Un périodique unique en langue française qui éclaire et accompagne des engagements toujours plus évangéliques dans toutes les formes de la vie consacrée.

Chronique du Nouveau Testament

Dany Dideberg, s.j.

N°1973-5 Septembre 1973

| P. 298-308 |

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Nous présenterons les livres que les éditeurs ont eu l’amabilité d’envoyer cette année à la revue sous les rubriques suivantes : traductions et introductions au Nouveau Testament, histoire et théologie du Nouveau Testament, Évangiles, saint Paul, spiritualité biblique.

1. Traductions et introductions au Nouveau Testament

Ces dernières années, de nouvelles traductions de la Bible, en particulier du Nouveau Testament, ont vu le jour. Cette année, est paru Le Nouveau Testament [1] dans la Traduction œcuménique de la Bible. Quelles sont les principales caractéristiques de cette traduction ? Elle a été réalisée à partir de la meilleure édition critique du Nouveau Testament, celle de K. Aland, M. Black, B. M. Metzger, A. Wikgren ; pour certains passages, elle adopte cependant, ou du moins signale en note, des variantes qui ne figurent pas dans le texte critique. Pour chaque livre biblique, elle est établie par un catholique et un protestant. L’édition intégrale comporte, en plus du texte, des introductions, des notes plus abondantes sur des points d’archéologie, d’histoire, d’exégèse et de théologie biblique, et, enfin, divers appendices (tableau chronologique, cartes de l’Empire romain et de la Palestine, table alphabétique des notes principales). Traduction, introduction et notes ont été révisées par un groupe de collaborateurs de diverses confessions. Cette édition répond aux exigences scientifiques actuelles ; elle répond également au besoin qu’ont les chrétiens encore divisés d’avoir entre les mains un texte œcuméniquement traduit et annoté, non seulement pour le dialogue interconfessionnel mais aussi pour l’évangélisation du monde. Elle n’élimine cependant pas les divergences doctrinales qui séparent encore les Églises ; elle ne prétend nullement clore les recherches dans les diverses confessions en vue d’une meilleure intelligence du texte, ni supplanter les traductions en usage. Comme telle, cette édition du Nouveau Testament marque une étape nouvelle dans la marche des chrétiens vers l’Unité.

Plus d’un auteur a imité Tatien qui, au deuxième siècle, présenta pour la première fois les « Quatre évangiles en un seul ». Ainsi, N. Bompois, qui publie aujourd’hui Jésus ou l’Évangile selon les évangiles [2], récit continu, sans commentaire, muni seulement d’une trentaine de notes, et dont les titres de chapitres sont empruntés à la célèbre comédie musicale Godspell. Fruit d’une minutieuse harmonisation des textes, cet ouvrage, rédigé dans une langue claire et moderne, doit se lire, selon le vœu de l’auteur, comme un roman que parcourt le frémissement de ceux qui ont écrit la première Histoire de Jésus. A une époque où l’exégèse accuse l’originalité de chacun des évangélistes, cette entreprise a le mérite de souligner leur complémentarité et leur convergence.

Dans son Introduction au Nouveau Testament [3], B. Jay offre une initiation succincte et claire aux études néotestamentaires. Il traite d’abord les questions générales : contenu, canon, apocryphes, textes et traductions du Nouveau Testament ; puis il passe en revue chacun des écrits et leur consacre une notice historique, littéraire et doctrinale. En tête de l’ouvrage figure une bibliographie ; à la fin, un lexique : l’un et l’autre rendront d’utiles services. Préparée d’abord pour les étudiants de la Faculté protestante de théologie de Yaoundé (Cameroun), ce manuel est accessible à un large public.

Le volume Le monde autour de l’an 33 [4] de la collection Larousse « Monde et histoire » fait revivre un grand moment de l’histoire. P. Pierrard consacre d’abord à l’événement central un chapitre liminaire qui retrace la vie du Christ en le replaçant dans son cadre géographique et historique. Sans prendre parti dans le débat sur l’identité véritable de Jésus, Fils de Dieu ou prophète juif, l’auteur, en s’appuyant sur les évangiles canoniques, reconstitue les grandes étapes de son existence terrestre. Même s’il mentionne la Résurrection, il ne la rattache qu’à « l’extraordinaire vie posthume de Jésus de Nazareth ». A l’occasion de cet événement principal, sont présentés l’actualité internationale et certains portraits de contemporains par A. Melchior-Bonnet, les voyages autour du monde par J. Riverain, les sciences et techniques par Th. de Galiana, et la vie quotidienne par G. Rachet. Le texte est entrecoupé de nombreuses et belles illustrations, la plupart en couleurs.

2. Histoire et théologie du Nouveau Testament

La collection « Parole de Dieu » présente en traduction française, avec quelques modifications et compléments bibliographiques, l’ouvrage allemand de G. Bornkamm sur Jésus de Nazareth [5], qui dès sa parution en 1956 connut un grand succès en Allemagne. Disciple de Bultmann puis successeur de Dibelius, cet exégète protestant a pris le risque d’écrire une nouvelle « vie de Jésus ». Il s’efforce de retrouver le Jésus de l’histoire par-delà les interprétations théologiques que l’Église primitive a données de sa vie et de son message à la lumière de la Résurrection. Si son œuvre réagit contre une appréciation trop négative du Jésus historique, qui fut celle de ses maîtres, elle reste trop minimaliste aux yeux d’un catholique : ainsi à propos de la conception virginale de Jésus, de sa divinité, de ses titres messianiques. En situant G. Bornkamm dans l’exégèse allemande contemporaine, le Père X. Léon-Dufour, directeur de « Parole de Dieu », a voulu, dans la préface, marquer la valeur et les limites de cette recherche trop liée à la Formgeschichte et à ses présupposés. Le lecteur est donc invité à entrer dans un dialogue critique avec l’auteur de ce beau livre, qui repose avec netteté une question essentielle : le Christ de la foi est-il le Jésus de l’histoire ?

Un autre exégète protestant, J. Jeremias, mieux connu du public français que G. Bornkamm, a publié cette année, dans la même collection, Abba : Jésus et son Père [6], traduction partielle d’un livre paru en allemand en 1966. Cette belle monographie s’attache à l’étude de la désignation de Dieu comme Père, d’abord dans l’Ancien Testament et le judaïsme palestinien ancien, puis, dans les logia et les prières de Jésus, enfin, dans la prière quotidienne de l’Église primitive, comparée à celle du Peuple d’Israël. En appendice, sont relevées les caractéristiques de l’ipsissima vox de Jésus. Jésus désigne Dieu non seulement par le terme « Père » mais par celui, plus familier, d’« Abba », c’est-à-dire « Papa ». Cette invocation dévoile le mystère de sa personne et de sa mission. Telle est la conclusion que J. Jeremias propose avec sa probité et sa finesse habituelles.

Le Père B. Rigaux a consacré son dernier livre à la Résurrection du Christ : Dieu l’a ressuscité [7]. Patiemment, l’auteur a rassemblé et analysé toutes les pièces de ce dossier controversé. Son enquête s’ouvre par deux études préliminaires fort suggestives sur la résurrection des morts en général, l’une, dans la pensée juive au temps de Jésus, l’autre, dans la prédication de Jésus. Puis, vient un examen approfondi des formules kérygmatiques dans les Actes des Apôtres, des confessions de foi simples ou développées (celle de 1 Co 15,1-11, par exemple), des hymnes christologiques parmi lesquels se détache Ph 2,6-11. Replacés dans la vie de l’Église naissante, ces textes expriment, d’une manière abrupte, sa foi en Jésus ressuscité d’entre les morts par l’acte souverain de Dieu, fondement de la prédication, du culte et de la mission. Étudiant ensuite les apparitions de Jésus ressuscité, après la visite au tombeau vide faite par les femmes et les disciples, l’auteur distingue les christophanies personnelles ou de reconnaissance et les christophanies apostoliques où les témoins du Ressuscité sont envoyés en mission. Cette analyse des textes scripturaires et de leur contenu de foi appelle une réflexion sur le rapport entre la Tradition et l’histoire. Pour le P. Rigaux, il est impossible de « ne pas relier la Résurrection à un événement à la fois divin, donc théologique, et humain, donc historique ». Reste, enfin, à dégager les conséquences de la Résurrection de Jésus et sa portée eschatologique. Dans la mouvance de celle-ci, la notion de Dieu, le mode d’être du Christ glorifié, l’Église des vivants et des morts reçoivent une dimension nouvelle et définitive. Dans le débat actuel sur la Résurrection du Christ, cet ouvrage, fruit d’une vaste information et d’une critique lucide, fait figure d’un classique. Comme l’affirme Mgr Descamps dans la préface, « il est particulièrement précieux d’entendre un exégète chevronné doublé d’un véritable théologien fonder solidement sur les textes les assertions les plus constantes de la foi ».

Dans l’Évangile de Jean, le ch. 17 clôture le discours après la Cène ; depuis le XVIe siècle, il s’intitule « Prière sacerdotale ». L’épître aux Hébreux a été souvent préférée à ce texte pour étudier le sacerdoce de la Nouvelle Alliance. Sollicité par la Commission internationale de théologie, A. Feuillet s’est efforcé, à la lumière de Jean 17, de présenter Le sacerdoce du Christ et de ses ministres [8]. Le premier chapitre définit l’orientation liturgique, eucharistique, du texte johannique : le Christ y apparaît Prêtre de l’Alliance nouvelle. Le deuxième chapitre relève les rapports qui existent entre la « Prière sacerdotale » et la liturgie juive de la fête de l’Expiation, où le Grand-Prêtre purifiait les fautes du Peuple de Dieu et prononçait le saint nom de Yahwé. A partir de cette double référence au culte nouveau et ancien, le chapitre suivant met en lumière la transcendance du sacrifice et du sacerdoce du Christ : ici, se situe une étude parallèle de Jean 17, des poèmes du Serviteur souffrant et de l’épître aux Hébreux. Enfin, un dernier chapitre montre comment les ministres du Christ ont part à la double consécration du Christ, Prêtre unique et victime parfaite. Comme Lui, apôtres et successeurs sont consacrés et envoyés dans le monde. Tel est le fondement du sacerdoce ministériel distinct de celui qui est commun à tous les fidèles. Une ample conclusion générale reprend succinctement les étapes de cette exégèse de Jean 17 et indique les sources bibliques d’une authentique spiritualité sacerdotale. Ce livre substantiel prolonge et complète l’important exposé qu’A. Feuillet a entrepris sur la théologie de saint Jean dans Le Mystère de l’Amour divin dans la théologie johannique, recensé, l’an dernier, dans cette chronique.

L’essai du Dr R. A. Lambourne, Le Christ et la santé. La mission de l’Église pour la guérison et le salut des hommes [9], est une première « théologie de la santé » : elle s’inspire d’une étude personnelle de l’Écriture et d’une longue pratique médicale. L’auteur, décédé récemment, fut toute sa vie médecin, praticien d’hôpital et généraliste, avant de devenir théologien de l’Église anglicane. Son livre développe cette thèse centrale : le caractère communautaire des maladies comme des guérisons. Pour lui, péché et maladie sont les symptômes d’un désordre social qu’il faut traiter au sein de la communauté. La lecture de l’Ancien comme du Nouveau Testament marque aussi, au plan communautaire, le lien entre péché et maladie, salut et guérison. D’où la mission qui incombe à l’Église du Christ de poursuivre publiquement son œuvre de salut et de guérison auprès des malades et des souffrants : le Christ n’a-t-il pas affirmé sa présence réelle dans tout geste de miséricorde qui, selon une expression de l’auteur, est « le sacrement du verre d’eau fraîche » et n’a-t-il pas annoncé, dans ce service fraternel, l’avènement d’une communauté nouvelle ? Cette mission thérapeutique de l’Église se soucie également d’évaluer les besoins des populations, d’étudier l’amélioration des conditions de vie, de mettre en œuvre toute forme nouvelle de service médical et psychologique. Ce livre considère l’être humain dans sa plénitude et son intégrité ; il ne dissocie pas la tâche médicale, si spécialisée aujourd’hui, de la responsabilité qu’a le chrétien dans le monde contemporain. Tous ceux qui sont au service de la santé des hommes, aimeront lire ce livre prophétique, riche d’expériences et de réflexions.

3. Évangiles

Les dernières Journées Bibliques de Louvain ont pris pour sujet les évangiles synoptiques : d’abord l’étude de la tradition et de la rédaction en 1965, puis, les problèmes littéraires et théologiques que pose chaque évangile : Luc en 1968, Matthieu en 1970, Marc en 1971. Cette année, paraît, un peu tardivement, le volume consacré à L’Évangile de Luc [10]. Il est dédié à la mémoire de Mgr Cerfaux, cofondateur des Journées Bibliques, décédé le 11 août 1968. D’où, en tête de ce volume, l’ébauche d’un portrait du regretté exégète par Mgr Descamps, un aperçu de sa carrière et de son œuvre scientifique par Mgr Coppens, et la dernière contribution de Mgr Cerfaux « L’utilisation de la source Q par Luc ». De ces études préliminaires, relevons cette confidence du grand exégète : « J’ai trouvé un contact vivant avec le Christ de l’histoire et je suis sûr que c’était en même temps le Christ de ma foi » (8 août 1968). Parmi les rapports de ces Journées Bibliques, signalons, dans le cadre de cette chronique, outre l’exposé introductif de W.G. Kümmel sur Luc dans la théologie contemporaine, quelques études de textes : la rédaction de Lc 4,14-16a et le « Bericht vom Anfang », par J. Delobel ; la rédaction lucanienne du logion des pécheurs (Lc 5,10c), par R. Pesch ; l’hypocrisie des Pharisiens et le dessein de Dieu (Lc 13,31-33), par A. Denaux ; les discours de Pierre dans Actes et le ch. 24 de l’évangile de Luc, par J. Dupont.

Le Parcours évangélique [11] d’A. Paul trace des « perspectives nouvelles ». Le point de départ est l’évangile matthéen de l’enfance de Jésus (ch. I) ; le terme, l’enfance de l’Église au livre des Actes des Apôtres (ch. VII). Entre ces deux pôles, se situent diverses recherches : une lecture de plusieurs récits de miracles, guérison d’un lépreux, guérison de l’aveugle – des aveugles – de Jéricho (ch. II) ; une explication des récits parallèles de l’Entrée de Jésus à Jérusalem (ch. IV) ; divers essais de théologie biblique sur le lieu et l’espace de la Parole chez Matthieu (ch. III), les interprétations de la mort du Christ (ch. V), la quête du premier jour (ch. VI). L’auteur emprunte les voies traditionnelles de l’histoire des formes et de la rédaction, mais il s’inspire aussi de la « nouvelle critique ». Par son souci pédagogique, ce modeste ouvrage inaugure une lecture neuve des textes évangéliques.

Dans Lectures d’Évangiles [12], G. Becquet et ses collaborateurs, R. Beauvery et R. Varro, présentent une série de vingt-six évangiles lus, durant l’année B, dans la liturgie des dimanches et des fêtes, depuis l’Avent jusqu’à la Pentecôte. Il s’agit d’une initiation à la lecture des Évangiles qui, si elle ne comporte pas d’apparat critique, utilise les meilleurs résultats de l’exégèse scientifique et suit une méthode rigoureuse, analogue à celle que J. Delorme préconise dans son Des Évangiles à Jésus, recensé dans la dernière chronique. Sauf pour le récit de la Passion, la démarche demeure identique : d’abord, une prise de contact avec le texte (lu dans la version de la Synopse Benoit-Boismard) et un premier relevé des questions ; ensuite, un examen du contexte, de l’organisation et du genre du texte ; puis une explication des principales données et notions mises en évidence par la structure du texte ; enfin, quelques considérations (forcément sommaires) sur l’histoire de la tradition et l’historicité de l’événement ainsi que quelques pistes de réflexion pour le lecteur contemporain. En fin de volume, se trouvent un lexique des termes techniques, une table des principaux thèmes bibliques, une bibliographie qui renvoie, pour une étude plus approfondie, à des travaux plus importants en langue française. Bref, il s’agit là d’un instrument de travail, accessible à un grand nombre, pour la recherche personnelle ou le travail en groupe.

Dans son dernier ouvrage, Mgr de Solages analyse Comment sont nés les Évangiles [13]. À l’origine de ceux-ci, se place un document x qui correspond à ce que les exégètes allemands ont appelé la « Quelle ». Matthieu et Luc l’ont reprise, quoique de manière différente. Ce document est antérieur à l’an 64, date de la mort de Pierre. Peu après celle-ci, est rédigé l’évangile de Marc, interprète de Pierre dont il transmet la prédication. L’évangile de Luc est écrit vers 80, après la ruine de Jérusalem mais avant l’évangile de Jean ; il utilise, en plus du document x et de l’évangile de Marc, les données de l’enquête qu’il a menée personnellement auprès des témoins oculaires de la vie de Jésus, probablement à partir de l’an 50. L’évangile canonique attribué à Matthieu est l’œuvre d’un auteur anonyme qui utilise comme Luc le document x et l’évangile de Marc ainsi que des éléments personnels dont l’origine est inconnue ; il est contemporain du second évangile. Cette explication que de Solages donne de la formation des évangiles synoptiques est proche de la théorie classique des « deux sources » prônée par l’exégèse allemande depuis le siècle dernier. Ceux qui sont préoccupés par la réalité historique du message évangélique, trouveront dans cet ouvrage un exposé clair de cette question classique.

Mgr J. J. Weber consacre aussi son dernier ouvrage à l’étude des évangiles. Croyez à l’Évangile [14] comporte deux parties distinctes ; la première décrit la formation et la valeur historique des évangiles ainsi que les méthodes d’exégèse utilisées aujourd’hui ; la seconde analyse des « pages d’Évangile » particulièrement discutées à l’heure actuelle, telles que les récits de l’enfance du Christ, de ses miracles, de sa résurrection. La préoccupation de l’auteur est de sauver la foi de l’Église des écueils de l’exégèse moderne, historicisme ou fidéisme, et de rappeler les positions traditionnelles. Mais certaines affirmations sont hâtives et pas suffisamment fondées.

4. Saint Paul

En Méditerranée avec l’Apôtre Paul [15] de J. L. Vesco est plus qu’un guide de voyage : il constitue une excellente introduction à la vie et à l’œuvre de saint Paul. Après avoir brossé un tableau du monde romain et présenté les sources de son exposé, Épîtres et Actes, l’auteur trace un portrait de son héros et raconte ses voyages en Méditerranée, depuis l’Anatolie jusqu’en Occident. Chacune des étapes de l’itinéraire de l’apôtre revit, sous les yeux du lecteur, non seulement grâce à un commentaire approfondi, mais aussi grâce aux nombreux documents qui l’accompagnent, cartes, plans, photographies. À la fin de l’ouvrage, un tableau chronologique fournit les points de repères indispensables et une bibliographie judicieusement choisie invite le lecteur à poursuivre des études plus détaillées. J. L. Vesco, qui a maintes fois effectué les mêmes itinéraires que saint Paul en méditant ses épîtres, réussit à faire entendre le message de salut que l’apôtre proclamait, dans les synagogues et sur les places, aux Juifs et aux païens, il y a près de deux mille ans.

Sous le titre Christologie paulinienne et tradition biblique [16], A. Feuillet analyse d’abord quelques textes majeurs des épîtres de saint Paul : 1 Co 10,1-4 (la pérégrination des Hébreux à travers le désert et le Christ-Rocher) ; 2 Co 3,17-18 et 4,4-6 (la contemplation de la gloire du Seigneur dans le miroir du Christ, image de Dieu) ; Col 1,15 (Le Christ « Premier-né de toute créature ») ; Ph 2,6-11 (l’hymne christologique). L’auteur reprend ici, en les simplifiant et parfois en les modifiant, un certain nombre d’éléments d’un ouvrage antérieur actuellement épuisé, Le Christ, Sagesse de Dieu. À partir de ces analyses de textes, deux questions difficiles sont abordées ensuite : la première est l’exégèse des textes christologiques de saint Paul à partir de la tradition biblique antérieure et la liberté dont les exégètes jouissent dans leur travail ; la seconde est la meilleure manière de traduire ces textes à l’usage des fidèles et, d’une manière plus générale, le problème de la traduction liturgique de l’Écriture. Cet ouvrage offre une riche introduction à la christologie de saint Paul ; de plus, il sensibilise à un problème d’actualité, la transmission de la Parole de Dieu par la liturgie.

P. Jundt a donné une belle traduction du grand commentaire de L’Épître aux Romains [17] que K. Barth publia pour la première fois en 1919. Cet ouvrage monumental a été, dans le protestantisme, le manifeste d’un renouveau théologique. Il dénonçait avec une vigueur excessive l’insuffisance de l’herméneutique dite « scientifique » dès qu’on l’applique à l’Écriture et présentait, à titre d’exemple, une nouvelle manière d’expliquer et de comprendre l’épître aux Romains. D’autre part, sous la forme insolite d’un commentaire d’Écriture, il entreprenait une critique radicale du protestantisme libéral dont A. Harnack était le chef de file et s’efforçait de restaurer, dans sa pureté, la doctrine des grands Réformateurs. De tout temps, en raison de sa synthèse doctrinale, l’épître aux Romains a occupé une place privilégiée dans la pensée chrétienne ; malgré ses vues unilatérales, l’ouvrage de K. Barth en est un commentaire vigoureux et difficile.

Cette année, sont parus deux commentaires de l’épître aux Galates, ceux de P. Bonnard [18] et d’H. Roux [19]. Le premier est une réédition d’un commentaire de 1953 : il compte cinq cents modifications et est augmenté de cent cinquante-cinq notes supplémentaires et d’un index analytique. D’une édition à l’autre, P. Bonnard a pris position sur deux points importants : l’identité des adversaires de Paul et l’enjeu théologique de l’épître. A ses yeux, « Paul combat des chrétiens d’origine juive hellénisée pour lesquels la circoncision est au premier plan de la discussion (...) ou des païens anciens, devenus prosélytes par la circoncision avant d’embrasser la foi chrétienne » (p. 5). D’autre part, « l’orientation protestante » du commentaire est réaffirmée avec nuances : dans cette épître, la foi au Christ est l’essentiel de l’Évangile de Paul. Ce commentaire scientifique est fondamental pour qui veut étudier cette importante épître de saint Paul. Au plan exégétique, le commentaire pastoral d’H. Roux doit beaucoup à celui de P. Bonnard ; il met davantage en lumière l’actualité du message de cette épître pour l’Église de notre temps. Sous l’influence des rencontres œcuméniques, son auteur, également pasteur protestant, dépasse l’interprétation traditionnelle de la Réforme, centrée sur le justification par la foi. Pour lui, la préoccupation dominante de Paul est de « sauvegarder à la fois l’unité de l’Église et la liberté dans l’Église », unité et liberté également menacés par la tentative des judaïsants de « soumettre l’Église à la Loi ». A une époque de mutation, chacun est convié à maintenir cette double exigence.

5. Spiritualité du Nouveau Testament

Dans un recueil qu’il a intitulé Celui que vous ne connaissez pas [20], P. Lauzeral rassemble une cinquantaine de méditations sur Jésus-Christ. Comme l’affirme l’auteur, « Pour chacun d’entre nous, un très doux devoir s’impose, celui d’apprendre à connaître Jésus... ». Ces pages vibrantes et savoureuses n’ont d’autre but que d’introduire à la contemplation de l’Évangile, qui n’est pas l’apanage des maîtres en Écriture sainte.

L’Évangile, livre des Pauvres [21], de G. Delarue, s’efforce de définir, au-delà des préjugés faciles, la pauvreté telle que Jésus et ses disciples l’ont vécue et prêchée, au milieu des misères de leur temps, sans discréditer la richesse et les riches. La pauvreté ne fait qu’un avec l’enfance spirituelle ; de tout temps, elle exprime l’attitude fondamentale de l’homme devant Dieu.

Fr. Chalet présente une série de Flashes... sur les Actes des Apôtres [22]. Les premiers disciples de Jésus ressuscité ont dit non à une société livrée aux idoles de l’Ordre, de l’Érôs et de l’Argent. Ils ont posé des actes prophétiques, bouffées d’air frais et cris de joie dans un monde voué à l’ennui. De procès en procès, ils furent les témoins d’un monde nouveau, fraternel. Pour l’auteur de ces flashes, « lire les faits divers des Actes des Apôtres, c’est lire l’histoire de tous les croyants ».

Au terme de cette chronique, nous tenons également à signaler à nos lecteurs le riche article que le Père D. Mollat a consacré à (Saint) Jean l’Évangéliste [23] dans l’avant-dernier fascicule du Dictionnaire de Spiritualité. Cet article, fruit d’une longue étude et d’une familiarité intime avec la pensée de l’apôtre, constitue, sans aucun doute, la meilleure introduction actuelle à sa spiritualité. L’auteur envisage de le publier aussi, séparément, sous la forme d’un livre. Celui-ci viendra combler une lacune.

Rue du Collège Saint-Michel 60
B-1150 BRUXELLES, Belgique

[1Le Nouveau Testament. Traduction œcuménique de la Bible. Éd. intégrale. Paris, Éd. du Cerf ; Les Bergers et les Mages, 1972, 22 x 16, 826 p.

[2Jésus ou l’Évangile selon les Évangiles. Texte harmonisé par N. Bompois. Desclée De Brouwer, 1972, 22 x 14, 244 p.

[3B. Jay. Introduction au Nouveau Testament. Coll. théologique Clé. Yaoundé, Éd. Clé, 1969, 21 x 14, 286 p., 600 F CFA.

[4Le monde autour de l’an 33. La mort du Christ. Coll. Monde et Histoire. Paris, Larousse, 1972, 27 x 23, 160 p., nombreuses ill. en noir et en couleurs.

[5G. Bornkamm. Qui est Jésus de Nazareth ? Coll. « Parole de Dieu ». Paris, Éd. du Seuil, 1973, 21 x 14, 254 p.

[6J. Jeremias. Abba : Jésus et son Père. Coll. « Parole de Dieu », 8. Paris, Éd. du Seuil, 1972, 21 x 14. 144 p.

[7B. Rigaux. Dieu l’a ressuscité. Exégèse et théologie biblique. Coll. Studii Biblici Franciscani Analecta, 4. Gembloux, Duculot, 1973, 22 x 14, 448 p., 550 FB.

[8A. Feuillet. Le sacerdoce du Christ et de ses ministres. Paris, Éd. de Paris, 1972, 21 x 15, 224 p., 24 FF.

[9R. A. Lambourne. Le Christ et la santé. La mission de l’Église pour la guérison et le salut des hommes. Paris, Le Centurion ; Genève, Labor et Fides, 1972, 22 x 15, 250 p.

[10F. Neirynck (éd.). L’Évangile de Luc. Problèmes littéraires et théologiques. Mémorial Lucien Cerfaux. Coll. Bibliotheca Ephemeridum Theologicarum Lovaniensium, 32. Gembloux, Duculot, 1973, 25 x 16, 385 p., 650 FB.

[11A. Paul. Parcours évangélique. Perspectives nouvelles. Coll. ISPC. La foi en acte. Paris, Êd. du Cerf et Desclée, 1973, 20 x 14, 172 p.

[12G. Becquet. Lectures d’évangiles pour les dimanches et fêtes des temps principaux de l’année B. Paris, Éd. du Seuil, 1972, 21 x 14, 506 p.

[13B. de Solages. Comment sont nés les Évangiles. Marc. Luc, Matthieu. Toulouse, Privat, 1973, 21 x 14, 208 p., 23,50 FF.

[14J.-J. Weber. Croyez à l’Évangile. Coll. « Foi chrétienne ». Paris, Le Centurion, 1972, 20 x 13, 302 p.

[15J.-L. Vesco. En Méditerranée avec l’apôtre Paul. Paris, Éd. du Cerf, 1972, 21 x 14, 236 p.

[16A. Feuillet. Christologie paulinienne et tradition biblique. Desclée De Brouwer, 1973, 20 x 13, 264 p.

[17K. Barth. L’Épître aux Romains. Coll. de Commentaires Bibliques. Genève, Labor et Fides, 1972, 21 x 15, 514 p.

[18P. Bonnard. L’Épître de saint Paul aux Galates. 2e éd. Coll. « Commentaire du Nouveau Testament », 9. Neuchâtel, Delachaux et Niestlé, 1972, 25 x 19, 176 p., 48 FS.

[19H. Roux. L’Évangile de la liberté. Commentaire de l’Épître de Paul aux Galates. Genève, Labor et Fides, 1973, 21 x 15, 106 p.

[20P. Lauzeral. «  Celui que vous ne connaissez pas » (Jean 1, 26). Paris, Le Centurion, 1972, 18 x 14, 208 p.

[21G. Delarue. L’Évangile, livre des pauvres. Coll. « Vie spirituelle et vie intérieure ». Paris, Lethielleux, 1972, 19 x 14, 202 p., 16 FF.

[22Fr. Chalet. Flashes sur... les Actes des Apôtres. Coll. « À pleine vie ». Paris, Éd. Ouvrières, 1972, 18 x 12, 128 p.

[23D. Mollat, S.J., « Jean l’Évangéliste (saint) », dans Dictionnaire de Spiritualité, t. VIII, fasc. 52-63, col. 192-247 (Paris, Beauchesne, 1972).

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