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Un exercice du sacerdoce des fidèles

L’Apostolat de la Prière

Émile Bergh, s.j.

N°1968-4 Juillet 1968

| P. 243-245 |

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L’on se propose dans cette note d’attirer l’attention des consacrés sur une manifestation toute récente du renouveau concilaire, manifestation très adaptée à leur genre de vie.

Le mouvement spirituel, connu depuis plus d’un siècle [1] sous le titre L’Apostolat de la Prière a obtenu du Saint-Siège, le 27 mars 1968, l’approbation de statuts nouveaux [2], inspirés des idées du Concile Vatican II.

Après un prologue qui affirme ce rapport, les Statuts présentent l’Apostolat de la Prière comme étant une des formes de réalisation de la vocation universelle des baptisés à l’apostolat :

Tous les fidèles par le baptême participent à l’office sacerdotal, royal et prophétique du Christ et sont députés par le Seigneur à l’activité apostolique propre à leur vocation. Au sein de cet appel apostolique universel, l’Apostolat de la Prière est une association de fidèles qui, par l’offrande quotidienne d’eux-mêmes, s’unissent au sacrifice eucharistique dans lequel l’œuvre de notre rédemption s’exerce sans cesse ; ainsi par une union vitale au Christ, d’où dépend la fécondité de l’apostolat, ils coopèrent au salut du monde.

Le Concile a mis en pleine lumière la participation de tous les baptisés au sacerdoce du Christ [3].

Par le sacerdoce royal qui est le leur, ils concourent à l’offrande de l’Eucharistie ; ils exercent ce sacerdoce par la réception des sacrements, l’oraison, l’action de grâces, le témoignage d’une vie sainte, l’abnégation et la charité effective.

Il n’est pas douteux que l’idée fondamentale de l’Apostolat de la Prière depuis ses origines – savoir l’offrande quotidienne des prières et des travaux, des souffrances et des joies en union à l’oblation incessante du Christ dans l’Eucharistie – trouve une singulière confirmation dans la doctrine du Concile sur le sacerdoce des fidèles.

L’Apostolat de la Prière met une note caractéristique à son esprit d’offrande : il le veut inspiré par une relation personnelle d’amour pour le Cœur de Jésus. Nous y reviendrons dans un instant.

Les Statuts décrivent ensuite le programme de vie spirituelle proposé aux membres. Rien que ce terme de « programme de vie » est très significatif et montre qu’il s’agit de bien plus que la simple récitation quotidienne d’une formule d’offrande. Le programme comporte cinq points [4] :

1) Le sacrifice de la messe avec l’oblation quotidienne.

Comme le sacrifice eucharistique est la source et le sommet de l’évangélisation, d’où émane toute la force d’action de l’Église, il est nécessaire que la spiritualité des fidèles soit déterminée par le mystère eucharistique, qu’elle pénètre leur vie, les forme et les conduise à une participation consciente et vitale à ce mystère.

L’oblation quotidienne demandée par l’Apostolat de la Prière est l’expression authentique de la participation consciente au sacrifice.

Les Statuts citent largement à ce propos Lumen Gentium, dans le passage du chapitre des laïcs (III, n. 34) qui traite « du culte spirituel », de « la consécration du monde à Dieu » à réaliser dans toutes les situations d’une vie d’homme, en référence à la célébration eucharistique.

L’oblation spirituelle, dans laquelle s’exprime le sacerdoce commun des baptisés, est en même temps, nous disent les Statuts, un exercice de leur charge prophétique, obligés qu’ils sont de témoigner de la vérité par leur vie, leur charité, leur travail, leur activité apostolique. Ce témoignage d’une vie entièrement inspirée par la foi, l’espérance, la charité est l’aliment primordial, la condition irremplaçable de tout apostolat.

2) Dès sa période vraiment constitutive, sous la direction du P. Ramière (1855-1884) l’Apostolat de la Prière s’est présenté comme une forme excellente du culte du Cœur de Jésus. Les statuts de 1951 s’exprimaient très clairement à ce sujet [5]. Les nouveaux Statuts inscrivent au programme de vie spirituelle des membres le culte ou la spiritualité du Sacré-Cœur de Jésus, ce qui nous paraît devoir s’entendre de « la connaissance, du culte, de l’amour du Divin Sauveur » [6]. La raison de cette très étroite connexion entre le Cœur de Jésus et l’Apostolat de la Prière c’est l’amour qui s’exprime dans le sacerdoce du Christ et dans notre vocation à participer à ce sacerdoce. C’est aussi le fait que le mystère eucharistique est un témoignage éclatant de l’amour de Jésus, amour symbolisé par son Cœur. Notre réponse doit se traduire dans la consécration, la réparation, la charité pour nos frères.

3) Les membres de l’Apostolat de la Prière trouveront en Marie, Mère de l’Église, étroitement unie à l’œuvre de la Rédemption, un modèle de l’esprit d’offrande et une Médiatrice qui les conduira au Sauveur. Ils l’honoreront par le chapelet, ou au moins par une dizaine de celui-ci. Ils s’attacheront particulièrement à son culte liturgique.

4) Pour une collaboration plus intense à l’œuvre du salut, l’Apostolat de la Prière demande à ses membres une étroite communion de pensées et de vouloirs avec l’Église. De là le sens des intentions mensuelles proposées par le Saint-Père ; le sens aussi de la collaboration aux intentions apostoliques des évêques.

5) L’Apostolat de la Prière contient en lui une invitation à une vie de prière sous les formes multiples que cette vie peut revêtir. Dans les nécessités actuelles du monde, la prière salvatrice s’impose. Lecture et méditation de l’Écriture Sainte, oraison mentale et prières vocales diverses, récollections et retraites sont autant de réponses à l’ordre du Maître de prier toujours sans se décourager (cf. Lc 18,1).

L’Apostolat de la Prière est né le 3 décembre 1844 dans un scolasticat de religieux aspirant aux missions. Soucieux d’être apôtres dès le temps de leurs études, ils s’entendirent pour offrir collectivement leurs prières, leurs travaux, leurs souffrances aux intentions du Règne de Dieu.

Quand le mouvement déborda de la maison de Vals (près Le Puy) ce furent des communautés religieuses qui constituèrent pratiquement, pendant les quinze premières années, tout l’Apostolat de la prière. Les Statuts de 1866 déclaraient : « Les communautés religieuses, à qui revient la première place dans cette pieuse association, sont spécialement invitées à en faire partie ». Ainsi depuis 125 ans un millier d’Ordres ou de Congrégations, de monastères ou de communautés de 37 pays se sont expressément affiliés à l’œuvre. Faut-il s’en étonner puisque l’offrande de soi en réponse à l’amour de Jésus est la note la plus caractéristique de la vie religieuse ? Se tromperait-on en pensant que le renouveau actuel de nos communautés pourrait trouver une aide puissante dans les principes directeurs de l’Apostolat : union au Christ dans son offrande liturgique, consécration spéciale à son amour, dévouement à l’Église et à sa mission universelle. Les Statuts de l’Apostolat de la Prière renouvelés selon Vatican II [7] suggèrent des rapprochements avec Perfectae caritatis [8].

St.-Jansbergsteenweg, 95
Leuven (Belgique)

[1On trouvera des renseignements historiques sur le développement de cette œuvre et ses rapports avec la vie religieuse dans G. Gilleman, S. J., « Le centenaire de l’Apostolat de la Prière (3 déc. 1844-1944) », Rev. des comm. rel., 1945, pp. 43-49.

[2Les statuts de l’œuvre, fidèles à l’idée initiale, ont été mis au point à diverses époques. Leur dernière forme remontait à 1951. Cf. Rev. des com. rel., 1952, pp. 19-26.

[3Lumen Gentium, nn. 10, 11, 34 ; décret sur l’Apostolat des laïcs, n. 5.

[4Cette présentation nous paraît plus organique que celle des Statuts de 1951, où l’on proposait trois degrés ou pratiques : l’offrande quotidienne, le sacrifice de la messe et la communion réparatrice, la dévotion mariale et ensuite les divers exercices de la dévotion au Sacré-Cœur.

[5On y reprenait cette phrase de Pie XII dans une lettre au T.R.P. Général de la Compagnie de Jésus, du 19 septembre 1948 : « L’on peut dire à bon droit que l’Apostolat de la Prière est la forme parfaite de la piété envers le Sacré-Cœur de Jésus et inversement que la piété envers le Divin Cœur de Jésus est tout à fait inséparable de l’Apostolat de la Prière ».

[6Lettre du Cardinal H. J. Cicognani du 27 mars 1968 accompagnant l’approbation des Statuts. Dans ce document est exprimée la particulière satisfaction de S.S. Paul VI pour l’esprit de participation au mystère eucharistique qui caractérise l’Apostolat de la Prière et pour la très grande importance qu’il accorde au culte du Sacré-Cœur. Le Pape souhaite vivement voir s’accroître le nombre de ceux qui s’unissent à ce mouvement. Il leur recommande spécialement le culte du Saint-Esprit et la participation active à la liturgie.

[7On peut en obtenir le texte intégral au Secrétariat Général de l’Apostolat de la Prière 5 Borgo Santo Spirito, 00100 Roma, ou dans les Secrétariats nationaux.

[8Cf. Perfectae caritatis nn. 2, c et d ; 6 ; 11 ; 15 ; 25.

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