Stades de formation
Orientations officielles
Vies Consacrées
N°1967-4 • Juillet 1967
| P. 240-245 |
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Nous reproduisons ici un document que la S. Congrégation des Religieux a rédigé à l’intention des Supérieures générales à l’occasion de l’Assemblée de mars dernier à Rome. Ce sont des directives qui peuvent guider le travail des Chapitres spéciaux sur l’importante question d’une formation progressive et intégrale.
Avant la discussion par l’Assemblée générale de l’U. I. S. G. des problèmes de formation qui se posent dans les Instituts religieux féminins, la S. Congrégation des Religieux voudrait venir en aide aux Supérieures Générales présentes en leur faisant part de ses expériences et de ses orientations nouvelles au sujet du postulat et du noviciat.
I. Postulat
Aux termes des canons 539 et 540, dans les Instituts féminins, avant le noviciat, six mois au moins et un an au plus doivent être consacrés à un « postulat », soit dans le noviciat, soit dans une autre maison de vie régulière, sous la conduite spirituelle d’une maîtresse.
Dans la plupart des Instituts, le postulat est conçu purement et simplement comme une partie du noviciat, avec cette unique ou presque unique différence que les postulantes ne portent pas encore l’habit des novices. En pratique, le postulat ne fait que prolonger le noviciat de six mois ou plus.
Ceci étant, beaucoup d’instituts ont demandé d’instituer un « pré-postulat » qui mette les « aspirantes » en contact avec la vie réelle, apostolique, de l’Institut et qui, pour cela, se fasse dans des maisons où les œuvres sont en pleine activité. De la sorte, d’une part, les « aspirantes » entrent au postulat en connaissant la vie qu’elles devront mener quand elles seront professes de vœux perpétuels et, d’autre part, les Supérieures peuvent constater sur le vif que ces jeunes ont bien les qualités requises pour cette vie. Ainsi conçu, le « pré-postulat » se propose ce que le postulat aurait dû être : un temps de probation de la vocation dans les œuvres, avant la vêture et le noviciat.
Ne vaudrait-il pas mieux « reconsidérer » le postulat lui-même ? C’est ce que la S. Congrégation des Religieux a pensé.
Désormais, c’est le postulat qui pourra être conçu comme une période d’épreuve de la vocation dans les œuvres de l’Institut, tout en restant un temps d’initiation spirituelle et religieuse comme il l’est actuellement. Ce postulat n’en constituera pas moins un groupe distinct – le « postulat » – sous la conduite spirituelle d’une maîtresse et durera de six mois à un an, comme le demandent les canons 539 et 540. Naturellement, la durée du postulat pourra être prolongée pour tel ou tel cas.
Puisqu’il ne s’agit pas d’une « expérience contre le droit commun », les Chapitres Généraux spéciaux pourront donc concevoir désormais le postulat de cette façon, sans avoir besoin d’en demander l’autorisation à la S. Congrégation des Religieux.
II. Vêture
Trop souvent, pour les familles et même pour bien des sœurs, la prise d’habit a plus d’importance que la profession. Et il faut bien dire que, dans beaucoup d’instituts, la cérémonie de la première est plus solennelle que celle de la seconde.
La mise en valeur de la consécration religieuse par le Concile invite à un « aggiornamento » dans les cérémonies de vêture et de profession.
Le « Consilium » pour l’exécution de la Constitution sur la S. Liturgie est en train de mettre au point un cérémonial de profession religieuse.
Quant à la prise d’habit, la S. Congrégation des Religieux est d’avis, qu’elle devrait être réduite à une cérémonie interne, dans l’oratoire du noviciat ou à la chapelle, mais sans la présence de la famille et sans autorités ecclésiastiques, et surtout sans solennité.
III. Année canonique de noviciat
Il convient de conserver au noviciat canonique son caractère d’année de formation spirituelle et religieuse. Le canon 565 résume en quelques lignes une tradition qui remonte à saint Benoît et qui, après être devenue d’Église au Concile de Trente, a inspiré les noviciats de tous les Instituts, qu’ils soient enseignants, hospitaliers ou missionnaires : initiation à la vie de prière, éducation des vertus religieuses, étude des Constitutions, sous la direction d’une maîtresse des novices.
Depuis plusieurs années, l’« aggiornamento » de ce programme a déjà été entrepris dans la plupart des Instituts, mais il devra être perfectionné à la lumière du décret Perfectae Caritatis et du Motu proprio Ecclesiae Sanctae : lecture de la Sainte Écriture, étude de la théologie de la vie religieuse, connaissance de la vie et de l’esprit des fondateurs, formation à l’esprit apostolique de l’Institut (cf. Ecclesiae Sanctae, n. 16). En outre, il faudra adapter le noviciat au genre de vie et à la spiritualité de chaque Institut (cf. Ecclesiae Sanctae, n. 33).
Cependant le noviciat devra rester une année exclusivement consacrée à cette formation religieuse et spirituelle et constituer, comme par le passé, un « groupe séparé », ainsi que le demande le canon 564. Ceci est la condition « sine qua non » de la raison d’être du noviciat : « changer le vieil homme dans le nouveau » – c’est la signification traditionnelle de la vêture – et apprendre les rudiments de la « science des saints ». Pour opérer cette transformation profonde, une année n’est pas de trop et, si elle est bâclée ou interrompue, elle ne pourra normalement plus être reprise : comme disait Pie XI, mal faire son noviciat, c’est bâtir sur le sable...
La S. Congrégation des Religieux est donc contraire à l’introduction, pendant l’année de noviciat, d’une période quelconque (certains pensaient à un ou deux mois) d’apostolat, soit en quittant le noviciat, soit en y restant, même si le temps du noviciat était prolongé d’autant. Nous verrons tout à l’heure qu’on pourrait envoyer l’une ou l’autre novice ou même toutes les novices dans une maison d’œuvres, une fois terminée l’année canonique de noviciat. Mais il ne saurait être question d’interrompre celle-ci.
Ajoutons qu’une telle période d’exercices pratiques dans les œuvres ne s’impose pas pendant le noviciat, puisqu’elle est prévue pendant le juniorat par le Motu proprio Ecclesiae Sanctae, n. 36, et puisque le postulat est maintenant conçu comme un temps d’épreuve dans une maison d’apostolat.
Bien entendu, pendant l’année canonique de noviciat, il n’est pas interdit et il peut même être recommandé de prévoir des contacts entre les novices et les malades ou les vieillards dans les Instituts hospitaliers ou avec les enfants chez les religieuses enseignantes, mais à titre de détente et nullement en vue de les former à l’apostolat.
IV. Interruption du noviciat
En attendant la révision du Code de Droit Canonique, la S. Congrégation des Religieux accordera « volontiers » à un Institut qui le lui demandera comme « expérience contraire au droit commun » (Ecclesiae Sanctae, n. 6) qu’une novice qui aurait interrompu son noviciat de plus de trente jours pour une raison personnelle (santé par exemple) n’ait pas à refaire l’année canonique, comme l’exige le canon 556, § 2, mais qu’elle puisse suppléer aux jours d’absence, si ceux-ci n’excèdent pas deux mois.
V. Deuxième année de noviciat
Avec un postulat conçu comme une épreuve de la vocation dans les œuvres et un juniorat consacré à la formation apostolique, théorique et pratique, la deuxième année de noviciat n’a plus la même importance qu’autrefois.
Aussi la S. Congrégation des Religieux a-t-elle conçu l’« aggiornamento » suivant :
- Au lieu d’une « deuxième année » qui oblige toutes les novices de l’institut à faire une année complète après l’année canonique, la prolongation de celle-ci sera de plus ou moins longue durée (d’un mois à un an, et peut-être même plus, exceptionnellement) pour chaque novice, au jugement des supérieures responsables et même, pourquoi pas, sur le désir de la novice elle-même.
- Cette prolongation aura lieu, soit au noviciat, sans changement de genre de vie (ceci surtout pour des novices insuffisamment mûres, soit parce qu’entrées trop jeunes, soit parce que trop récemment converties), soit au juniorat (avec possibilité de commencer les études comme si la novice était junior), soit dans une maison d’œuvres (autant que possible avec d’autres novices se trouvant dans le même cas et toujours sous la conduite d’une religieuse responsable de la formation spirituelle). Chaque fois qu’une novice sera ainsi envoyée hors du noviciat, elle devra y être rappelée un ou deux mois avant sa profession.
Il ne s’agit plus dans ce cas d’une « deuxième année de noviciat » aux termes de l’Instruction de la S. Congrégation des Religieux de 1921, mais d’une prolongation du noviciat, destinée à écarter un doute encore subsistant sur la vocation d’une novice en la mettant à l’épreuve dans un autre milieu que celui du noviciat ou du juniorat, ou en complétant à l’intérieur du noviciat une formation religieuse et spirituelle insuffisante.
Bien entendu, les Instituts qui voudront conserver la « deuxième année » pourront le faire, soit telle qu’elle existe actuellement, soit avec plus de souplesse. Enfin, un Institut qui le désire pourra décider qu’après l’année canonique, toutes les novices, constituées en groupe sous la conduite d’une maîtresse responsable, passeront deux ou trois mois, ou même plus, dans une de ses maisons d’œuvres, à charge de rentrer au noviciat un mois avant leur profession.
Ces différentes façons de concevoir la prolongation du noviciat canonique pourront être étudiées par le Chapitre Général spécial et celle qui sera retenue pourra être introduite « ad experimentum » sans qu’il soit besoin de recourir à la S. Congrégation des Religieux.
VI. Première profession et vœux temporaires
I. Temps et lieu de la première profession
Lorsque le noviciat est terminé, avec toutes les modalités de prolongation envisagées ci-dessus, la novice est admise à prononcer ses vœux temporaires pour la première fois.
La S. Congrégation des Religieux est disposée à accorder sans difficulté aux Instituts qui le lui demanderont comme expériences contraires aux canons 555, § 1, 2°, et 574, § 1, que la première profession puisse se faire au jour anniversaire de la prise d’habit (et non plus le lendemain) et hors de la maison du noviciat, au besoin même hors d’une maison de l’Institut, par exemple dans une église paroissiale.
2. Durée des vœux temporaires
Dans l’état actuel de la jurisprudence, la durée des vœux temporaires est le plus souvent de cinq ans [1] et se divise en deux tranches au moins, de trois et deux ans ou de deux et trois ans, ou encore en tranches d’une année. Il est toujours possible, sans autorisation préalable du Saint-Siège, de prolonger les vœux temporaires d’une sixième année (can. 574, § 2).
Certains Instituts ont demandé et obtenu « ad experimentum » de porter à sept ans les vœux temporaires, faisant valoir qu’ils sont imposés par la formation à donner au juniorat : trois ans de formation professionnelle (diplômes d’enseignement, d’infirmières ou d’assistantes sociales), un an d’apprentissage pratique de la vie dans les œuvres de l’Institut et deux ans de formation théologique avec la préparation à la profession perpétuelle.
Cependant, cette prolongation n’est pas absolument requise, car la formation des jeunes sœurs pourrait être achevée après la profession perpétuelle et, par conséquent, en dehors des cadres du juniorat, comme il en est de la formation cléricale dans les Instituts religieux masculins : les jeunes religieux clercs font leur profession perpétuelle un, deux ou même trois ans avant d’avoir terminé leurs études théologiques et d’être ordonnés prêtres.
D’autres Instituts, à dire vrai peu nombreux, ont demandé de réduire à trois ans la durée obligatoire des vœux temporaires avec la possibilité de prolongation jusqu’à trois ans, pour les jeunes professes qui en auraient besoin. C’était solliciter le retour pur et simple au canon 574, § 2. La S. Congrégation des Religieux n’a pas cru pouvoir l’accorder, sachant par son expérience acquise auprès de milliers de Supérieures Générales que cinq ans sont vraiment nécessaires pour la plus grande majorité des cas.
Quelques Supérieures Générales ont alors demandé si, tout en maintenant normalement cinq ans, elles ne pourraient pas obtenir la faculté de dispenser d’un ou deux ans, voire même de plus, les jeunes professes qui sont particulièrement bien formées. La S. Congrégation des Religieux s’y est toujours refusée, tant pour éviter que les sœurs dispensées ne se croient meilleures que les autres, que pour empêcher que des Supérieures Majeures, harcelées par le besoin de personnel, n’en viennent à dispenser trop facilement de quelques années de formation des sœurs qui en auraient peut-être plus besoin qu’il ne semble.
La S. Congrégation des Religieux pense donc préférable de maintenir fixée à cinq ans la durée des vœux temporaires dans les Instituts féminins, avec la possibilité de prolonger d’un an sans permission spéciale du Saint-Siège. En outre, elle accordera bien volontiers, aux Instituts qui le lui demanderont à titre d’« expérience contraire au droit commun », la faculté pour la Supérieure Générale de prolonger encore la durée des vœux temporaires, mais pas au-delà de deux ans, ce qui porterait le total de la prolongation maxima à deux ou, exceptionnellement, à trois ans.
Dans l’appréciation de toutes les données de ce problème de la durée des vœux temporaires, il faut que les Supérieures Générales considèrent aussi la difficulté de plus en plus grande qu’il y a de refuser à une jeune religieuse de faire profession perpétuelle à mesure que les années passent. C’est une question de charité, voire même de justice, vis-à-vis d’elle de ne pas lui faire renouveler ses vœux si l’on garde des doutes sérieux sur son admissibilité à la profession perpétuelle : il est très rare que le temps arrange les choses et l’on finit souvent par admettre la sœur à la profession perpétuelle faute de pouvoir la reclasser dans le monde !
[1] On sait que le Code ne demande que trois ans (c. 574, § 1).