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Le régime de clôture

Possibilités actuelles et futures

Alfred de Bonhome, s.j.

N°1967-3 Mai 1967

| P. 177-186 |

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Nous nous proposons de passer en revue l’évolution récente de la législation en matière de clôture, afin que les diverses catégories d’instituts religieux puissent se rendre compte des cadres à partir desquels ils ont à adapter leur séparation du monde. Nous formulerons aussi des souhaits concernant l’évolution du droit en cette matière.

I. La clôture des ordres

A. La clôture des moniales

L’on peut voir ailleurs, dans ce fascicule, le régime uniforme et fort strict de clôture établi pour les moniales par le Code et l’instruction du 6 février 1924 : sauf en des cas vraiment exceptionnels, personne, ni homme ni femme, ne peut pénétrer chez elles, et toute sortie leur est défendue ; tout ceci sous peine d’excommunication par le fait même [1].

Par cette Constitution [2], Pie XII a adapté assez notablement une législation restée inchangée pendant des siècles. Le Pape y parle des « lois trop strictes de la clôture ». Pour toutes les moniales, dit-il, ces règles doivent être adoucies, en raison de l’évolution des mœurs et de la sérieuse pénurie dont souffrent beaucoup de ces religieuses. Nous ne donnons que l’essentiel de cette législation, telle qu’elle a été complétée par les instructions de la Congrégation des Religieux Inter praeclara, du 23 novembre 1950 [3], puis Inter cetera, du 25 mars 1956 [4].

La clôture papale stricte des cc. 600-602, appelée désormais « majeure », n’était maintenue que dans les monastères de vie uniquement contemplative où se font des vœux solennels [5]. Clôture dont l’instruction Inter cetera a réglé l’ordonnance pratique par des normes détaillées. Certaines possibilités de sortie sont toutefois prévues ; par exemple, pour les motifs suivants : visite au médecin, à l’oculiste et au dentiste ; inspection des bâtiments et des propriétés ; travail auquel s’adonne le monastère (Inter cetera, n. 24). Mais il faut pour cela une dispense par le Saint-Siège ou l’octroi par lui de facultés à une autorité extérieure à l’Ordre (ibid., nn. 24-25).

L’innovation principale introduite par Pie XII est la clôture papale « mineure ». Bien que Vatican II l’ait abolie, elle aura été une heureuse expérience et l’amorce d’adaptations plus fondamentales. Cette clôture mitigée, Pie XII l’a créée pour les monastères « où un certain nombre de religieuses et une partie notable de la maison » sont affectés à un apostolat (Sponsa Christi, art. IV, § 3, 2°) [6].

Elle permettait l’accès, à l’intérieur même du monastère, aux locaux affectés aux œuvres, tant des moniales attachées à celles-ci que des personnes de l’extérieur appelées à s’en occuper elles aussi (professeurs laïques, infirmières, etc.) ou à en bénéficier (élèves, malades, etc.) (Inter praeclara, nn. XIII-XVI). Les abus sur ce point ne faisaient plus encourir l’excommunication, remplacée par une peine à infliger en proportion du délit (Inter cetera, nn. 61 et 63).

Les moniales appliquées aux œuvres pouvaient même sortir du monastère moyennant dispense par la supérieure, dans la stricte mesure où le requéraient leur apostolat et les affaires à traiter (ibid., nn. 50, b et 51) [7].

Parmi les pouvoirs attachés à la fonction épiscopale par le Motu proprio Pastorale munus, du 30 novembre 1963, il y a celui de « permettre, pour un juste motif, l’entrée d’étrangers dans la clôture des moniales (du diocèse), de même que la sortie de celles-ci, pour le temps vraiment nécessaire » [8] Ceci n’a peut-être pas été assez remarqué. Désormais attaché à la fonction épiscopale, ce pouvoir ne doit plus être exercé au nom du Saint-Siège. Cette faculté doit être largement interprétée (cf. c. 200, § 1) et est applicable à de nombreux cas ; par exemple, motifs psychologiques ou de famille, demandant une visite ou un séjour au dehors, même assez prolongé.

Vatican II a très notablement réduit le champ d’application de la clôture papale. Le décret Perfectae caritatis (n. 16) en prescrit le maintien, mais pour les seules moniales de vie uniquement contemplative. Le Concile a donc supprimé la nécessité, très explicitement affirmée par Sponsa Christi, de la clôture papale pour la condition de moniale [9].

Perfectae caritatis demande, au surplus, d’adapter la clôture papale aux circonstances de temps et de lieux et de supprimer les usages périmés, après avoir pris l’avis des monastères eux-mêmes. C’est, en effet, un des points où la nécessité d’adaptations se fait vivement sentir.

Le Motu proprio d’exécution Ecclesiae sanctae, du 6 août 1966 [10] apporte quelques précisions.

Il indique d’abord le sens de la clôture papale. « Elle est à considérer comme une institution ascétique qui s’accorde particulièrement avec la vocation des moniales ; elle est, en effet, un signe, une protection et une forme spéciale de leur retrait du monde » (n. 30). Cette « institution ascétique », c’est la clôture d’aujourd’hui, avec les adaptations demandées par Perfectae caritatis. Elle est, dit Ecclesiae sanctae, au service de ce retrait plus marqué du monde qui est la vocation particulière des moniales. Il est heureux que le Motu proprio envisage la clôture papale comme un signe de ce retrait, avant d’y voir une protection. Une perception exacte de ce lien fonctionnel entre la clôture papale et le retrait du monde permettra de voir ce qu’il convient de garder, d’abandonner ou de modifier.

L’on comprend que Ecclesiae sanctae prescrive qu’il y ait toujours une « séparation matérielle » avec l’extérieur (n. 31), afin que soit rendu perceptible aux hommes de notre temps le témoignage collectif de la vie contemplative, avec son nécessaire retrait du monde.

Le texte ajoute immédiatement : « Chaque famille religieuse toutefois peut établir et définir, dans les constitutions, les normes particulières de cette séparation matérielle » (loc. cit.). C’est dire que ce signe matériel peut varier. Il ne doit plus nécessairement consister en des grilles. Nous estimons préférable la disparition de celles-ci. Elles font penser à un manque de liberté de celles qui vivent derrière elles, alors que c’est de tout leur cœur qu’elles se vouent à la contemplation. Les grilles apparaissent aussi comme un signe de défiance et d’hostilité à l’égard du monde, alors que c’est par amour pour lui que les moniales prient et s’offrent dans leur retraite. Aussi faudra-t-il trouver d’autres modes de séparation matérielle. Il suffira que celle-ci soit sincèrement marquée. À chaque Ordre de voir ce qui convient, sans rigide uniformité, en tenant très spécialement compte de la mentalité et des mœurs des fidèles de la région où chaque monastère est implanté [11]. Là toutefois où moniales ou laïcs ne sentiraient pas encore le besoin de la suppression des grilles, il pourrait être opportun de les conserver [12].

Ne faudrait-il pas désormais que les moniales puissent porter leurs regards au-delà de leur couvent, sur ce monde au salut duquel elles se sont consacrées avec le Christ, sans en être empêchées par des vitres opaques et de hauts murs, comme dans les vieux pénitenciers ? Leur équilibre nerveux et psychique y gagnera. Et leur témoignage sera d’autant plus transparent. Dès à présent, des mesures peuvent être prises sur ce point dans les constitutions révisées.

Une autre réforme paraît désirable : puisque, dans les maisons des Ordres masculins, le droit n’interdit pas l’entrée des hommes, pourquoi, de façon analogue, ne pourrait-il pas cesser de défendre l’accès de femmes aux monastères de moniales, même purement contemplatives [13] ? Ce serait alors à chaque Ordre de voir si, dans ses constitutions, ses directoires ou ses coutumiers locaux, il convient ou non de réglementer de façon plus stricte cette entrée, voire de l’interdire en principe dans certains instituts.

Il est à souhaiter que le droit donne de plus larges pouvoirs aux supérieures en matière de clôture papale. L’instruction Inter cetera, de 1956, a ouvert la voie en confiant à la supérieure du monastère la garde immédiate de la clôture, tant majeure (n. 36) que mineure (n. 59). Mais elle ne l’autorisait à en dispenser, conformément au droit ou aux constitutions, que dans le cas de la clôture mineure (n. 50, c). Il serait hautement souhaitable que, profitant de cette expérience limitée, le droit, reconnaissant l’aptitude, maintenant patente, de la femme à assumer des tâches de gouvernement, en vienne à donner à toutes les supérieures de monastères, les seules à connaître tous les aspects de la situation, des pouvoirs de dispense et de permission en matière de clôture. Un stade d’expérimentation sera peut-être opportun çà et là. Les visites canoniques suffiront à prévenir ou à corriger les abus [14].

Pour les moniales appliquées à un apostolat en vertu de leur institut, le décret conciliaire Perfectae caritatis a supprimé la clôture papale mineure (n. 16, 2). « Elles garderont cependant, dit-il, une clôture fixée par leurs constitutions » [15]. Avec sagesse, le Motu proprio Ecclesiae sanctae laisse à ces moniales le soin de définir elles-mêmes cette clôture (n. 32). Les autorités chargées de veiller à la révision des constitutions des monastères féminins (cf. Ecclesiae sanctae, nn. 9 et n) devront donc respecter leurs décisions sur ce point. Cette clôture de règle devra assurer le caractère monastique et contemplatif de leur vie, qui reste fondamental [16], tout en permettant l’exercice aisé de leur apostolat (y compris la formation et les contacts avec l’extérieur que cet apostolat peut requérir). L’on pourra profiter de la possibilité de faire parfois certaines expérimentations donnée par Ecclesiae sanctae (n. 10) pour les monastères féminins. Pour les moniales, en raison de la stabilité et de la sécurité dont elles ont besoin, le Motu proprio accorde cette possibilité de façon assez restreinte [17]. Mais, chez les moniales qui exercent un apostolat, des expériences s’avéreront plus vite opportunes. De plus, Ecclesiae sanctae demandant, on l’a dit, à ces moniales de déterminer elles-mêmes leur clôture, il convient de ne pas trop restreindre les essais en cette matière. La clôture papale mineure étant abolie, ces expériences n’iront pas à l’encontre du droit commun et ne requerront donc pas de recours à la Congrégation des Religieux. Il suffira des autorisations prévues par le Motu proprio (n. 10) [18].

B. La clôture des ordres d’hommes

Chez ces religieux, le Code prescrit uniformément une clôture papale, interdisant l’entrée de toute femme dans la partie habitée par la communauté (cf. cc. 597, §§ 1-2 ; 598, § 1), sous peine d’excommunication à encourir par le fait même (c. 2342, 2°). Chez les réguliers appliqués à des œuvres, il faut, si possible, une habitation séparée, soumise à la clôture (c. 599, § 1). Même les locaux affectés aux œuvres y sont soumis jusqu’à un certain point, en ceci que des femmes ne peuvent y être admises que pour un juste motif et avec la permission du supérieur (c. 599, § 2). Quant aux sorties, le Code ne les interdit pas. Il se borne à demander aux supérieurs de veiller à l’observation des constitutions sur ce point (c. 606, § 1).

Ne serait-il pas opportun que cette clôture papale existe désormais pour les seuls Ordres purement contemplatifs [19] ? En certains Ordres, une séparation du monde plus marquée encore pourrait être assurée par les constitutions et les coutumiers aux différents niveaux. Le supérieur du monastère pourrait accorder les dispenses et permissions opportunes [20].

Pour les monastères exerçant un apostolat, la clôture devrait pouvoir être fixée par les constitutions, comme le Concile vient de l’accorder aux moniales adonnées à un apostolat.

Les Ordres non monastiques de vie active ne s’accommoderaient-ils pas mieux de la clôture des Congrégations que nous allons décrire à l’instant ?

II. La clôture des congrégations

Toutes les Congrégations, même de droit diocésain, ont été soumises par le Code à une clôture (c. 604). Elle consiste en ceci : personne de l’autre sexe ne peut entrer dans leurs maisons, sinon les personnes « que les supérieurs pensent pouvoir être admises pour de justes et raisonnables motifs ». Quant aux sorties de la maison, il suffit, comme dans les Ordres d’hommes, que les supérieurs veillent à l’observation soigneuse des constitutions sur ce point (c. 606, § 1). Selon le c. 607, les supérieurs et les Ordinaires des lieux doivent veiller à ce que les Sœurs ne sortent pas seules, sinon en cas de nécessité [21].

Pour les entrées dans la clôture, ce régime paraît sage et suffisamment souple, avec le mérite de s’en remettre au jugement des supérieurs, même locaux. Les réformes à opérer auraient à porter surtout sur les constitutions. Un examen des constitutions d’une cinquantaine de Congrégations nous a révélé que beaucoup sont plus strictes que le Code. Certaines, par exemple, ne distinguent pas entre hommes et femmes, ou même visent explicitement ces dernières, là où elles requièrent le jugement de la supérieure pour l’admission dans la clôture, voire dans les locaux réservés aux œuvres [22]. Ou bien elles restreignent, explicitement ou implicitement, l’admission d’hommes dans le quartier des Sœurs aux seuls cas de services nécessaires, ce qui est plus strict que les « justes et raisonnables motifs » dont se contente le c. 604, § 1 [23].

Quant aux contacts avec les visiteurs et aux sorties, il serait souhaitable que le droit canonique les autorise de façon générale dans toute la mesure où elles sont vraiment utiles. Une permission ne devrait pas être nécessaire pour les entretiens, les sorties et les visites au dehors requis par l’office. En tout cas, la présence d’un compagnon au parloir est un usage qui ne correspond plus du tout à la mentalité actuelle. Il faudrait abolir les règles qui demandent une discrétion absolue – nous allions dire maçonnique – sur les choses de la communauté, au-delà des exigences de la circonspection. Est-ce là pour la vie religieuse une heureuse façon de rendre témoignage ? Il ne faudrait pas non plus que l’on doive rendre compte à la supérieure après chaque visite reçue. Quant à la règle de la compagne pour les sorties, formulée indirectement au c. 606, § 2, elle rappelle la duègne d’autrefois et est largement tombée en désuétude, ne fût-ce que par impossibilité de l’observer. Il suffirait que le supérieur prescrive la présence d’un compagnon, si elle est nécessaire. Aux religieuses de demander à une consœur de les accompagner, si les circonstances le recommandent.

Disons un mot de deux cas spéciaux prévus par le droit particulier de certaines Congrégations.

Il en est dont l’entièreté ou une partie des membres vivent, groupés par deux ou trois, voire isolément, en service détaché qui demande de fréquents contacts à la maison ou au dehors ; par exemple, dans des écoles, des paroisses, des postes de mission. Les constitutions demandent sagement que ces contacts aient une réelle utilité, non un motif de pur agrément. Des règles de prudence sont également prescrites.

Il y a aussi le régime spécial des Congrégations féminines de vie contemplative ayant adopté le type monastique (Adoratrices et Réparatrices, par exemple). Leurs constitutions imitent l’ancienne clôture papale majeure des moniales et pourraient utilement recevoir les mêmes adaptations. En certaines de ces Congrégations, la supérieure locale peut déjà permettre l’entrée d’étrangers (même d’hommes) dans la clôture ou la sortie des Sœurs, dans la mesure du nécessaire.

Un régime plus spécial encore – et tout à fait valable – est celui des Congrégations de vie apostolique avec une branche de Sœurs qui, du moins en certaines maisons de l’Institut, se vouent à une stricte clôture (analogue à celle de l’ancienne clôture papale mineure), pour donner à leurs consœurs et aux fidèles un témoignage de contemplation [24]. La supérieure locale peut leur permettre de sortir en des cas exceptionnels ou même dans la mesure où leur apostolat le requiert.

III. Considérations générales

Tout d’abord, l’esprit de clôture importe bien plus que sa matérialité. Non animée par une volonté de témoignage à l’amour saint de Dieu, la clôture dégénère en des observances purement matérielles et déshumanisées, qui deviennent un contre-témoignage.

Pour définir cet esprit de clôture et sa traduction dans les lois et les aménagements matériels, il sera bon de tenir compte du bien commun, non seulement de l’institut, mais aussi de toute l’Église.

Du point de vue de l’Ordre ou de la Congrégation, l’on aura égard à « son caractère et à sa fonction propre. L’on maintiendra fidèlement l’esprit des fondateurs et leurs intentions spécifiques, de même que les saines traditions » (Perfectae caritatis, n. 2, b). Il appartiendra aux constitutions d’exprimer ce « patrimoine de l’institut » (loc. cit.). Des orientations générales y suffiront et seront plus efficaces, croyons-nous, que des réglementations détaillées.

Mais c’est tout le corps ecclésial qui est concerné par la clôture des religieux, moyen d’expression de leur témoignage public de séparation.

Aussi serait-il normal que le Code révisé continue à régler cette matière. Mais, sur ce point comme sur d’autres, ne pourrait-il se contenter de donner des normes générales, d’ailleurs plus indicatives d’un esprit que prescriptives d’observances détaillées ? Des précisions pourraient alors être apportées, sur le plan régional et local, par les chapitres et les supérieurs religieux respectifs, conformément à l’esprit et à la fonction propres de l’institut. En une matière qui concerne à ce point le témoignage qu’ils ont à donner, il serait fort souhaitable que les membres de tous instituts, d’hommes et de femmes, soient consultés. Les laïcs seraient aussi très opportunément entendus. Pour voir si un témoignage porte et pour qu’il soit effectif au maximum, il vaut la peine d’interroger ceux à qui il est destiné. Dans ce dialogue avec les communautés locales, diocésaines et régionales, les évêques ont évidemment leur part, intéressés qu’ils sont à ce que les communautés religieuses donnent un témoignage efficace de consécration.

Conformément au Motu proprio Ecclesiae sanctae, toute norme sujette à variation en raison des circonstances de temps et de lieux devrait ne pas figurer dans les constitutions, mais, selon les cas, dans les coutumiers provinciaux ou locaux (n. 14).

Pour ce qui regarde la traduction matérielle de la clôture, il serait opportun qu’elle soit précisée par étapes successives, des principes généraux du Code aux ultimes déterminations. Il appartient, croyons-nous, au supérieur local, ou à la supérieure locale, d’en déterminer tout à fait concrètement les modalités, avec l’aide de sa communauté, en dialogue avec la Hiérarchie et les fidèles concernés. Il importera de tenir compte de la mentalité et des mœurs du pays et de la région. Les limites matérielles devraient pouvoir, en tout institut, être fixées sur place par le supérieur majeur immédiat (la supérieure majeure immédiate). Capable de juger concrètement de la décision à prendre, cette autorité est aussi à même de le faire avec l’indépendance nécessaire par rapport aux contingences locales.

Comme nous l’avons déjà dit au sujet des moniales purement contemplatives, les supérieurs locaux, seuls à même de bien juger des situations, pourraient jouir de pouvoirs de permission et de dispense pour autoriser les entrées dans la clôture et les sorties de celle-ci, plus ou moins largement selon les légitimes diversités.

On a pu le constater plus haut, une équitable égalité entre religieux et religieuses paraît souhaitable dans les normes canoniques sur la clôture, pour que soit reconnue et franchement aidée par l’Église la promotion sociale de la femme. Ce sera surtout aux constitutions à tenir compte des différences de psychologie.

Il importe de faire de la clôture un témoignage librement donné par les religieux et librement respecté par le peuple chrétien. Aussi paraît-il opportun d’abolir l’excommunication qui sanctionne la clôture papale. Excluant de la communion des fidèles (c. 2257, § 1), elle est une peine disproportionnée, d’autant plus que, dans les rares cas de violation, il y a sans doute presque toujours atténuation de la responsabilité. Mieux vaut que la clôture soit observée en esprit d’amour et non de crainte. Une peine appropriée pourrait, si c’est opportun, être imposée par l’autorité compétente.

Dans cet article, nous sommes resté dans le cadre de la législation existante. Mais une recherche et des essais restent à entreprendre par les religieux et les religieuses, aidés par les fidèles et leurs pasteurs, pour voir ce qui doit être renouvelé dans les signes de séparation du monde qu’ils sont appelés à donner à leurs contemporains pour marquer leur attachement absolu à Dieu. Nul ne peut dire à quelle profondeur se situeront les réformes auxquelles les conduira une très humble ouverture à l’Esprit.

St-Jansbergsteenweg 95
Leuven

[1Voir plus haut, p. 174.

[2Texte dans R. C. R., 1951, 46 ; commentaire, par le P. É. Bergh, p. 73 et 117.

[3R.C.R., 1951, 58.

[4R.C.R., 1956, 203 ; commentaire, par le P. A. Van Biervliet, C.S.S.R., P. 7. 47. 99, 136, 175. 210.

[5Sponsa Christi, art. IV, § 1, 2° et § 2, 3° ; maintien de l’excommunication par Inter cetera, nn. 38-39.

[6Également pour les monastères de vie purement contemplative où ne se font pas de vœux solennels (Sponsa Christi, art. IV, § 5, 1°)

[7Pour que les Fédérations de monastères puissent atteindre leur but, leurs statuts peuvent prévoir des dérogations à la clôture (Inter cetera, n. 64-69).

[8R.C.R., 1964, 25.

[9Comp. avec Sponsa Christi, art. IV, §§ 4-5.

[10Texte dans Vie consacrée, 1966, 257.

[11Il serait peut-être bon que les aménagements matériels soient d’abord faits à l’église ou à la chapelle, lieu de prière commun aux moniales et aux fidèles, où peut opportunément se traduire, par une séparation matérielle mesurée, tant la consécration spéciale des moniales que leur appartenance avec les fidèles à l’unique Peuple de Dieu.

[12Dans ce cas, il serait bon de prévoir des formalités relativement simples pour le jour, sans doute assez proche, où, dans ces régions aussi, se fera sentir le besoin d’une adaptation. Il paraît désirable, en tout cas, de supprimer les tours et autres procédés semblables, qui font penser à un emprisonnement rigoureux.

[13En tout cas, des facultés générales pourraient être accordées pour que des femmes puissent séjourner temporairement en clôture pour se recueillir ou faire connaissance avec la vie des moniales. En 1963, un induit, de portée encore limitée, a été accordé en ce sens aux monastères de la Visitation.

[14La supérieure locale pourrait, par exemple, en certaines situations, permettre l’assistance à la messe en dehors du monastère ou la présence à des réunions d’information sur le Concile et le renouveau de la vie religieuse. En pareils cas, les moniales purement contemplatives pourraient garder une certaine clôture (par exemple, ne parler que dans la mesure où la charité le requiert) ; ce serait un témoignage compréhensible et profitable à tous.

[15Voir aussi Ecclesiae sanctae, n. 32. Aux moniales contemplatives en vertu de leur institut, mais qui, en fait, ont assumé des œuvres extérieures, Ecclesiae sanctae (loc. cit.) demande d’opter entre, d’une part, abandonner celles-ci et conserver la clôture papale, et, d’autre part, les garder, en fixant dans les constitutions le régime de clôture, qui remplacera la clôture papale, majeure ou mineure, en vigueur chez elles jusqu’ici.

[16Perfectae caritatis demande que l’on soit attentif à maintenir une forme de vie proprement monastique dans les monastères où s’exerce un apostolat (n. 9, 2).

[17Comparez Ecclesiae sanctae, n. 10, avec Perfectae caritatis, n. 4.

[18Des constitutions mises à l’essai pour le moment, dans des monastères où s’exerce un apostolat, prévoient que la supérieure locale pourra permettre l’entrée d’étrangers ou la sortie des moniales dans la mesure d’une véritable utilité. Ainsi, par exemple, pour le séjour de religieuses d’autres instituts, même non-catholiques ; pour que les parents, frères et sœurs d’une moniale sérieusement malade puissent la visiter ; pour la marche des œuvres et la formation à acquérir ou à perfectionner.

[19Selon Perfectae caritatis, ces instituts doivent respecter religieusement leur retrait du monde (n. 7, fin).

[20La diminution prévisible du nombre de moines accédant au sacerdoce rendra les sorties moins nécessaires dans les monastères.

[21Notons que, dans les Sociétés de vie commune d’hommes et de femmes, la clôture est réglée par les constitutions et soumise à la vigilance de l’Ordinaire du lieu (c. 679, § 2).

[22Parfois l’enseignement par des professeurs masculins est interdit, ou du moins très notablement restreint.

[23Sur certains de ces points, il a pu y avoir, jusqu’en ces dernières années, une influence persistante des Normae de 1901 pour l’approbation à donner aux constitutions des instituts de vœux simples (cf. nn. 170, 171 et 173).

[24Certaines constitutions soulignent le caractère public de pareil engagement, que toute autorité dans l’Église doit respecter.

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