Un périodique unique en langue française qui éclaire et accompagne des engagements toujours plus évangéliques dans toutes les formes de la vie consacrée.

La profession religieuse comme proclamation de la foi et édification de l’Église

Contribution de théologie biblique à la théologie des vœux

Adrian Schenker, o.p.

N°1996-6 Novembre 1996

| P. 368-376 |

C’est une contribution pénétrante de théologie biblique à théologie des vœux que nous propose cet article. Il approfondit aussi le sens que l’on peut donner à l’affirmation désormais établie fermement que la vie consacrée « ...n’est pas une réalité isolée et marginale... parce qu’elle appartient de manière intime à sa vie, à sa sainteté et à sa mission » (V.C. 3, citant L.G. 44). Par la profession spécifique qu’est l’engagement des vœux, la vie consacrée est kérygmatique, elle précise par conséquent sa mission propre à l’intérieur de la mission de l’Église.

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Profession et vœux dans la vie consacrée

Dans l’Église latine, la vie consacrée connaît dès le début du Moyen Âge une promesse, appelée profession ou vœu [1]. Dans la suite, nous utiliserons les expressions profession, vœu ou vœux, promesse et engagement religieux sans les distinguer et pour désigner une même réalité, à savoir une promesse publique célébrée liturgiquement, accueillie par une communauté religieuse ou une église, ratifiée par une autorité communautaire ou ecclésiale, exprimant l’engagement à vivre une vie consacrée, définie par les conseils évangéliques, selon une forme fixée par des règles et des coutumes. Les Églises d’Orient connaissent des promesses monastiques analogues [2]. En Occident, dans les deux courants principaux de la vie consacrée ancienne, chez les moines et les chanoines, hommes et femmes, la profession est pratiquée [3]. Le droit canon généralise la promesse et l’étend à presque toutes les formes de vie consacrée, en prévoyant différents degrés d’engagement [4].

De cette pratique d’un engagement promis il résulte que la vie consacrée ne se définit pas seulement par les conseils évangéliques suivis à l’aide d’une règle, de constitutions et de coutumes. L’engagement explicite, public et liturgique exprimant la volonté de pratiquer cela s’y ajoute comme élément indispensable. D’ailleurs c’est cet élément-là seul qui provoquera formellement la contestation que Luther devait élever très vite contre la vie consacrée, dans son opuscule : De votis monasticis, rédigé au début même de la réforme en 1521 [5] :

Dubium non est, votum monasticum... res est sine auctoritate et exemplo scripturae, sed et Ecclesia primitiva et novum testamentum ignorant in totum vovendae cuiuscunque rei usum, nedum probant perpetuum hoc voti genus... castitatis.

Quel est donc le sens théologique de l’engagement explicitement promis dans la vie consacrée ? La longue tradition de cet engagement dans l’histoire de l’Église et son universalité dans la vie consacrée, nonobstant la diversité de ses formes historiques et canoniques, suggèrent des raisons théologiques profondes. Car sans de telles raisons la tradition et l’universalité de la promesse faite dans la vie consacrée ne s’expliqueraient pas.

Offrande de l’avenir

La promesse explicite de s’engager dans une forme concrète de vie consacrée concerne d’abord la personne même qui fait cette promesse. C’est elle qui s’y engage. Elle le promet à Dieu ou devant Dieu [6]. C’est pourquoi une telle promesse s’appelle vœu. Celui-ci est en effet une promesse faite à Dieu de réaliser pour lui quelque chose dont on sait que cela lui sera agréable et que par conséquent il l’agréera. Le vœu accompagne la prière dont on sait également qu’elle est une parole agréable au Seigneur et que par conséquent il l’agrée (Lc 11,9-13). Le vœu ajoute à la prière, qui est parole et geste, une valeur réelle existant en dehors de fa parole et du geste. Il s’identifie donc sous cet aspect à une offrande faite à Dieu, qui présuppose la prière mais y ajoute un plus, celui de la valeur réelle offerte.

Le vœu se distingue cependant par un autre aspect de l’offrande consacrée au Seigneur. Celle-ci lui est remise en un point du temps présent. Le sacrifice est immolé et offert au moment même où l’on décide le sacrifice ; les premiers-nés, les premiers fruits, les dîmes, les biens offerts en anathème (hèrèm) passent dans les mains du Seigneur à l’heure où ils lui sont amenés. En revanche, les biens promis par vœu ne peuvent être donnés tout de suite et en un instant. Ils devront être réalisés plus tard ou pendant toute une durée.

C’est ainsi que Jacob en fuite se vit dans l’impossibilité de construire un sanctuaire au moment même à Béthel ; il devait pourtant le faire puisque le Seigneur lui avait découvert le lieu saint. C’est pourquoi il promet de le réaliser dès qu’il le pourrait (Gn 28,20-22). De même David ne put bâtir une maison au Seigneur de sa propre initiative ; il fallait pour cela une décision du Seigneur lui-même, indiquant son désir d’ériger une maison près de David et en choisissant lui-même le site. C’est la raison pour laquelle le roi ne put aller au-delà d’une promesse de lui bâtir une maison dès que le Seigneur « lui aurait donné le feu vert », c’est-à-dire lui aurait accordé la grâce d’établir un lieu saint près de lui (Ps 132,2-5).

Promesse d’une durée

La consécration personnelle, par l’interdiction absolue de consommer des boissons alcooliques et des raisins, de se faire raser et de toucher un cadavre (Nb 6), implique une durée (Nb 6,5.8.12) pendant laquelle la personne restera consacrée. Après cela elle redeviendra profane (Nb 6,13-20). L’œuvre agréable à Dieu est ici la consécration personnelle d’une durée déterminée. Or, celle-ci a besoin d’être déterminée dans une déclaration verbale, au début de la consécration. Cette déclaration ne peut prendre que la forme d’une promesse que la personne fait de vouloir se consacrer pour telle durée. Ce genre de promesse est un vœu puisque la consécration se fait pour le Seigneur dont on sait qu’il l’agréera.

Le vœu intervient ainsi chaque fois que l’on veut réaliser pour Dieu quelque chose de durable. Une durée ne peut être offerte, en effet, que par un engagement verbal précédent qui embrasse cette durée.

En résumé, lorsqu’on veut réaliser au moment présent une œuvre qui plaît certainement au Seigneur, mais qui n’est réalisable que plus tard ou pendant toute une période, le seul moyen pour le faire en ce moment présent est de la lui promettre. Or une telle promesse faite au Seigneur s’appelle vœu.

Lorsqu’on veut donc faire maintenant l’offrande d’une chose dont on disposera seulement dans l’avenir, il n’y a pas d’autre moyen de le faire qu’en recourant à une promesse. De même, celui qui veut faire offrande de toute une durée (un acte répété, un renoncement durable, etc.) n’a pas d’autre moyen pour le faire que la promesse par laquelle il s’y engage. Jacob ne pouvait consacrer aussitôt le lieu saint que le Seigneur lui avait révélé cette nuit-là. Mais il pouvait faire la promesse de le consacrer, et cette promesse équivalait à la consécration elle-même.

Le vœu peut également promettre une chose due

Ainsi peut-on comprendre que certaines promesses et certains vœux sont dus ! Car ils remplacent une obligation qui ne peut être accomplie sur-le-champ ou en une seule fois. Ce genre d’obligation ne peut être assumé que sous la forme d’une promesse. En effet, une obligation, comme par exemple celle de la fidélité conjugale, ne peut être assumée que sous forme de promesse ! Car la fidélité s’étendant dans l’avenir, la seule manière de s’obliger pour l’avenir est la promesse. Ce sont des obligations qui exigent et impliquent une promesse ou un vœu. Telle est par exemple l’obligation de la foi que nous assumons par la promesse baptismale (le renoncement au diable et au mal, l’adhésion à la foi de l’Église). Dans de tels cas, le vœu est indispensable parce qu’il est le seul moyen que nous ayons de nous engager à notre devoir à l’égard du Seigneur.

L’appel que le Seigneur adresse à ses disciples est de cet ordre. Bien sûr, les conditions individuelles et psychologiques d’un appel à la vie consacrée impliquent une maturation de fa prise de conscience et un affermissement progressif et souvent tâtonnant de la volonté de la personne appelée. Mais les récits bibliques de l’appel des disciples par Jésus [7] et la péricope du jeune homme riche (Mc 10,17-23 par) ne s’arrêtent pas à cet aspect des choses. Leur perspective est théologique. Dans la vocation, théologiquement parlant, le Seigneur appelle une personne à le suivre d’une certaine manière, et l’obéissance à cet appel est une expression de la foi donnée au Seigneur par cette personne. Elle n’obéirait pas si elle ne croyait pas en lui. L’appel des premiers disciples apparaît en effet à la fois dans les évangiles synoptiques (Mc 1,14-20) et dans le quatrième évangile (Jn 1,35-51) comme la première réponse exemplaire de foi à l’annonce de la bonne nouvelle (Mc 1, 14 s.) ou à l’annonce christologique, (Jn 1,36.41.45.49.51). Dans la perspective de la théologie biblique, par conséquent, obéir à l’appel du Seigneur est confesser la foi en lui. C’est dire que l’obéissance à l’appel n’est pas laissée au libre choix de celui qui sait qui l’appelle, comme la foi elle-même n’est pas laissée au libre choix de celui qui en perçoit la vérité [8]. Il est clair que, au plan du discernement personnel et subjectif, il faut souvent faire un long chemin avant d’arriver à la perception de la vérité divine de l’appel que l’on sent. Mais cette prise de conscience humaine complexe ne supprime pas la réalité théologique fondamentale de l’appel du Seigneur à la vie consacrée.

La vie consacrée en effet ne peut être assumée pour toute la vie en dehors d’une perspective de foi. Elle est la réponse positive à l’appel du Seigneur en lequel on croit. L’appel ne nous est donné que dans la foi en Jésus, Seigneur vivant, qui appelle encore aujourd’hui des disciples à le suivre dans la vie consacrée comme il l’avait fait durant sa vie terrestre.

Puisque cet engagement croyant à la vie consacrée engage l’avenir et toute la durée de la vie, il est de ceux qui ne peuvent être pris que par un vœu, une promesse de fidélité sponsale faite au Seigneur. Celui qui veut prendre cet engagement ne peut le faire autrement qu’en le promettant. Le oui de cette promesse est dû, car le disciple ayant reconnu qui est Celui qui l’appelle n’est pas autorisé à lui dire non ! Ici se trouve la réponse à l’objection de Luther. Il s’agit du devoir de suivre le Christ, reconnu dans la foi comme Seigneur et Maître bienaimé de nos vies, mais c’est un devoir qui ne peut être assumé autrement que par la promesse de lui consacrer toute la vie.

Raison ecclésiale pour les vœux

Il faut remarquer ici que, dans l’Écriture, tous les vœux ont une dimension publique. Ils peuvent être conçus et prononcés en privé, par exemple le vœu de Jacob en Gn 28,20-22 ou celui d’Anne en 1 S 1,11, mais l’accomplissement est publié devant témoins. Car l’accomplissement d’un vœu est déclaré devant témoins comme réalisation de ce vœu. Le caractère public, au moins de l’accomplissement, fait partie intégrante du vœu au sens biblique.

Le vœu n’intéresse donc pas seulement Dieu auquel il est adressé et la personne qui le fait et l’accomplit. Il implique un troisième terme, le public qui en devient témoin. Celui-ci prend acte d’abord du dieu auquel il est adressé, parmi toutes les divinités possibles comme destinataires. Ainsi le vœu est-il une confession du dieu choisi. Cela est déjà manifesté par le lieu de l’accomplissement du vœu : c’est le temple consacré à ce dieu et la liturgie célébrée pour lui. Confession signifie, en termes d’histoire des religions, vénération publique d’un dieu. Elle est un « acte de religion » ou d’allégeance religieuse à l’égard d’une divinité, cf. Is 19,21. En termes théologiques, confession signifie adhésion de foi publique au vrai Dieu. Le mot confession est d’ailleurs bien sûr apparenté à celui de profession [9]. Les deux signifient un acte de foi public.

Ensuite les témoins d’un vœu et de son accomplissement apprennent la raison qui a conduit à faire ou à accomplir ce vœu. On la raconte aux témoins (Ps 22, 26 ; 66, 13-18 ; 116, 13s. 17-19 [10] ; 1 S 1,26-28 etc.). Ce peut être l’exaucement d’une prière, la promesse d’une action de grâce (Jon 1,16), une théophanie et une délivrance du danger (Gn 28,20-22), une faveur exceptionnelle accordée (Ps 132,2-5). Quel que soit le motif, les témoins assemblés au sanctuaire apprennent les actions divines pour lesquelles les fidèles viennent accomplir leurs vœux en remerciant leur Dieu de les avoir exaucés, sauvés, honorés, comblés, cf. Ps 65, 2.

Les vœux deviennent ainsi le kérygme de nouveaux hauts faits de Dieu (Ps 66,13-18). Chaque vœu accompli se fonde sur une nouvelle intervention divine, qu’il faut raconter et proclamer pour en rendre grâce, en lui rendant témoignage devant les hommes. Les vœux de la Bible sont un des lieux du kérygme d’où naît l’adhésion de foi des témoins qui entendent louer le salut réalisé par le Seigneur pour ceux qui viennent accomplir leurs vœux [11]. Les vœux contribuent à l’édification de la communauté des croyants. C’est le sens ecclésial des vœux.

Les vœux religieux édifient la foi et la communauté de l’Église

Est-il possible d’interpréter la profession religieuse dans la perspective des vœux que l’on trouve dans l’Écriture Sainte ? Non seulement c’est possible, c’est nécessaire lorsqu’on veut penser théologiquement l’engagement dans la vie consacrée. Les vœux religieux expriment la foi en Jésus ressuscité qui appelle maintenant encore des disciples à le suivre d’une manière spéciale, comme il l’a fait dans sa vie terrestre.

Les disciples ne pouvaient alors consentir à cet appel dans l’obéissance qu’à condition de reconnaître l’autorité que Jésus avait de leur faire quitter travail, profession et famille. Or, reconnaître en lui une autorité assez forte pour exiger d’eux une rupture complète avec toute leur vie présente signifie croire en sa mission prophétique, puisque le prophète Élie avait fait de même en appelant Élisée à son service (1R 19,19-21). De même, accepter aujourd’hui l’appel du Seigneur ressuscité à vivre selon les conseils évangéliques dans une forme de vie définie par une règle, des constitutions et des coutumes, revient à croire en l’autorité que le Christ vivant possède aujourd’hui pour intervenir avec autorité dans l’organisation de notre vie et a changer profondément.

La profession, qui est la célébration où les religieux prononcent leurs vœux, est ainsi un acte public de foi dans le Seigneur ressuscité qui les appelle et en son autorité divine sur eux reconnue devant la communauté ecclésiale. Un tel acte de foi devant témoins s’appelle confession de la foi (Rm 10,9-10).

Or, la fonction de la confession de foi est ecclésiale. Car elle proclame et communique la foi pour la faire entendre et accueillir. Elle est kérygme, offre, proclamation et répercussion de la foi. C’est pourquoi dans ce kérygme l’Église gagne de nouveaux croyants qui se joignent à sa communion. Ainsi le kérygme construit-il l’Église, et par conséquent les vœux religieux s’intègrent dans le kérygme de l’Église pour contribuer eux aussi à l’édification de l’Église !

En conclusion, les vœux religieux proclament en paroles la foi dans le Seigneur Jésus vivant et en son autorité. Par là ils font partie du kérygme de l’Église, qu’ils construisent grâce à cette proclamation.

Le kérygme des vœux intègre la vie consacrée en plein milieu de l’Église

Les vœux, profession de foi, définissent la place ecclésiologique de la vie consacrée. Celle-ci est par son existence même une partie du kérygme, de la répercussion publique de la foi dans le Seigneur vivant et actif en la vie des hommes. Faisant partie ainsi de l’annonce de l’Église, ce témoignage kérygmatique de la vie consacrée est indissociable de la mission de l’Église. Sans ce kérygme de la vie consacrée, l’annonce ecclésiale de la foi en Jésus Christ serait en effet incomplète ! Une manifestation du Seigneur ressuscité dans la vie des hommes de tous les temps y manquerait, à savoir l’autorité avec laquelle il continue à appeler des disciples à le suivre selon une forme particulière, marquée par les conseils évangéliques. Ce kérygme existerait implicitement même sans vœux, grâce à l’existence de la vie consacrée, mais les vœux l’explicitent et l’expriment. Cela convient au témoignage de la foi, qui doit être exprimé explicitement en paroles.

Les vœux font ainsi comprendre que la vie consacrée comme telle doit faire partie de l’Église, tout en n’appartenant pas à la hiérarchie de celle-ci, et sans constituer une église locale, puisque les personnes et les communautés consacrées par des vœux de religion restent membres des églises locales.

En conclusion : le kérygme de l’Église implique le kérygme des vœux religieux

Comment comprendre le lien qui relie à l’Église la vie consacrée, vécue personnellement et en communauté par certains baptisés ?

Les vœux de la vie consacrée sont la proclamation ecclésiale de la foi en Jésus Christ en tant qu’il appelle aujourd’hui encore des disciples à partager sa vie d’une manière spéciale. Cette proclamation fait partie de l’annonce de la foi dont l’Église est chargée. Par son existence, la vie consacrée est une parcelle de ce que l’Église doit annoncer en proclamant le Christ Jésus, qui appelle des hommes et des femmes à le suivre maintenant, de façon analogue à l’appel qu’il avait adressé à certains disciples durant sa vie terrestre.

Les vœux religieux expriment publiquement et liturgiquement cette foi, ce qui revient à dire : dans la forme d’une confession de foi publique qui peut et veut susciter la foi dans le cœur des témoins qui regardent et entendent la célébration de cette confession. La « confession des vœux » fait ainsi partie du kérygme de l’Église. Elle répand de cette manière la foi de l’Église et édifie par conséquent la communauté de ceux qui croient en Jésus Christ ressuscité et vivant, communauté qui est l’Église. Si ce témoignage de la vie consacrée manquait au kérygme de l’Église, celui-ci serait incomplet ! Et c’est la raison pour laquelle il faut que la vie consacrée existe dans l’Église. Elle a pour mission de manifester une action spécifique et essentielle du Christ en gloire dans le temps de l’histoire. C’est l’action par laquelle il appelle avec autorité divine des hommes et des femmes à organiser leur vie selon les conseils évangéliques que Jésus et certains de ses disciples avaient suivis dans leur vie terrestre.

Ce sont les vœux religieux en tant que confession de cette foi qui assurent explicitement et expressément cette proclamation ecclésiale. Pour cette raison on les appelle profession, entendons par là profession de foi en Jésus Christ glorieux appelant maintenant des disciples à marcher dans la voie des conseils évangéliques.

Saint-Hyacinthe
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[1Antonio Queralt, art. « Vœu » dans Dictionnaire de spiritualité, t. 16, Paris, Beauchesne, 1994, c. 1167-1195 ; Mariano José Sedano Sierra, « Voti religiosi. Storia », dans Dizionario Teologico della Vita Consacrata, dirigé par Angel Aparicio Rodriguez, cf. Joan Maria Canals Casas, cf. traduction italienne éd. par Tullo Goffi - Achille Palazzini, fmi, Milano, Ancora, 1994, 1922-1936 ; A. De Vogüé - M. Augé - M. Ruiz Jurado, « Professione » dans Dizionario degli istituti diperfezione, ed. G. Pelliccia - G. Rocca, vol. 7, Roma, Paoline, 1983, c. 894-934.

[2J. Gribomont - P. Raffin, « Professione » dans Dizionario degli istituti di perfezione ; P. Raffin, Les rituels orientaux de la profession monastique (nouvelle édition revue et mise à jour), « Spiritualité orientale, Série monachisme primitif, n° 4 », Bégrolles-en-Mauges, Abbaye de Bellefontaine, 1992.

[3Outre les études citées aux notes 1 et 2, cf. Josef Siegwart, Die Consuetudines des Augustiner-Chorherrenstiftes Marbach im Elsass (12. Jahrhundert), « Spicilegium Friburgense 10 », Fribourg, Universitatsverlag, 1965 ; Benoît Thivierge O.C.S.O., Le rituel cistercien de profession monastique. Un commentaire historique, théologique et liturgique du rituel cistercien de profession monastique et des formulaires de bénédiction du moine et de la coule, Pontif. Inst. Liturgicum Anselmianum, thesis n° 185, Rome, 1992 ; Viktor Josef Dammertz, « Promittat de conversatione morum suorum » in RB 58, 17, Erbe und Auftrag 70 (1994), 5-14.

[4Le droit canonique n’imposera formellement l’obligation universelle de prononcer la profession explicitement en paroles qu’en 1858, année de la suppression de la profession tacite. Celle-ci était un acte ou un rite, par exemple le revêtement d’un habit pénitentiel ou monacal, la prise du voile, la tonsure etc. qui exprimait publiquement l’adhésion d’une personne à un état de vie consacrée, comme l’état des vierges ou des veuves, ou l’état d’ascètes ou de moines. - Le CIC de 1917 distinguait entre vœux solennels, vœux simples perpétuels et vœux simples temporaires, tandis que le nouveau CIC de 1983, abandonnant la distinction entre vœux solennels et vœux simples perpétuels ne parle plus que de profession (perpétuelle) et de profession temporaire. Mais il admet des effets juridiques différents de la profession perpétuelle selon l’institut dans lequel celle-ci est prononcée, cf. A. Boni, « Questioni giuridiche » dans Dizionario degli istituti di perfezione (cité supra n. 1), c. 947-956, 959-965.

[5De votis monasticis Martini Lutheri iudicium. D. Martin Luthers Werke. Kritische Gesamtausgabe, t. 8, Weimar, Hermann Böhlaus Erben, 1889, 564-669 (texte du traité : 573-669).

[6Les formules de profession sont étudiées pour les moines d’Occident par J. Gribomont, « Le formule di professione in Occidente » (dans Dizionario, cité supra n.2), c. 934-938, pour ceux d’Orient par J. Gribomont et Pierre Raffin (cf. n.2) : pour les chanoines et les mendiants par G. Rocca, « Le formule di professione canonicale » (dans Dizionario, cité supra, n 2), c. 938-947 ; A.H. Thomas, « La profession religieuse des Dominicains : formule, cérémonie, histoire », Archivum Fratrum Praedicatorum 39 1969, 5-52.

[7Martin Hengel, Nachfolge und Charisma. Eine exegetisch-religions-geschichtliche Studie zu Mt 8.21 f. und Jesu Ruf in die Nachfolge, « Beihefte ZNW, 34 », Berlin, Töpelmann, 1968, spéc. 70-82.

[8Cela est vrai également pour les vocations prophétiques de l’Ancien Testament., p. ex. Jr 1 ; 1 R 19,19-21 !

[9Les termes confiteri, confessio et profiteri, professio, en latin classique et dans le latin chrétien, cf. Albert Blaise, Dictionnaire latin-français des auteurs chrétiens, revu par Henri Chirat, Turnhout, Brepols, 1954, sub voc., se recouvrent partiellement quant à leur signification. Les deux verbes et noms, signifiant une déclaration, une reconnaissance, une affirmation publique, peuvent désigner la profession de foi, alors que professio, profiteri indique, déjà en latin classique, la profession, le métier et l’adhésion à une philosophie, une religion ou un parti, et en latin chrétien l’engagement à un état de vie consacrée.

[10H.A. Brongers, « Die Wendung besem jhwh im A.T. », dans ZAW 77 (1965), 1-20, a montré que le verbe « appeler » (qr’) en Ps 116, 13s. 17-19 ne signifie pas « invoquer (le nom) » mais proclamer, publier, annoncer le nom du Seigneur. Il ne s’agit pas d’un appel adressé au Seigneur (invocation), mais d’une proclamation du nom du Seigneur, adressée aux témoins présents (confession, kérygme, annonce).

[11Les ex-voto des sanctuaires, notamment ceux qui représentent le danger dont le Seigneur ou les Saints ont sauvé les fidèles qui offrent l’ex-voto, sont des proclamations en images et durables du haut fait du Seigneur ou des Saints. Ils matérialisent l’accomplissement du vœu. Ils sont la proclamation, par la voix de la représentation imagée, de la grâce reçue, et ils invitent tous ceux qui les regardent et les regarderont, en leur visite du sanctuaire, à donner à leur tour leur confiance au Seigneur ou aux Saints qui se sont révélés dans leur puissance salvatrice. Ce qu’ils ont fait alors, ils pourront le refaire maintenant encore en faveur de nombreux fidèles qui se tourneront vers eux avec confiance !

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