Ce dont beaucoup de personnes rêvent à un moment de leur vie familiale ou professionnelle, l’A. de ce livre l’a mis en pratique par « un pas de côté », une année sabbatique vécue en famille avec sa femme et leurs trois enfants. En 2014, ce haut fonctionnaire décide de quitter temporairement la société et tous ses repères professionnels pour devenir bûcheron-boulanger à La Viale, hameau situé sur les plateaux de Lozère au-dessus des Gorges du Chassezac dans les Cévennes (France). En ce lieu de prière, de travail et de silence, le corps se met à vivre à l’écoute du Christ et au rythme des saisons. Ce hameau perdu dans les montagnes est aussi un lieu d’accueil pour tous, sans exception aucune : des anciens de la rue aux plus aisés, sans différence. Tout avait commencé en 1964, quand le Père Pierre Van Stappen, jésuite belge et professeur de religion à l’École européenne d’Uccle, se vit confronté au vide spirituel des enfants des hauts fonctionnaires européens. Il cherchait alors un endroit où leur faire connaître et vivre le message de l’Évangile. La Viale, c’est une expérience forte de travail manuel, de vie communautaire par maisonnée, de prière régulière au rythme monastique, le tout dans le silence d’une splendide nature. Mais tout était à reconstruire. Jusqu’en 1995 aucune route ne conduisit jusqu’aux quelques habitations. La vie était rude, et c’est à travers le labeur des mains que le cœur est happé, restauré, nettoyé. Cette expérience originale s’est étendue ensuite dans un quartier de Bruxelles (Opstal), puis dans une vaste clairière près de Beauraing (Quartier Gallet), ensuite à Bruxelles dans l’ancienne maison de formation des Pères du Saint-Sacrement, à proximité du Quartier européen, et enfin dans un habitat groupé pour abriter le « Béguinage Viaduc », toujours en plein Bruxelles. Le nom du petit hameau en ruines, découvert par des jeunes, désigne aujourd’hui une communion de vie qui regroupe ces quatre pôles différents. Un vrai partenariat est vécu entre ces différents lieux d’ouverture comme entre les laïcs et les jésuites.
Dès le préambule, l’A. avoue « avoir peu à peu compris que cette expérience de rupture s’était muée en un cheminement spirituel regroupé en quatre saisons imaginaires » (p. 9), ainsi qu’en une réflexion concrète sur les « quatre dimensions de l’être, de l’avoir, du dire et du faire » (p. 30). L’été est la saison du choix, du départ et du saisissement de l’inconnu. L’automne symbolise la saison de l’apprentissage de la vie communautaire comme immersion dans le réel et l’accueil de toute personne « autre », souvent hors système. Durant l’hiver, il faut durer, endurer la solitude de la montagne cévenole. Coupé de l’actualité et des relations, la perception de l’appartenance au monde ne devient que plus vive et engendre des réflexions sur la civilisation et sur la conscience écologique. L’A. réfléchit également sur le passé de son management et de ses responsabilités publiques au ministère des Finances, à la Commission européenne et comme directeur de diverses institutions. Sa vie intérieure sort peu à peu de « sa léthargie et de ses balbutiements » (p. 145). Le printemps, saison de renaissance et de relecture du temps vécu, précède le retour et la vie après l’étape de La Viale, qui représente « un rite de passage vers l’accession à la liberté » (p. 217).
Ce « pas de côté », récit préfacé par le Gouverneur de la Banque de France, est le témoignage véridique d’une vie transfigurée à l’école de la nature et des plus démunis.
Editions jésuites - Fidélité, Bruxelles/Paris, juillet 2022
233 pages · 15,00 EUR
Dimensions : 12 x 19 cm
ISBN : 9782873569051