la consécration à Dieu en cet individu comme en tout homme.

C. Prière

À ce niveau, il y a une forme de prière spécifique : la prière de demande. Dans la mesure où il s’agit de cette affectivité et de cet imaginaire où l’homme a besoin de consolation et d’appui, la consolation et l’appui que Dieu donne peuvent venir par l’autre si la relation est vécue dans l’attention à l’autre et dans la gratuité, non pas si elle est conditionnée par l’autre. Mais de toute façon pour pouvoir vivre de l’intérieur cet accueil d’autrui et ce don qu’autrui fait, pour pouvoir les vivre comme un don de Dieu, il faut que le centre de gravité, le point d’équilibre soit Dieu lui-même, immédiatement présent au cœur de l’homme.

Nous sommes des êtres incarnés, et donc il faut qu’au niveau affectif, Dieu soit effectivement éprouvé comme consolation ou désolation. Certains psychologues ou psychanalystes verront là une réalité infantile. A raison si Dieu est seulement le Dieu à qui j’adresse une prière de demande, s’il est seulement celui qui est capable de me consoler sensiblement, de me donner un équilibre, celui sur qui je m’appuie. A tort, car Dieu est aussi cela ; sans quoi, toute une dimension de mon être ne serait pas pénétrée par Dieu, la dimension archaïque de mon psychisme ne serait pas réconciliée. En d’autres termes, Dieu ne peut pas être réduit à celui qui donne une consolation. Mais « interdire à Dieu » sous prétexte de pureté spirituelle, d’être celui qui « console » le cœur de l’homme, c’est ne pas voir comment Dieu est intimement présent au destin affectif d’un être humain.

En réalité, la possibilité de vivre la relation à l’autre dans la gratuité est liée à l’expérience de Dieu comme celui qui console. L’expression : « Dieu qui console », sous-entend l’expression complémentaire : « Dieu qui désole » ; en un mot, Dieu est sensible au cœur. Sa présence est ressentie comme un plein ou comme une absence. Dieu touche affectivement le cœur de l’homme, mais il peut le toucher soit comme consolation, soit comme celui en qui on voudrait trouver son appui et qui se trouve éprouvé comme un manque. Toutes les expériences spirituelles des mystiques en témoignent. Il est décisif que Dieu soit éprouvé comme celui qui touche l’homme en son affectivité.

D. Le fruit

Le fruit que donne ce premier type de relation est la délicatesse de l’affectivité : attention à l’autre en même temps que gratuité, refus de capter l’attention sur soi.

(À suivre)

Rue du Collège Saint-Michel 60
B-1150 BRUXELLES, Belgique

[1Ces pages forment un tout avec celles que nous publierons dans le prochain numéro.

[2Le second et le troisième types d’expérience ne vont pas de soi. Ils sont très contestés à l’heure actuelle en théorie et en pratique par toute une couche de la population. On constate ici simplement le fait que le renoncement au désir de fonder un foyer et d’avoir des enfants fait intrinsèquement partie de la maturation de la sexualité dans le célibat consacré.

[3Les réactions de l’autre ne sont jamais les nôtres. Ceci est dû à la différence de sexe, d’âge, de culture, de vitalité humaine et de vitalité spirituelle. De plus un nombre considérable de facteurs rendent difficile de voir comment l’autre effectivement réagit.

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