On ne peut que se réjouir de la nouvelle présentation du chef d’œuvre thérésien, Le Livre des miséricordes, connu davantage sous le titre de Livre de la vie, repris ici dans la traduction du Père Grégoire de Saint Joseph (1813-1891), carme, introduite et annotée par Stéphane-Marie Morgain, carme, et révisée par Jean-Claude Jaffé pour la traduction approuvée en 1948 par le Père Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus (Henri Grialou, 1894-1967). Proche de l’original thérésien, elle se base sur le texte de référence du Père Tomas Alvarez (1923-2018), grand spécialiste thérésien espagnol, en conciliant fidélité à l’original et meilleure compréhension pour le lecteur moderne. Cette nouvelle version ne se veut pas seulement actuelle dans sa traduction – « approche toujours mouvante, ligne de crête à risque pour tous les temps » (p. 29)–, mais aussi en raison de sa spiritualité féconde.
Stéphane-Marie Morgain, spécialiste du XVIIe siècle français et professeur émérite de l’Institut catholique de Toulouse, du Teresianum à Rome et de l’Institut catholique de Paris, retrace à grands traits – en introduction – l’histoire enchevêtrée de ce premier écrit de Thérèse, le plus long et le plus riche, parce que « le plus proche de la personne et de la pensée de son auteur » (p. 6). Cette narration, « clef d’interprétation de son enseignement » (p. 6), est difficile plus que tous les autres écrits à cause, tout d’abord du « ton confidentiel, presque secret du texte » (p. 8), une « autobiographie impersonnelle » destinée à un petit groupe d’amis. Difficile également en raison de son « dualisme thématique », ce dédoublement de l’argumentation à la fois narrative et biographique, mais aussi doctrinale et pédagogique. Récit et enseignement s’entrecroisent en permanence au fil du récit. Le périple aventureux de ce livre thérésien s’étend entre 1562, l’année de la première version (il y en aura beaucoup !), 1575, l’année où l’original fut confisqué par l’Inquisition et 1588, l’année de la première édition par Louis de León à Salamanque, après la mort de la Madre. Tous les aspects de cette autobiographie au succès ininterrompu depuis plus de quatre siècles sont évoqués : genèse de sa composition et de ses différentes versions, structure du livre, contenu doctrinal avec son thème majeur qu’est l’oraison au cœur du livre. L’oraison mentale pénètre aussi bien l’existence de Thérèse que la doctrine de son récit, elle a la fonction précise de « tenir la misère ouverte à la miséricorde » (p. 27). Elle exprime aussi le rapport mutuel entre les deux protagonistes – Dieu et l’âme – et le réalise. Destinée en premier lieu à un petit cercle de destinataires, ce « livre thérésien s’adresse le plus expressément à un public illimité » (p. 27). Faut-il encore souligner la chronologie détaillée de la vie de Thérèse de Jésus ainsi que la richesse des 744 notes explicatives et claires qui en facilitent la lecture ? N’oublions pas que ce Livre de la Vie a orienté vers la foi catholique sainte Edith Stein !
Collection Sources du Carmel, 1
Éditions du Carmel, Toulouse, mars 2023
500 pages · 29,00 EUR
Dimensions : 13 x 19 cm
ISBN : 9782847138191