Renouveau des retraites
Vies Consacrées
N°1967-4 • Juillet 1967
| P. 234-237 |
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La note suivante a été rédigée par des Pères Jésuites de France réunis en session en vue de repenser et d’améliorer leur ministère auprès des Religieuses. Sa portée est volontairement limitée à la seule question des retraites.
I. Nature de la retraite
1. Ce qu’elle n’est pas
Elle n’est ni une session spirituelle sur des sujets de vie religieuse, ni une recherche intellectuelle – même si elle rappelle à l’occasion quelque élément de théologie spirituelle ou précise le sens de certains passages de l’Écriture – ni une audition passive de quelques sermons émouvants.
2. Ce qu’elle est
Elle doit être faite activement par chacune.
Elle propose à la communauté des retraitantes de réfléchir sur les réalités essentielles de la vie religieuse, et de les goûter dans une assimilation personnelle, au service du Christ dans l’Église.
Essentiellement, elle aide à trouver Dieu, à écouter, à se rendre disponible en tout à sa volonté.
Elle incite à pénétrer dans une expérience spirituelle dont les grandes lignes sont les suivantes : Dieu trinitaire crée le monde et le sauve sans cesse.
Ce salut, promis dans l’Ancien Testament, et réalisé en Jésus-Christ par l’Esprit Saint, selon la volonté du Père, dans le Nouveau Testament, est à méditer assidûment.
Il faut se mettre à la suite du Christ, progresser dans la connaissance unitive de son amour, sous la conduite du Saint-Esprit, en se rendant responsable personnellement de l’œuvre du Royaume dans l’Église.
Autrement dit, il s’agit d’approfondir dans la prière sa relation personnelle au Christ, à l’intérieur de sa consécration religieuse dans l’Église.
II. Quelques points de liberté extérieure
1. Le nombre optimum des retraitantes se situe aux environs de trente. On pourrait l’atteindre au besoin en ouvrant parfois la retraite à des religieuses d’une autre Congrégation. Si ce nombre était beaucoup plus grand, il ne permettrait plus aux retraitantes de voir le Père aussi facilement, quand elles le désireraient.
Pourtant, comme les Congrégations dont les membres sont nombreux ne peuvent multiplier indéfiniment les retraites, on suggère qu’elles ménagent chaque année une ou plusieurs retraites d’une trentaine de participantes, où les religieuses pourraient venir à tour de rôle, ayant ainsi l’occasion d’une véritable expérience spirituelle, première ou renouvelée.
Il serait bon que le prédicateur chargé de nombreuses retraitantes soit très aidé pour les confessions et puisse consacrer un temps suffisant à la direction.
2. Les retraitantes devraient arriver reposées à la retraite, autant qu’il est possible.
3. Le cadre extérieur a son importance.
L’idéal serait que chacune ait sa chambre personnelle, tout au moins un endroit où se recueillir hors d’une salle commune.
Un jardin serait fort utile pour la détente, car les récréations se passent en silence. Il arrive que des Congrégations moins favorisées soient reçues chez d’autres, qui sont plus au large.
Les religieuses disposeront de tables dans la salle des « instructions », afin d’être à l’aise pour prendre des notes au besoin.
Les repas en silence seraient utilement accompagnés de lecture adaptée ou de musique bien choisie, qui peuvent être enregistrées sur bandes ou disques.
Les retraitantes pourraient disposer librement de livres spirituels adaptés aux besoins de la retraite.
4. Emploi du temps.
Il faut à tout prix ménager de bons temps de prière personnelle, comme aussi un large repos : lever retardé, sieste. (Le temps consacré au repos ne fait pas obstacle au travail intérieur de la retraite.) Aussi peut-on être amené à placer la sainte messe en fin de matinée.
S’il ne convient pas que le prédicateur soit mis devant un programme-horaire affiché d’avance, sans qu’il ait pu donner son avis, par contre il devrait entendre favorablement les suggestions qu’on lui ferait à ce sujet.
Les « instructions » (ou points de méditations) ont pour but de conduire à la prière personnelle : cela suppose qu’elles sont immédiatement suivies d’un temps d’oraison.
Un souci des Supérieures sera d’assurer, dans la mesure du possible, une certaine homogénéité de l’auditoire, par exemple : maturité religieuse analogue, même genre d’occupation des Sœurs.
Tout le temps est consacré à la retraite. Il faudrait donc décharger les retraitantes de tout travail professionnel ; alléger au besoin les exercices de piété et de règle, laisser totalement la parole au prédicateur, en évitant les instructions supplémentaires ou conférences données par d’autres.
5. Les retraitantes doivent avoir la totale liberté de converser avec le prédicateur sans avoir à demander de permission, au moins aux heures fixées par lui.
Le lieu de ces entretiens devrait être pratique et discret.
III. Liberté intérieure
1. Lorsque plusieurs retraites sont prévues dans une même Congrégation, les religieuses pourraient en connaître d’avance les dates et qui les dirigera, afin de pouvoir en parler à leur Supérieure et choisir éventuellement l’une plutôt que l’autre.
2. Une retraite en groupe ne facilite pas habituellement la pacification d’une religieuse en crise spirituelle ou psychologique. En pareil cas une retraite individuelle est souvent préférable.
3. Il serait préférable de ne pas faire coïncider l’annonce des obédiences et le temps de la retraite, pour que l’incertitude de la situation n’enlève pas la paix aux âmes. En cas de coïncidence inévitable, et dans la mesure où ce serait possible, mieux vaudrait donner l’obédience avant la retraite, afin que la religieuse puisse la mieux accepter dans le Seigneur.
4. Un contact trop administratif avec la Supérieure majeure durant la retraite n’est pas à conseiller.
5. Il serait nécessaire que d’autres prêtres que le prédicateur puissent venir au temps de la retraite pour maintenir la liberté dans le choix du confesseur.
IV. Souhaits
Les Supérieures peuvent légitimement souhaiter que les prédicateurs qui se suivent pour donner les retraites annuelles s’entendent avec elles pour assurer une véritable unité dans la formation spirituelle.
Cette unité est surtout souhaitable dans les ministères auprès des novices et des jeunes religieuses.
Conclusion
En bref voici les points les plus importants des mesures souhaitées :
- Le libre contact des retraitantes avec le prédicateur.
- L’absence de travail professionnel, pour que toutes les retraitantes participent vraiment aux exercices spirituels.
- La possibilité pour chacune d’avoir une cellule ou au moins un lieu pour se recueillir dans la solitude.
- Le dégagement des soucis d’obédience et de formalités administratives.
Ces points traduisent un esprit et permettent le contact transformant de la retraitante avec le Seigneur, ce qui est le vrai but de la retraite.
N.B. – Ces conditions, normalement souhaitables, s’imposent absolument dès qu’il s’agit des « Grands Exercices » de saint Ignace, de 20 à 30 jours.
Il importe alors de s’assurer chez les sujets d’un minimum d’homogénéité et de capacité spirituelle, pour leur permettre de faire avec profit la « Grande Retraite ».
Préliminaires et conclusion d’une retraite
Certains prédicateurs souhaitent que la retraite s’ouvre par une journée, incluse ou non dans le temps de la retraite, qui soit entièrement consacrée à une préparation familière et détendue, transition entre la vie de travail et l’expérience des exercices spirituels.
Le Père et les retraitantes font connaissance dans la prière communautaire, les échanges de vue et la mise en commun des espérances fondées sur la retraite qui va commencer. Ainsi se fait ou se renforce l’union des âmes entre les participantes.
Les Supérieures pourraient, selon les désirs et les besoins de leur communauté, s’entendre avec le Père sur l’utilité et les modalités de cette journée préparatoire, afin d’établir les religieuses dans les conditions les meilleures pour le moment de l’ouverture. Le plan serait établi d’avance après entente mutuelle.
Dans le même ordre d’idées de rassemblement spirituel, certains souhaitent que les exercices s’achèvent par une mise en commun de ce que l’on a découvert ou mieux compris au cours de la retraite. Prévue et désirée par les membres de cette communauté qu’a visitée le Seigneur et vivifiée son Esprit, cette dernière rencontre s’est souvent montrée bienfaisante.