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Jésus dans le regard des pauvres

François Odinet

N°2019-1 Janvier 2019

| P. 41-52 |

Orientation

Prêtre du diocèse du Havre et normalien, le père François Odinet enseigne au Centre Sèvres. En marge de sa dernière publication Vivants grâce à Dieu (2018), il nous invite à entendre ce que les personnes très pauvres voient de Jésus, en s’inspirant des partages d’évangile de la Famille Bartimée.

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On peut facilement trouver des publications qui décrivent le rapport que Jésus avait avec les pauvres de son époque. Il s’agit avant tout d’interprétations des évangiles, qui ont naturellement évolué au rythme de la recherche historico-critique. Ce travail technique est évidemment nécessaire pour nous approcher du texte évangélique. Toutefois, nous ne souhaitons pas ajouter une nouvelle contribution à ce dossier, mais entrer dans une perspective un peu différente. Il est un autre élément qui peut aider à envisager la relation entre Jésus et les pauvres : il s’agit de la prise en compte, pour comprendre l’évangile, de la parole que disent aujourd’hui les plus pauvres eux-mêmes. Loin de concurrencer le travail exégétique, cette lecture spirituelle à l’écoute des personnes très pauvres nous fait voir la question sous un autre angle : il y a fort à parier que la relation que les personnes très pauvres entretiennent aujourd’hui avec Jésus – surtout si cette relation est nourrie par l’évangile – nous enseigne sur la relation de Jésus avec les pauvres de son temps.

Ceux qu’ici nous appelons « personnes très pauvres » (ou parfois « pauvres ») sont des personnes affectées simultanément par les trois dimensions de la précarité telles que le philosophe Guillaume le Blanc les identifie : la misère, qui atteint la propriété ; la marginalité, qui disqualifie les dispositions à l’action, et le mépris social, qui dénie les compétences verbales [1]. Pourtant, si nous tendons l’oreille, nous découvrons que les personnes très pauvres ont une vie spirituelle dense, pleine d’enseignements pour toute l’Église. Il est donc possible de partir de leur expérience et de leur regard sur Jésus, pour les confronter à ce que l’évangile décrit de la relation entre Jésus et les pauvres. Entendre ce que les personnes très pauvres voient de Jésus nous donne évidemment un éclairage sur leur vie spirituelle, mais cette lumière rejaillit sur l’évangile et la lecture que nous en faisons.

Nous voudrions donc proposer une esquisse de réponse à la question : comment décrire les relations entre Jésus et les pauvres de son temps, telles que les pauvres d’aujourd’hui les comprennent ? Ceci ne peut, bien sûr, que s’appuyer sur la manière dont les pauvres d’aujourd’hui interprètent l’évangile. Nous le ferons à partir d’une analyse des partages d’évangile de la Famille Bartimée, un groupe de personnes très pauvres qui se réunit près de Toulouse [2].

Le bon pasteur, ami des pauvres

Jésus rencontre de nombreuses personnes pauvres, malades et/ou possédées au cours de sa vie publique – en particulier lors de son ministère en Galilée. Lorsque les personnes très pauvres lisent ces passages d’évangile, elles se montrent souvent plus sensibles à la personnalité de Jésus et à ses qualités relationnelles qu’à l’aspect miraculeux de sa puissance. Dans leur regard, le Christ apparaît comme celui qui accueille inconditionnellement, c’est-à-dire sans juger. Pour des personnes habituées à rencontrer des regards condescendants ou à être évaluées par les services sociaux, c’est un trait absolument central de la personnalité de Jésus. Cet accueil qui ne juge pas n’est d’ailleurs pas opposé au fait que, devant lui, la vérité des cœurs se dévoile : celle des personnages comme celle des lecteurs. Comme si, au fond, la vérité ne pouvait se faire que devant la bienveillance de Jésus, et non en réponse aux questions accusatrices auxquelles le Christ doit aussi faire face. Les personnes très pauvres peuvent d’ailleurs montrer de l’indulgence pour les personnages dont l’évangile dévoile le double jeu. Elles ont une telle expérience des épreuves qu’elles savent qu’il n’existe pas de cœur absolument pur – hormis, précisément, celui de Jésus.

Les lecteurs pauvres sont également sensibles à l’attitude de Jésus qui fait preuve de compassion : non seulement parce qu’il guérit beaucoup de ceux qui viennent à sa rencontre mais, avant même cela, parce qu’il prête attention à ceux qui souffrent et crient leur détresse : aveugles et boiteux, sourds-muets et possédés sont objets d’attention et d’amour de la part de Jésus. Les personnes très pauvres mettent l’accent sur cet aspect révolutionnaire. Ainsi, la rencontre entre Jésus et Bartimée (Mc 10,46-52) apparaît symptomatique : là où la foule veut faire taire celui dont le cri dérange, Jésus ouvre l’oreille et entend. Il convertit la foule en lui demandant de faire venir Bartimée. Au contact de Jésus, l’aveugle retrouve la force de vie qui l’habite, en se dégageant de son manteau et en bondissant jusqu’à Jésus. Celui-ci a encore la délicatesse, non pas de présumer de l’attente de Bartimée, mais de lui demander ce qu’il veut. Quant à Bartimée, le regard que portent sur lui les lecteurs pauvres fait voir en lui non pas seulement un aveugle que Jésus seul peut guérir, mais aussi un homme « au bord du chemin » que la rencontre avec Jésus remet « sur le chemin », à la suite de celui qui l’a appelé, relevé et guéri. La force de Jésus n’est pas seulement de guérir mais de remettre en route, de réintégrer à l’humanité ceux qui assistent de loin au mouvement de l’histoire. Une fois passé le Christ, ils se retrouvent, non plus aux marges, mais au cœur de l’action et de la suite de Jésus.

Jésus se montre donc comme un ami des pauvres – et les lecteurs très pauvres l’identifient parfois comme le seul ami dans une foule indifférente, quand elle n’est pas hostile. La figure du bon pasteur pourrait résumer cette attitude de Jésus pendant toute sa vie publique, si on rapproche la parabole du berger qui va chercher sa brebis perdue et qui, l’ayant retrouvée, en éprouve une joie intense (Mt 18,12-14 ; Lc 15,1-7), de la promesse entendue par le prophète Ezéchiel (Ez 34,11-12.16), selon laquelle Dieu serait pour son troupeau un berger attentif aux brebis égarées et malades, pour les ramener et les soigner.

Le crucifié, pauvre parmi les pauvres

La figure du bon pasteur offre un lien avec un autre visage de Jésus auquel les personnes très pauvres sont particulièrement attentives : il est non seulement celui qui conduit les brebis avec une proximité qui leur fait connaître sa voix (Jn 10,3-5.14-16), mais aussi celui qui donne sa vie pour elles (Jn 10,10-11.17-18). De fait, les personnes les plus pauvres sont très sensibles, non seulement à l’amitié que Jésus déploie à l’égard des pauvres de son temps, mais encore davantage au fait qu’il se soit lui-même fait l’un d’eux, pauvre parmi les pauvres. Si elles prêtent attention à la simplicité de sa naissance et de ses conditions de vie lors de son ministère itinérant, elles se sentent encore plus intimement concernées par sa passion et sa mort en croix : « Les personnes marquées par la misère ont tendance à placer la vie de Jésus tout entière, ainsi que la leur propre, dans la dynamique du chemin de croix [3] ».

Les personnes très pauvres sont extrêmement sensibles à la souffrance de Jésus en croix, mais elles prêtent aussi attention au fait qu’il ait été trahi, puis jugé faussement, et qu’il ait subi humiliation sur humiliation. Dans ce contexte, la mort en croix leur apparaît souvent comme le couronnement d’une terrible suite d’épreuves, et non isolément de ce qui l’a précédée.

Les personnes très pauvres remarquent ainsi que Jésus s’est fait « comme elles », l’une d’entre elles : il a habité souffrance, rejet et humiliation sans les fuir, mais en les transfigurant de l’intérieur par sa douceur et sa miséricorde. Leur regard sur la croix de Jésus aide à comprendre la parole de l’apôtre : « vous connaissez la grâce de notre Seigneur Jésus Christ : lui qui est riche, il s’est fait pauvre pour vous, afin que vous deveniez riches par sa pauvreté » (2 Co 8,9).

Avant de voir en Jésus celui qui porte leurs péchés, les personnes très pauvres reconnaissent celui qui porte leurs souffrances, dont les marques atteignent son corps. Dans un second temps, de telles souffrances apparaissent bien comme le fruit du péché : la passion de Jésus est le fait de l’injustice et de la cruauté de l’humanité, et les personnes très pauvres le disent. Toutefois, le rapport est d’abord institué entre passion et souffrance, plus qu’entre passion et péché. On pourrait dire qu’elles ont un regard réaliste sur le péché qui conduit le Christ à la croix : elles ne voient pas le péché d’abord en son principe de refus d’amour et de vérité, mais en ses conséquences sur l’humanité de Jésus – et sur les pauvres qu’il rejoint.

Le seul fait que Jésus habite cette souffrance « jusqu’au bout » (Jn 13,1) et qu’un tel itinéraire soit une manifestation de son amour « jusqu’au bout », fait de sa passion une source de force et de consolation. Elle brise la solitude extrême dans laquelle souffrance et humiliation enferment les plus pauvres, puisque le Christ a précisément habité ces réalités.

Le Messie qui accomplit les promesses de Dieu

Enfin, une écoute attentive de la manière dont les personnes très pauvres méditent l’évangile révèle qu’elles découvrent en Jésus celui qui accomplit les promesses de Dieu [4]. En effet, les actes de Jésus durant sa vie publique, son assomption de la souffrance dans sa passion et finalement sa résurrection et sa manifestation aux disciples, sont autant de moments qui font voir en Jésus le Messie, celui qui était attendu et qui pourtant dépasse toute attente. C’est pourquoi, lorsque les personnes très pauvres lisent un passage de l’évangile, elles l’entendent comme une promesse, appelée à se réaliser dans leur propre existence.

Par exemple, lorsqu’elles méditent la guérison de Bartimée, elles espèrent aussi leur propre intégration ou réintégration parmi les disciples de Jésus, ou même elles en font déjà mémoire si elles estiment celle-ci réalisée. Jésus accomplit les promesses messianiques, comme d’ailleurs lui-même le proclame dans des passages-clés de l’évangile selon saint Luc : Lc 4,16-21 ; 7,20-23 pour le ministère public et Lc 24,25-27.44-47 pour la passion et la résurrection. Les personnes très pauvres sont sensibles à cet accomplissement des promesses de Dieu, si sensibles qu’elles révèlent combien les actes de Jésus, sa passion et sa résurrection rejoignent aussi l’espérance fondamentale de la personne humaine, une forme de promesse originelle prononcée par Dieu sur toute personne vivante, et qui consisterait en des fondamentaux de l’existence : être reconnu, être aimé, avoir une place, pouvoir espérer.

Les personnes très pauvres voient en Dieu le seul véritable garant de ces promesses et de leur accomplissement, et en Jésus celui qui relaie de telles promesses en les incarnant dans ses actes messianiques. Les personnes très pauvres attendent de Dieu qu’il accomplisse aujourd’hui ce qu’il a accompli par son Messie il y a deux millénaires. Elles voient dans le Christ celui qui incarne la promesse dont elles scrutent l’accomplissement dans leur propre existence. L’expérience leur a appris que cet accomplissement demeure, en ce monde, toujours partiel, et qu’il peut même être hautement paradoxal : c’est alors l’expérience que le Christ accomplit les promesses de Dieu d’une manière invisible, en soutenant de sa présence celui qui continue son chemin d’épreuves.

Retour à l’évangile

Ces trois « visages » du Christ auxquels les personnes très pauvres se montrent attentives permettent d’éclairer les relations entre Jésus et les pauvres de son temps.

Le visage du bon pasteur aide à percevoir pourquoi les foules accourent si nombreuses à la rencontre de Jésus. Bien sûr, sa réputation de faiseur de miracles le devance. Mais surtout, il fait bon accueil aux plus pauvres, il les écoute et leur parle lorsque d’autres veulent les faire taire, il entre en contact avec eux et les touche là où beaucoup ne songent qu’à s’écarter d’eux. L’arrivée de Jésus dans un endroit rend visible une foule de pauvres que la honte cachait peut-être, parce qu’il est capable de les voir et d’être en relation avec eux, dans une bienveillance en laquelle les pauvres reconnaissent un signe évident donné par Dieu. Cette familiarité du Christ avec une foule de pauvres, qui souvent le presse – ou le fatigue –, laisse voir en Jésus l’unique personnage de l’évangile qui soit vraiment à l’aise avec les plus pauvres [5].

Le visage de Jésus crucifié, tel que les personnes très pauvres le contemplent, permet non seulement de comprendre son dialogue avec le « bon larron » (Lc 23,39-43) qui reconnaît en Jésus l’innocent devenu pauvre et persécuté ; il éclaire également d’une lumière rétrospective toute la vie publique de Jésus et ses controverses au Temple : si Jésus n’a pas littéralement vécu dans la misère, il vit « à l’ombre de la mort » (Lc 1,79) et de l’humiliation, tout en s’avançant librement vers celles-ci. Il y a là, sans doute, une source mystérieuse de sa proximité avec ceux qui souffrent le plus.

Enfin, le visage du Messie qui accomplit les promesses de Dieu – et qui n’est reconnu en toute vérité qu’après sa résurrection – permet aussi de comprendre pourquoi les pauvres reconnaissaient en lui l’envoyé de Dieu, alors que les pharisiens ou les chefs du peuple émettaient des doutes ou des sarcasmes suivis d’une condamnation à mort. Les pauvres ont pu constater que Jésus accomplissait les promesses messianiques, incarnant l’engagement d’un Dieu qui les aime et les sauve comme il a regardé et sauvé son peuple menacé en Égypte (Ex 3,7-10). Les pauvres d’aujourd’hui qui croient au Christ espèrent toujours de lui cet accomplissement qui répond aux promesses originelles ; ils témoignent même que cet accomplissement peut se rendre présent là où l’on s’y attend le moins.

L’Église de Jésus et les pauvres

La manière qu’ont les personnes très pauvres de lire l’Écriture invite à prêter une particulière attention aux relations humaines qui sont mises en scène dans le récit évangélique. C’est à travers ces relations que Jésus, au cours de son ministère public puis dans ses manifestations après Pâques, fonde son Église. Ainsi, il appelle et envoie ses apôtres, en leur donnant mission de servir la vie comme il l’a servie. Les personnes très pauvres évoquent rarement la formation de la première Église autour de Jésus, mais se montrent très sensibles, d’une part à ce qui se joue entre Jésus et ses disciples et, d’autre part, à la manière dont l’Église qu’elles connaissent incarne et continue la mission de Jésus : les pauvres attendent des communautés chrétiennes (ainsi que de leurs pasteurs et des personnes consacrées) qu’elles soient capables d’accueillir et d’intégrer en suspendant leur jugement, qu’elles se montrent compatissantes et présentes auprès de ceux qui souffrent, de sorte que, dans les relations communautaires au sein de l’Église, l’accomplissement des promesses de Dieu se laisse reconnaître. Nous avons déjà dit que les personnes très pauvres sont tout aussi attentives aux multiples rencontres de Jésus avec des personnes éprouvées par la pauvreté, la maladie ou la possession démoniaque, telles que l’évangile les raconte.

Dans les relations de Jésus, les personnes très pauvres montrent donc un double foyer d’attention : les relations entre Jésus et ses disciples d’un côté, avec sa prolongation dans les communautés chrétiennes ; les relations entre Jésus et les plus pauvres d’un autre côté – ce qui explique précisément la requête adressée à ces mêmes communautés qui, à l’heure actuelle, se réclament du Christ et se constituent autour de lui. Nous découvrons ainsi combien il est constitutif de l’Église, comprise comme communauté de disciples de Jésus, d’être dans cette double relation à Jésus et aux pauvres, au point que les personnes très pauvres attendent des chrétiens qu’ils soient en permanence entraînés vers les pauvres à la suite de leur maître. De fait, les rencontres entre Jésus et les pauvres ne laissent jamais indemnes les disciples [6]. Or, c’est justement ce qu’ils semblent parfois souhaiter : la communauté des disciples peut se montrer indifférente aux pauvres ou muette lorsque Jésus les rencontre, voire parfois hostile ou dépassée – ainsi lors de la guérison de Bartimée. Cette communauté finit pourtant par se reformer, à chaque fois, autour de la rencontre entre Jésus et les pauvres, en apprenant à faire place à la requête adressée à Jésus par quelqu’un qui souffre, ou à faire place au pauvre et au pécheur qui se mettent à la suite de Jésus, au point parfois d’être érigés, contre toute attente, en modèle de foi par le Christ lui-même. Ainsi, la bienveillance de Jésus à l’égard des pauvres et sa disponibilité pour les rencontrer et les rejoindre n’est en rien un élément anecdotique de son existence : il s’agit là, autant que lorsque le Christ appelle ses disciples, de moments où l’Église naît, se constitue, et prend la suite de son maître.

Et les riches ?

Peut-on parler de la relation entre Jésus et les pauvres sans évoquer les riches, que Jésus ne manque pas de fréquenter ? Examiner le sort des riches tel que les personnes très pauvres le lisent dans l’évangile peut servir de conclusion à notre propos parce qu’il est révélateur de ce qu’elles comprennent du salut dans le Christ et de la formation de l’Église. Les personnes très pauvres font souvent entendre une forte indignation à l’égard des riches, mais elles aspirent bien plus à la réconciliation qu’à la vengeance. Elles attendent des riches qu’ils ouvrent les yeux et se convertissent, ce qui, grâce à Jésus, peut advenir. C’est pourquoi elles sont sensibles au fait qu’à plusieurs reprises, Jésus appelle des riches (Lévi, le « jeune homme riche », Zachée...). La constitution de l’Église n’est authentique que si Jésus peut appeler à sa suite, non pas jusqu’au plus pauvre, mais jusqu’au plus riche [7] – puisque l’appel des pauvres, lui, est à la racine de son agir et de sa mission.

Le regard que les personnes très pauvres portent sur les riches de l’évangile aide à comprendre ce à quoi Jésus appelle les plus riches : son discours radical sur l’argent n’est pas fait pour humilier les riches ni pour les terrifier, mais d’abord pour les avertir du danger qu’ils courent. La richesse peut facilement rendre aveugle et sourd, et faire perdre la compassion ; c’est ainsi qu’est présenté le riche anonyme qui laisse le pauvre Lazare souffrir de la faim à sa porte (Lc 16,19-31). Jésus appelle des riches à sa suite sans les humilier, mais ceux-ci ne pourront pas faire l’économie, ni de le suivre jusqu’à la croix pour être enrichis de sa pauvreté, ni de l’accompagner dans ses rencontres et d’être entraîné par lui, le Messie reconnu par les pauvres, vers ceux qui souffrent le plus.

[1G. le Blanc, Vies ordinaires, vies précaires, Paris, Seuil, 2007.

[2Sur la famille Bartimée, voir É. Grieu et V. Lascève, Vers des paroisses plus fraternelles. Les plus fragiles au cœur de la communauté chrétienne, Paris, Éd. franciscaines, 2016. On trouvera une description de notre méthode d’analyse, ainsi qu’une présentation plus large de ce que nous apprennent ces partages bibliques, dans F. Odinet, Vivants grâce à Dieu. Comment les personnes très pauvres écoutent-elles la Parole de Dieu ?, Montréal-Bruxelles, Novalis-Lumen Vitae, 2018.

[3Voir É. Grieu, « Passion du Christ et personnes en grande pauvreté », dans G. Rimbaut (dir.), Partager la parole de Dieu avec les pauvres, Paris, DDB, 2013, p. 117-140, ici p. 128.

[4Sur cette figure du Christ, voir F. Odinet, « L’évangile, promesse pour les pauvres », dans Nouvelle Revue Théologique 140 (2018), p. 258-275.

[5J. Wresinski, Heureux vous les pauvres, Paris, Cana, 1984, p. 92-93 et 131-132.

[6Voir É. Grieu, « La bonne nouvelle se reçoit de ceux qui ne comptent pas », dans J. Cottin et É. Parmentier (éd.), Évangéliser. Approches œcuméniques et européennes, Zürich, LIT, 2015, p. 163-179 ; et Id., « Prier à l’école des “suppliants” de l’Évangile », dans Lumen Vitae LXXI/1 (2016), p. 57-60.

[7J. Wresinski, Les pauvres sont l’Église, Paris, Centurion, 1983, p. 24.

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