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Le Féminin avenir du monde

Marguerite Teillard-Chambon et son cousin Pierre Teilhard de Chardin

Marie Bayon de La Tour Marie-Josèphe Conchon Mercè Prats Marie-Jeanne Coutagne

Petit par son format, ce livre est grand par son contenu. Composé en quatuor de voix de femmes qui chantent ces « deux vies en conversation » : Marguerite Teillard-Chambon et son cousin Pierre Teilhard de Chardin. Ces quatre conférences ont eu lieu lors de la « Journée Marguerite Teillard-Chambon » le 12 octobre 2019 au Centre spirituel du Haumont à Mouvaux (59420) sous le thème « Un regard novateur sur le Féminin avec Pierre Teilhard de Chardin », organisé à l’occasion du 60e anniversaire de la mort accidentelle de Marguerite Teillard-Chambon, davantage connue sous son nom de plume Claude Aragonnès. Femme agrégée de lettres, élève de Bergson, éducatrice engagée et directrice du pensionnat des religieuses de Sion à Notre-Dame des Champs, militante active pour le droit des femmes, biographe reconnue surtout pour Marie d’Agoult, l’amante de Franz Liszt qui lui valut le Prix Femina et de Lincoln, héros d’un peuple (1955), Marguerite Teillard-Chambon était une femme de culture exceptionnelle. Cousine germaine de Pierre Teilhard de Chardin, dont « l’Amérique garde la tombe et l’Auvergne le berceau de cette âme exceptionnelle », elle devient sa fidèle correspondante et confidente durant les années de la Grande Guerre, contribuant à la maturation et à l’évolution de sa pensée. Lui-même a avoué quelques années plus tard à Léontine Zanta, que « la guerre, c’était l’éclosion des idées, la lune de miel intellectuelle » (Lettre du 7 août 1923 à cette amie et première docteure en philosophie). Tant de paysages traversés, des dunes de la Flandre, en passant par les Hauts de la Meuse, les crêtes de Champagne, jusqu’aux forêts de l’Oise, c’est l’infini des horizons qui déjà le fait méditer sur le grand Tout. Quatre regards de femmes façonnent ce portrait de Marguerite Teillard-Chambon à qui son cousin jésuite avait dit : « Tu seras dans les années qui viennent un mélange de ‘mystique’ et de femme de lettres qui pourra dérouter les classifications. Qu’importe ! – Va où tu sens que le réel cède devant toi : et ne t’inquiète pas du reste. Il y a autant de modes d’union à Dieu que d’individus » (Lettre de Noël 1923 de Pierre Teilhard de Chardin à Marguerite Teillard- Chambon). Marie-Josèphe Conchon, juriste de formation, auteur de la première biographie de Marguerite Teillard-Chambon, En communion avec Pierre Teilhard de Chardin (2016), fait ressortir cette personnalité fascinante d’intellectuelle chrétienne engagée dans son siècle et en pleine harmonie d’âme et d’esprit avec Pierre Teilhard depuis ses années parisiennes jusqu’à ses derniers jours à New York en 1955. Encouragement réciproque pour l’un et l’autre à penser, agir, écrire. Sur le Féminin surtout. Mercè Prats, musicienne, docteure en histoire à l’université de Reims, expose le « combat teilhardien » de Marguerite après la mort de Pierre Teilhard le jour de Pâques 1955 pour garder vivant son témoignage par la publication des Lettres de voyage en 1956-1957 de ce grand explorateur et scientifique. Elle publie aussi ses lettres à elle adressées sous le titre Genèse d’une pensée, Lettres 1914-1919 (Grasset 1961), sans connaître elle-même la publication, décédant subitement dans un accident de voiture quatre ans après Pierre Teilhard, le 7 septembre 1959. Les quatre années de guerre représentent pour le jeune jésuite le « baptême dans le Réel », réalité de vie et de mort au cœur des tranchées. Marie Bayon de La Tour, petite-nièce de Pierre Teilhard, sculptrice, membre du Conseil d’administration et de la fondation des Amis de Pierre Teilhard de Chardin, évoque les relations féminines qui jalonnent la vie du jésuite, les « traversant par le haut », l’amour humain étant toujours signe et vecteur de l’amour divin. Sa vision anthropologique et sa perspective du Féminin sont novatrices. À la fin de sa vie il écrit : « Pas plus que de lumière, d’oxygène et de vitamines, l’homme, aucun homme, ne peut (d’une évidence chaque jour plus criante) se passer de Féminin ». Marie-Jeanne Coutagne, agrégée et docteure en philosophie, secrétaire de la fondation des Amis de Teilhard de Chardin, professeur invitée au Centre Sèvres à Paris, évoque philosophiquement « le Féminin comme avenir de l’Homme ». Parole forte pour notre époque où d’aucuns rêvent de changer de corps, de produire leur progéniture en laboratoire et de considérer l’homme futur comme sexuellement indifférencié. « L’Éternel Féminin », esquissé déjà au XIVe siècle par Dante en la personne de Béatrice, repris au XIXe siècle par Goethe et les romantiques, traverse l’œuvre teilhardienne, lui confère unité et cohésion et en constitue une clef de lecture fondamentale non seulement de ses écrits, mais de son expérience de vie : « À partir du moment critique où, rejetant bien des vieux moules familiaux et religieux, j’ai commencé à m’éveiller et à me formuler vraiment à moi-même, rien ne s’est développé en moi que sous un regard et sous une influence de femme » (Œuvres complètes, tome XIII, p. 71-72). À son Journal, il confie le 14 février 1917 : « Qui me connaît sauf Marg ? »

Mots-clés Femmes Jésuites

Saint-Léger Éditions, Le Coudray-Macouard (Fr.), septembre 2020

200 pages · 17,00 EUR

Dimensions : 10,6 x 18,6 cm

ISBN : 9782364525979

9782364525979

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